Alain Gresh. De quoi la Palestine est-elle le nom ?

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Casablanca d'antan
VIB
jeudi 26 mars 2009 - 06h:39

Alain Gresh - Le Monde Diplomatique


La guerre israélienne contre Gaza de l’hiver 2008-2009 a soulevé une immense émotion et de puissantes mobilisations à travers le monde. Elle a provoqué de vifs débats autour de la légitimité de cette offensive, des crimes commis, de l’avenir - et même de la possibilité - de la paix entre Palestiniens et Israéliens. Une question a aussi ressurgi : pourquoi la Palestine ? Pourquoi suscite-t-elle tant d’émoi, tant d’invectives, tant de manifestations ? Après tout, la planète connaît des guerres plus meurtrières, que ce soit au Darfour ou au Congo ; des oppressions au moins aussi dévastatrices, que ce soit au Tibet, en Tchétchénie ou en Birmanie ; des dénis aussi scandaleux du droit à la liberté, qui concernent le sort des intouchables en Inde, celui des Nubiens au Kenya ou des Indiens dans divers pays d’Amérique latine.

Que se cache-t-il donc derrière cette focalisation sur la Palestine ? Pour certains, la réponse ne fait aucun doute : c’est la présence des juifs, la haine contre eux qui est le moteur de cet intérêt malsain. La critique de l’Etat d’Israël et de sa politique servirait de feuille de vigne à l’antisémitisme éternel.

Même sans partager ce point de vue réducteur, la question « Pourquoi la Palestine ? » est légitime. Elle offre même un intérêt dans la mesure où elle permet de réfléchir à la place centrale que ce conflit occupe aujourd’hui sur la scène mondiale, au même titre que ceux du Vietnam dans les années 1960-1970 et de l’Afrique du Sud dans les années 1970-1980 (lire ci-dessous « Du Vietnam à l’Afrique du Sud »).

La Palestine a désormais pris le relais. Pourquoi ? Parce que, en ce début de XXIe siècle, elle cristallise un moment de l’histoire des relations internationales : dernier « fait » colonial né du partage des empires, elle symbolise la persistance de la relation inégale entre le Nord et le Sud - comme le conflit du Vietnam ou celui d’Afrique du Sud -, mais aussi la volonté de sa remise en cause. Elle est le paradigme d’une injustice jamais réparée. L’implication des États-Unis, principale puissance mondiale, et d’Israël, principale puissance régionale, conforte son enjeu mondial.


http://www.info-palestine.net/article.php3?id_article=6339
Aux XVIIIe et XIXe siècles, les collines de Jérusalem et les oliviers de Palestine attirèrent romanciers et peintres français ou britanniques. Chaque nom, chaque pierre évoquait la naissance des religions, les Livres saints, la traversée du Sinaï par Moïse, le sermon de Jésus sur la montagne, même pour des voyageurs que n’exaltait plus une foi conquérante. Durant de longues périodes, la Méditerranée fut une mer d’échanges, aussi bien humains que culturels, plutôt que de déchirements. Et l’esprit des Croisades ne soufflait pas toujours sur la « mer du milieu »...

La situation a désormais changé. Comme avant elle le Vietnam ou l’Afrique du Sud, la Palestine dévoile la réalité des relations internationales. Celles-ci sont marquées par la domination occidentale sur le monde et sa contestation de plus en plus forte. Une période de deux siècles marquée par la conquête européenne du monde est en train de s’achever.
 
« On nous demande d’être des victimes consentantes »
jeudi 26 mars 2009 - 06h:39

Une interview de Raji Sourani


Le Centre palestinien pour les droits de l’homme compte 57 personnes qui travaillent à la collecte d’éléments de preuve qui leur permettra d’accuser Israël de crimes de guerre dans la bande de Gaza.

Son directeur, Raji Sourani, se montre satisfait de la décision du juge Fernando Andreu d’enquêter sur la mort de 14 civils palestiniens dans un bombardement israélien en 2002. Sourani (Gaza, 1953), l’un des initiateurs de la plainte, est convaincu que la justice espagnole restera sourde aux pressions Israéliennes.

Question : Que pensez-vous de la décision de la justice espagnole d’enquêter sur la mort de 14 civils palestiniens en 2002 ?

