Par LEXPRESS.fr,
"Beaucoup d'Algériens ont le sentiment d'un gâchis"
Manifestation pour le changement politique le 2 mai dernier à Alger.
A l'occasion des 50 ans de l'Algérie indépendante, Dominique Lagarde a répondu aux questions des internautes de LEXPRESS.fr. Journaliste à L'Express, elle est l'auteur de "Algérie - La désillusion", paru ce jeudi.
Zaza: Pourquoi la désillusion?
Après une introduction sur l'Algérie d'aujourd'hui, le livre offre une sélection des articles de l'Express pendant la guerre d'indépendance puis après, jusqu'à aujourd'hui. Si nous avons choisi ce titre, c'est que les espérances étaient fortes au moment de l'indépendance et qu'aujourd'hui beaucoup d'Algériens ont le sentiment d'un gâchis. Ils sont convaincus que leur pays si riche aurait pu faire mieux et que leur vie pourrait être meilleure.
Ligberté: L'Algérie n'a que 50 ans d'indépendance, ne peut on pas lui laisser le temps comme tout pays qui a été colonisé pendant 132 ans?
Les Algériens sont impatients... Ils constatent que leur pays est riche et ils enragent d'être si pauvres et de vivre si mal dans un pays qui était celui de tous les possibles. Ce n'est pas à nous de "laisser du temps" ou pas à l'Algérie, c'est aux citoyens de ce pays. Or ceux-ci manifestent tous les jours leur désillusion, notamment en essayant au péril de leur vie, d'aller tenter leur chance ailleurs. Il est difficile de ne pas pointer la responsabilité des dirigeants algériens dans cet état de fait. Ils n'ont pas pris le problème du développement à bras le corps, c'est le moins qu'on puisse dire, et ce sont davantage occuper de se répartir la rente du pétrole.
Allways: Bonjour, la guerre d'Algérie était-t-elle inévitable?
Les Algériens enragent de vivre si mal dans un pays qui était celui de tous les possibles
Difficile à dire, on ne peut pas refaire l'histoire. Je crois cependant qu'elle était en effet inévitable, dès lors que l'indépendance, à laquelle aspiraient naturellement les Algériens, était une perspective impensable du point de vue des Français qui avaient fait de l'Algérie un département.
Bous: Pourriez-vous nous donner votre avis sur le fiasco des accords d'Evian? Pourquoi ces accords qui semblaient de bon sens n'ont jamais été appliqués?
Ils n'ont pas été appliqués à cause des extrémistes des deux bords. Politique de la terre brûlée de l'OAS, refus du FLN de laisser un vrai choix aux Français.
Jmleger: Le mal de l'Algérie ne vient-il pas du fait que la France s'est débarrassée du pays comme d'un papier gras en le mettant entre les mains incapables du clan d'Oujda qui exerce encore le pouvoir à ce jour en la personne de Bouteflika, lequel, comme Boumédiène et les autres, n'a participé que très marginalement à la guerre dite de "libération nationale" et qui ne possédait aucune formation pour assurer la gestion d'un pays nouvellement indépendant?
Tout s'est joué au cours de l'été 1962 après les accords d'Evian. Ce sont alors les militaires - l'armée des frontières du Boumediene- qui ont pris le pouvoir. L'armée s'est imposée comme l'arbitre des luttes de factions. Le GPRA issu des maquis de la résistance a été évincé par cette armée. C'est pourtant avec le GPRA que la France avait négociée.
"Beaucoup d'Algériens ont le sentiment d'un gâchis"
Manifestation pour le changement politique le 2 mai dernier à Alger.
A l'occasion des 50 ans de l'Algérie indépendante, Dominique Lagarde a répondu aux questions des internautes de LEXPRESS.fr. Journaliste à L'Express, elle est l'auteur de "Algérie - La désillusion", paru ce jeudi.
Zaza: Pourquoi la désillusion?
Après une introduction sur l'Algérie d'aujourd'hui, le livre offre une sélection des articles de l'Express pendant la guerre d'indépendance puis après, jusqu'à aujourd'hui. Si nous avons choisi ce titre, c'est que les espérances étaient fortes au moment de l'indépendance et qu'aujourd'hui beaucoup d'Algériens ont le sentiment d'un gâchis. Ils sont convaincus que leur pays si riche aurait pu faire mieux et que leur vie pourrait être meilleure.
Ligberté: L'Algérie n'a que 50 ans d'indépendance, ne peut on pas lui laisser le temps comme tout pays qui a été colonisé pendant 132 ans?
Les Algériens sont impatients... Ils constatent que leur pays est riche et ils enragent d'être si pauvres et de vivre si mal dans un pays qui était celui de tous les possibles. Ce n'est pas à nous de "laisser du temps" ou pas à l'Algérie, c'est aux citoyens de ce pays. Or ceux-ci manifestent tous les jours leur désillusion, notamment en essayant au péril de leur vie, d'aller tenter leur chance ailleurs. Il est difficile de ne pas pointer la responsabilité des dirigeants algériens dans cet état de fait. Ils n'ont pas pris le problème du développement à bras le corps, c'est le moins qu'on puisse dire, et ce sont davantage occuper de se répartir la rente du pétrole.
Allways: Bonjour, la guerre d'Algérie était-t-elle inévitable?
Les Algériens enragent de vivre si mal dans un pays qui était celui de tous les possibles
Difficile à dire, on ne peut pas refaire l'histoire. Je crois cependant qu'elle était en effet inévitable, dès lors que l'indépendance, à laquelle aspiraient naturellement les Algériens, était une perspective impensable du point de vue des Français qui avaient fait de l'Algérie un département.
Bous: Pourriez-vous nous donner votre avis sur le fiasco des accords d'Evian? Pourquoi ces accords qui semblaient de bon sens n'ont jamais été appliqués?
Ils n'ont pas été appliqués à cause des extrémistes des deux bords. Politique de la terre brûlée de l'OAS, refus du FLN de laisser un vrai choix aux Français.
Jmleger: Le mal de l'Algérie ne vient-il pas du fait que la France s'est débarrassée du pays comme d'un papier gras en le mettant entre les mains incapables du clan d'Oujda qui exerce encore le pouvoir à ce jour en la personne de Bouteflika, lequel, comme Boumédiène et les autres, n'a participé que très marginalement à la guerre dite de "libération nationale" et qui ne possédait aucune formation pour assurer la gestion d'un pays nouvellement indépendant?
Tout s'est joué au cours de l'été 1962 après les accords d'Evian. Ce sont alors les militaires - l'armée des frontières du Boumediene- qui ont pris le pouvoir. L'armée s'est imposée comme l'arbitre des luttes de factions. Le GPRA issu des maquis de la résistance a été évincé par cette armée. C'est pourtant avec le GPRA que la France avait négociée.