Le blues du casque bleu
Critiqués de toute part, les 17 000 casques bleus de la Mission de l’ONU au Congo semblent bien incapables de maintenir une paix, fût-elle relative.
Plus d’un tiers d’entre eux sont déployés dans la province du Nord-Kivu ce qui n’a visiblement pas empêché la progression rapide des rebelles de Laurent Nkunda qui campent à un jet de pierre de Goma, la capitale. A Kiwanja, où environ 140 hommes sont stationnés, des crimes de guerre auraient été perpétrés quasiment sous leurs yeux la semaine dernière. Pourtant le mandat des Nations Unies est clair : la Monuc peut utiliser la force pour limiter les pertes parmi la population civile et faire respecter les accords de cessez-le-feu de 2003.
Le malaise est palpable et la frustration est grande dans les rangs de la force de maintien de la paix. Pour preuve, fin octobre, le commandant de la Monuc a démissionné faute de moyens, au plus fort des combats. Pour lui l’enveloppe de seulement un milliard de dollars par an pour gérer une crise aussi complexe, s’avèrerait bien insuffisante. Difficile de lui donner tort lorsque l’on compare avec d’autre théâtres d’opérations : le budget annuel de la Monuc suffirait à peine à couvrir une semaine de présence américaine en Irak. A l'unanimité, les Nations Unies viennent certes de consentir à un effort pour gérer l'urgence de la crise en votant l'envoi de 3000 hommes supplémentaires en renfort, mais cette décision arrive bien tard quand on sait que tous les voyants sont au rouge dans la région depuis des mois.
Le blues du casque bleu au Congo-Kinshasa, c’est aussi le résultat d’un mandat que beaucoup qualifient de « schizophrénique » qui fait d’eux des boucs-émissaires idéaux : les rebelles les accusent de se battre contre eux, l’armée régulière, de ne pas se battre assez pour eux et la population qui ne s’estime pas protégée multiplie les manifestations d’hostilité, parfois violentes envers eux.
Reste que la Monuc est aujourd’hui la seule barrière capable de limiter l’ampleur des combats entre les belligérants. L’ONU rappelle d’ailleurs à qui veut bien l’entendre que ses troupes ont permis en 2006 la tenue des premières élections libres en RDC depuis 1965.
Damien Wanner