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PLD (Peace, Love and Diversity)
insécurité
Cureghem en manque despoir
Grégoire Comhaire
Mis en ligne le 03/02/2010
Ce quartier dAnderlecht est souvent qualifié de zone de non-droit. Pourtant, nombreux sont ceux qui croient en son potentiel.
Reportage
Un agent de change du centre-ville de Bruxelles est braqué à la Kalachnikov samedi, et voilà les problèmes de délinquance urbaine qui reviennent au galop dans les médias.
"Far West", "zones de non-droit", la presse et les politiques flamands sen donnaient à cur joie lundi matin pour qualifier le chaos qui, vu de Flandre, semblait régner à Bruxelles. Une ville où, à en croire certains, il serait même devenu "impossible de se promener sans se retrouver le couteau sous la gorge".
Parmi ces fameuses "zones de non-droit" régulièrement évoquées comme telles dans les médias, on trouve le quartier de Cureghem, dans la commune dAnderlecht. Une zone coincée entre la gare du Midi, les abattoirs et le canal, et qui récemment encore sest invitée sous les feux de lactualité après dimportants problèmes de racket survenus à lInstitut supérieur industriel de la rue des Goujons. Lendroit rêvé pour lensemble des médias du pays qui, en vingt-quatre heures, y ont chacun dépêché leur "envoyé spécial" pour aller voir de plus près si, effectivement, la loi de la jungle avait définitivement pris ses marques dans certaines rues de la capitale.
"Anderlecht, cest un peu le bon client quand il sagit de parler dinsécurité", explique le bourgmestre Gaetan Van Goidsenhoven. "Le périmètre de Cureghem pose en effet quelques problèmes depuis de nombreuses années et il subsiste ailleurs dans la commune quelques poches, notamment aux abords de certaines stations de métro, où la délinquance est problématique."
"Et cette délinquance sexprime sous des formes très diverses, poursuit le bourgmestre, avec une tendance manifeste à la confrontation avec tout ce qui, de près ou de loin, représente lautorité publique". "Cela va jusquà lélagueur qui a récemment été pris à partie par quelques jeunes alors quil vient pourtant travailler à lembellissement de leur quartier."
Au dire des riverains, la place du Conseil et la place Leemens seraient aujourdhui devenues le repère dune pègre, pas toujours très âgée, qui sy livre en toute impunité à des trafics en tous genres. "La nuit, ils font régulièrement sauter la cabine à haute tension pour ne pas être gênés par léclairage public", nous confie un commerçant. "Et ce nest sûrement pas la police qui vient les déranger. Ils ont bien trop peur de provoquer une émeute."
Trafic de drogue, agressions, incivilités De nombreux habitants du quartier expriment leur ras-le-bol face à une justice quils estiment "laxiste" et à un sentiment dimpunité profondément installé dans les mentalités. "Maintenant, tout le monde va parler de tolérance zéro pendant quelques jours, et puis ça va sarrêter là. Ça fait dix ans quon nous fait les mêmes promesses chaque fois quun incident fait la Une des journaux."
Situé à quelques minutes à peine de la Grand-Place et du centre-ville, Cureghem a pourtant tout, en apparence, du quartier de banlieue délaissé des circuits économique et des politiques de cohésion sociale. Un quartier déserté par lindustrie, miné par les problèmes sociaux, et "doù on séchappe dès que lon bénéficie un peu de lascension sociale pour laisser la place à dautres, plus marginalisés que soi".
Dans les locaux de lASBL Fefa, sur le boulevard de la Révision, Thierry Pasture côtoie toute lannée des jeunes dont lunivers quotidien se limite aux frontières de Cureghem. En leur offrant la possibilité dintégrer une équipe de football et de disputer des matches en jouant sous le maillot du football club dAnderlecht, lASBL permet, depuis 2004, à quelque 140 jeunes du quartier de se perfectionner dans leur passion, tout en luttant contre le décrochage scolaire.
Pour lui, si les problèmes du quartier sont réels, il convient surtout de ne pas sombrer dans la paranoïa et, surtout, de ne pas remettre en cause les bienfaits apportés par les politiques de prévention. "Je crois que lessentiel des problèmes de grande délinquance que connaît le quartier est le fait dune quarantaine de personnes parmi les milliers de jeunes qui y résident", explique-t-il.
Cureghem a peut-être besoin de policiers, mais ses habitants ont surtout, selon lui, besoin despoir. Il faut, explique Thierry Pasture, permettre à tous les jeunes de sépanouir dans le sport, la musique, le théâtre, ou nimporte quelle autre passion qui est la leur. "Parce que quand on pratique le football, on apprend que la carte jaune tombe immédiatement", explique-t-il.
