Les Berbères sont des Arabes
Faux. Bien que les linguistes reconnaissent une lointaine parenté entre langues arabe et berbère au sein du groupe dit «afro-asiatique», les témoignages des temps historiques distinguent radicalement les deux peuples. Les Berbères – le nom apparaît pour la première fois chez les auteurs arabes – sont les occupants «de tout temps» du Maghreb, tandis que les Arabes n’y apparaissent qu’avec l’islam, aux VIIe-XIe siècles. Dans le Maghreb islamisé, le pouvoir, la ville, la langue dominante sont d’abord arabes, d’où la position de résistance et d’insoumission reconnue aux Berbères.
Les Berbères ne sont que superficiellement musulmans
Faux. La résistance berbère à l’arabisation a conduit à un refus analogue de la religion musulmane. En fait, arabisation et islamisation sont nettement séparées. Il est vrai que le centre et l’ouest du Maghreb, surtout, ont souvent rejeté l’orthodoxie musulmane des villes, mais au profit d’autres versions de la religion, kharijisme au VIIIe siècle, chiisme au Xe siècle, almohadisme aux XIIe-XIIIe siècles… Ce qui semble donc caractériser la religiosité berbère, en particulier au Maroc, c’est son conservatisme, spontanément associé au rejet de l’État.
Tous les Berbères sont des Kabyles
Faux. Les Kabyles sont des Berbères, mais tous les Berbères ne sont pas des Kabyles, dont le nom vient de l’arabe qaba’il, «tribus», par opposition au monde urbain de la côte algéroise. La célébrité des Kabyles tient à leur présence ancienne à Alger, puis dans l’immigration algérienne en France, dès 1920, à leur rôle dans le combat pour l’indépendance de l’Algérie, mais aussi à leur adoption plus marquée de la modernité et de la langue française. Cependant, les Kabyles ne représentent que 60 % des Berbères algériens et un quart environ des Berbères du Maghreb.
La colonisation a favorisé les Berbères contre les Arabes
Faux. La colonisation a parfois identifié la Kabylie, tard conquise (après 1857), à une «Auvergne maghrébine». On opposa souvent la «démocratie» villageoise berbère à l’«aristocratie» de la tribu arabe ou à l’urbanité des «Maures» de la côte. Mais la colonisation se méfia souvent de cette démocratie – au Maroc, la France s’appuya dans l’ensemble sur la monarchie chérifienne et les élites arabes. Et le rôle actif des Kabyles dans le FLN suffirait à écarter le mythe de la « berbérophilie » coloniale, forgé par le nationalisme arabe au moment des indépendances.
Les Berbères sont musulmans depuis toujours
Faux. L’histoire des Berbères commence au contact des Carthaginois et surtout des Romains. Le Maghreb berbère a connu, entre le IIe et le VIIe siècle, un essor du christianisme aussi précoce qu’en Gaule. Mais les Berbères chrétiens ont aujourd’hui presque disparu des provinces autrefois les plus acquises à l’Église – en particulier la Tunisie. À partir du Xe siècle, l’arabisation y a été aussi totale que la romanisation et la christianisation antérieures, et pour les mêmes raisons. Dans un milieu cultivé et urbanisé, le nouvel empire islamique a imposé sa civilisation aussi aisément que l’Empire romain avant lui.