Cela montre l’indépendance de la justice espagnole. C’est un moment historique et une victoire pour les victimes et un [premier aboutissement] des poursuites judiciaires.

Q : Pensez-vous que le procès aboutira ou qu’il sera ralenti par le gouvernement espagnol ?

J’espère et je suis convaincu que la justice espagnole conservera son indépendance.

L’ambassade d’Israël a envoyé hier au juge la documentation demandée pour tenter d’arrêter l’affaire.

Nous avons epuisé toutes les voies légales pour que le cas soit traité en Israël. Certains de nos collègues israéliens ont tenté de faire examiner l’affaire par leurs autorités et ils en ont aussi été empêchés. L’État d’Israël n’a répondu à aucune des requêtes. Le juge Andreu a demandé à plusieurs reprises les pièces concernant cette affaire et les Israéliens n’ont répondu à aucune de ses demandes.

Q : Ce procès permettra t-il de réduire l’impunité de l’armée israélienne ?

Bien sûr. Nous avons plusieurs dossiers ouverts dans d’autres pays contre les crimes israéliens. Nous défendons la valeur de l’action de la justice afin qu’elle soit plus forte que la loi de la jungle. Au cours des dernières années, Israël a amplifié les mesures pour protéger les criminels de guerre présumés.

Q : De quelles mesures parlez-vous ?

Les peines de sept ans d’emprisonnement pour ceux qui fournissent des preuves qui conduisent ses soldats devant le tribunal. Ils délivrent des passeports avec de faux noms pour que les militaires impliqués dans des crimes de guerre puissent voyager librement. Ils ont également envoyé des délégations dans plusieurs pays européens afin de faire pression sur leurs gouvernements pour qu’ils enlèvent les lois qui amèneraient à les poursuivre. Mais nous ne pardonnons ni n’oublions les crimes contre des personnes innocentes.

Q : Y aura-t-il plus de procès pour l’offensive israélienne contre Gaza et ses plus de 1300 morts ?

Il existe des obstacles juridiques, mais Olmert, Barak et Livni, finiront par rendre des comptes devant la justice pour les crimes perpétrés dans la bande de Gaza. Les crimes qui ont été vus en direct à la télévision.

Q : Israël accuse le Hamas d’utiliser des civils comme boucliers humains.

C’est quelque chose que nous devons démontrer preuves à l’appui. Si le Hamas les ont utilisés comme boucliers humains, ça ne donne pas à Israël de justification pour attaquer de façon brutale des sites qu’ils savent remplis de civils. Dans les discussions sur les auteurs du bombardement de 2002 on peut entendre comment l’un d’entre eux a mis en garde contre le risque sur la population civile et l’armée lui ordonné de passer à l’attaque.

Israël continue d’accumuler, comme une boule de neige, les crimes contre la population civile palestinienne. L’attaque de Gaza n’était pas dirigée contre le Hamas ou le Fatah, mais contre le peuple palestinien. Pendant que tout le monde nous demande d’être des victimes consentantes.

Q : En tant que centre indépendant avez-vous eu des problèmes avec le Hamas et le Fatah.

C’est très sain. Si nous n’avions pas de problèmes avec les deux parties c’est que quelque chose irait mal. Tout d’abord nous déplorons les abus commis par le Fatah et ensuite ceux du Hamas.

Q : Croyez-vous à la réconciliation palestinienne ?

Je suis optimiste. Mais nous avons besoin d’unité pour retrouver la force. Nous demandons à Israël, à l’Europe et aux États-Unis de cesser d’interférer dans la politique palestinienne en faisant pression sur le président Mahmoud Abbas pour qu’il choisisse entre eux (Hamas) ou la communauté internationale.

Q : Que pensez-vous du rôle que joue l’Europe dans le conflit israélo-palestinien ?

La position européenne est stupide, injuste et moche au niveau gouvernemental. Dans le travail de base sur le terrain, c’est le rapport humain qui es génial et nous en sommes très fiers. L’Europe a amélioré ses accords avec Israël alors que des crimes étaient commis contre les Palestiniens. C’est une honte. Nous demandons la suspension des accords commerciaux préférentiels entre l’Europe et Israël.
 
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