Cureghem en manque despoir
Grégoire Comhaire
Mis en ligne le 03/02/2010
Ce quartier dAnderlecht est souvent qualifié de zone de non-droit. Pourtant, nombreux sont ceux qui croient en son potentiel.
Reportage
Un agent de change du centre-ville de Bruxelles est braqué à la Kalachnikov samedi, et voilà les problèmes de délinquance urbaine qui reviennent au galop dans les médias.
"Far West", "zones de non-droit", la presse et les politiques flamands sen donnaient à cur joie lundi matin pour qualifier le chaos qui, vu de Flandre, semblait régner à Bruxelles. Une ville où, à en croire certains, il serait même devenu "impossible de se promener sans se retrouver le couteau sous la gorge".
Parmi ces fameuses "zones de non-droit" régulièrement évoquées comme telles dans les médias, on trouve le quartier de Cureghem, dans la commune dAnderlecht. Une zone coincée entre la gare du Midi, les abattoirs et le canal, et qui récemment encore sest invitée sous les feux de lactualité après dimportants problèmes de racket survenus à lInstitut supérieur industriel de la rue des Goujons. Lendroit rêvé pour lensemble des médias du pays qui, en vingt-quatre heures, y ont chacun dépêché leur "envoyé spécial" pour aller voir de plus près si, effectivement, la loi de la jungle avait définitivement pris ses marques dans certaines rues de la capitale.
"Anderlecht, cest un peu le bon client quand il sagit de parler dinsécurité", explique le bourgmestre Gaetan Van Goidsenhoven. "Le périmètre de Cureghem pose en effet quelques problèmes depuis de nombreuses années et il subsiste ailleurs dans la commune quelques poches, notamment aux abords de certaines stations de métro, où la délinquance est problématique."
"Et cette délinquance sexprime sous des formes très diverses, poursuit le bourgmestre, avec une tendance manifeste à la confrontation avec tout ce qui, de près ou de loin, représente lautorité publique". "Cela va jusquà lélagueur qui a récemment été pris à partie par quelques jeunes alors quil vient pourtant travailler à lembellissement de leur quartier."
Au dire des riverains, la place du Conseil et la place Leemens seraient aujourdhui devenues le repère dune pègre, pas toujours très âgée, qui sy livre en toute impunité à des trafics en tous genres. "La nuit, ils font régulièrement sauter la cabine à haute tension pour ne pas être gênés par léclairage public", nous confie un commerçant. "Et ce nest sûrement pas la police qui vient les déranger. Ils ont bien trop peur de provoquer une émeute."
Trafic de drogue, agressions, incivilités De nombreux habitants du quartier expriment leur ras-le-bol face à une justice quils estiment "laxiste" et à un sentiment dimpunité profondément installé dans les mentalités. "Maintenant, tout le monde va parler de tolérance zéro pendant quelques jours, et puis ça va sarrêter là. Ça fait dix ans quon nous fait les mêmes promesses chaque fois quun incident fait la Une des journaux."
Situé à quelques minutes à peine de la Grand-Place et du centre-ville, Cureghem a pourtant tout, en apparence, du quartier de banlieue délaissé des circuits économique et des politiques de cohésion sociale. Un quartier déserté par lindustrie, miné par les problèmes sociaux, et "doù on séchappe dès que lon bénéficie un peu de lascension sociale pour laisser la place à dautres, plus marginalisés que soi".
Dans les locaux de lASBL Fefa, sur le boulevard de la Révision, Thierry Pasture côtoie toute lannée des jeunes dont lunivers quotidien se limite aux frontières de Cureghem. En leur offrant la possibilité dintégrer une équipe de football et de disputer des matches en jouant sous le maillot du football club dAnderlecht, lASBL permet, depuis 2004, à quelque 140 jeunes du quartier de se perfectionner dans leur passion, tout en luttant contre le décrochage scolaire.
Pour lui, si les problèmes du quartier sont réels, il convient surtout de ne pas sombrer dans la paranoïa et, surtout, de ne pas remettre en cause les bienfaits apportés par les politiques de prévention. "Je crois que lessentiel des problèmes de grande délinquance que connaît le quartier est le fait dune quarantaine de personnes parmi les milliers de jeunes qui y résident", explique-t-il.
Cureghem a peut-être besoin de policiers, mais ses habitants ont surtout, selon lui, besoin despoir. Il faut, explique Thierry Pasture, permettre à tous les jeunes de sépanouir dans le sport, la musique, le théâtre, ou nimporte quelle autre passion qui est la leur. "Parce que quand on pratique le football, on apprend que la carte jaune tombe immédiatement", explique-t-il.