Les travailleurs africains arrivés en France dans les années 1960 et 1970 sont aujourdhui à la retraite. La plupart ont décidé dy rester. Sans cesser de rêver au « bled ».
Assemblés dans un café au milieu dune collection de poteries traditionnelles, une dizaine dhommes aux cheveux blancs bavardent autour dun thé à la menthe en disputant dinterminables parties de dominos. Sur un meuble, un globe terrestre quune main anonyme a arrêté sur le continent africain Non, la scène ne se déroule pas dans un pays du Maghreb, mais dans le quartier de Belleville, à Paris. Ouvert depuis cinq ans, le café social Ayyem Zamen (« le temps jadis », en arabe), accueille les chibanis, les « anciens » venus dAfrique.
« La plupart sont des hommes seuls, arrivés en France il y a trente ou quarante ans pour faire vivre leur famille restée au pays, explique André *Lefebvre, lanimateur du lieu. Ils ont toujours pensé repartir un jour, au plus tard à lâge de la retraite. Mais ce lieu existe et continuera dexister parce que nous partons du principe que la grande majorité dentre eux ne retourneront jamais en Afrique. »
Assis à une table, Ayad, casquette sans âge, fine moustache et mine désabusée. Né à Sétif, dans lEst algérien, il est arrivé en France à lâge de 20 ans il y a presque un demi-siècle et a longtemps travaillé dans le métro. Depuis peu à la *retraite, il touche 1 000 euros par mois, en comptant sa retraite *complémentaire, quil consacre *presque entièrement au paiement du loyer et aux courses quotidiennes. « Évidemment, jaimerais rentrer au pays, murmure-t-il en sirotant un café, mais ça nest pas possible pour linstant, ça me coûterait trop cher. Et puis, jai mes copains entre Ménilmontant et la porte des Lilas »
Habitations précaires
Ayad nest pas un cas isolé. Selon le ministère du Travail, il y aurait aujourdhui en France près de 71 000 migrants étrangers âgés de plus de 65 ans et percevant une aide au logement. Plus de 42 000 dentre eux vivent dans des foyers ou dans des habitations précaires (à lhôtel, chez des proches ou des amis). Une grande majorité dentre eux (85 %) sont mariés dans leur pays dorigine, où ils ne font pourtant que des séjours de courte durée. Selon une étude établie à partir des chiffres de lInstitut national de la statistique et des études économiques (Insee) datant de 1999 et 2005 et réalisée par Rémi Gallou, chercheur à la Caisse nationale dassurance vieillesse (Cnav), les foyers de migrants abriteraient 60 % de personnes originaires du Maghreb et 30 % dAfrique subsaharienne, les autres venant dEurope orientale et *dEurope méridionale, de Turquie et dAsie. « Mais les proportions ont tendance à séquilibrer du fait de la disparition progressive des Maghrébins, globalement plus âgés que les autres », précise le chercheur. « Ces *personnes sont prises au piège de lâge, estime Moncef Labidi, directeur du café social. Au départ, ils navaient choisi démigrer que dans la ferme intention de rentrer un jour au pays. Mais ils entrent désormais dans une zone de turbulences où la vie nest plus sereine. »
Et quand ils réussissent à regagner leur terre natale, les seniors africains sont souvent très déçus, déboussolés. Ils se sentent de trop et « ne trouvent plus leur place auprès dune épouse qui a pris lhabitude de diriger seule son foyer », poursuit Labidi. Ils se sentent aussi coupables vis-à-vis de leurs enfants, qui « leur reprochent leur absence et leur demandent pourquoi ils nont pas pu les suivre en France ». Et comment retrouver leur rôle de citoyen dans un pays quils ne connaissent plus ?
http://www.jeuneafrique.com/Article...raiteces-vieux-migrants-pieges-en-france.html
Assemblés dans un café au milieu dune collection de poteries traditionnelles, une dizaine dhommes aux cheveux blancs bavardent autour dun thé à la menthe en disputant dinterminables parties de dominos. Sur un meuble, un globe terrestre quune main anonyme a arrêté sur le continent africain Non, la scène ne se déroule pas dans un pays du Maghreb, mais dans le quartier de Belleville, à Paris. Ouvert depuis cinq ans, le café social Ayyem Zamen (« le temps jadis », en arabe), accueille les chibanis, les « anciens » venus dAfrique.
« La plupart sont des hommes seuls, arrivés en France il y a trente ou quarante ans pour faire vivre leur famille restée au pays, explique André *Lefebvre, lanimateur du lieu. Ils ont toujours pensé repartir un jour, au plus tard à lâge de la retraite. Mais ce lieu existe et continuera dexister parce que nous partons du principe que la grande majorité dentre eux ne retourneront jamais en Afrique. »
Assis à une table, Ayad, casquette sans âge, fine moustache et mine désabusée. Né à Sétif, dans lEst algérien, il est arrivé en France à lâge de 20 ans il y a presque un demi-siècle et a longtemps travaillé dans le métro. Depuis peu à la *retraite, il touche 1 000 euros par mois, en comptant sa retraite *complémentaire, quil consacre *presque entièrement au paiement du loyer et aux courses quotidiennes. « Évidemment, jaimerais rentrer au pays, murmure-t-il en sirotant un café, mais ça nest pas possible pour linstant, ça me coûterait trop cher. Et puis, jai mes copains entre Ménilmontant et la porte des Lilas »
Habitations précaires
Ayad nest pas un cas isolé. Selon le ministère du Travail, il y aurait aujourdhui en France près de 71 000 migrants étrangers âgés de plus de 65 ans et percevant une aide au logement. Plus de 42 000 dentre eux vivent dans des foyers ou dans des habitations précaires (à lhôtel, chez des proches ou des amis). Une grande majorité dentre eux (85 %) sont mariés dans leur pays dorigine, où ils ne font pourtant que des séjours de courte durée. Selon une étude établie à partir des chiffres de lInstitut national de la statistique et des études économiques (Insee) datant de 1999 et 2005 et réalisée par Rémi Gallou, chercheur à la Caisse nationale dassurance vieillesse (Cnav), les foyers de migrants abriteraient 60 % de personnes originaires du Maghreb et 30 % dAfrique subsaharienne, les autres venant dEurope orientale et *dEurope méridionale, de Turquie et dAsie. « Mais les proportions ont tendance à séquilibrer du fait de la disparition progressive des Maghrébins, globalement plus âgés que les autres », précise le chercheur. « Ces *personnes sont prises au piège de lâge, estime Moncef Labidi, directeur du café social. Au départ, ils navaient choisi démigrer que dans la ferme intention de rentrer un jour au pays. Mais ils entrent désormais dans une zone de turbulences où la vie nest plus sereine. »
Et quand ils réussissent à regagner leur terre natale, les seniors africains sont souvent très déçus, déboussolés. Ils se sentent de trop et « ne trouvent plus leur place auprès dune épouse qui a pris lhabitude de diriger seule son foyer », poursuit Labidi. Ils se sentent aussi coupables vis-à-vis de leurs enfants, qui « leur reprochent leur absence et leur demandent pourquoi ils nont pas pu les suivre en France ». Et comment retrouver leur rôle de citoyen dans un pays quils ne connaissent plus ?
http://www.jeuneafrique.com/Article...raiteces-vieux-migrants-pieges-en-france.html
« Si je rentrais au pays, jaurais peur de me transformer en poule aux ufs dor ! sourit-il. Quand jy vais en vacances, je commence toujours par demander à ma famille de ne prévenir personne de mon arrivée. En général, la tranquillité dure une semaine ; *ensuite On mapporte des petits cadeaux et, en contrepartie, on me demande des conseils Parfois, on me suggère de prendre en charge les frais médicaux dUntel ou Untel »