Deux anciens généraux turcs risquent la prison à vie dans l'affaire Ergenekon

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Cinquante-six personnes, dont deux généraux quatre étoiles à la retraite, comparaîtront à leur tour, à partir de juillet, dans le procès de la nébuleuse Ergenekon, du nom de l'organisation secrète ultranationaliste soupçonnée d'avoir comploté contre le gouvernement. Le deuxième acte d'accusation, rendu public par le procureur spécial, mercredi 25 mars, précise que les douze principaux accusés de cette organisation illégale risquent la prison à vie.

Cette nouvelle liste de militaires, journalistes, universitaires ou hommes politiques vient s'ajouter à une première série de suspects jugés depuis octobre 2008 : 86 accusés sont sur le banc du tribunal de Silivri, dans la banlieue d'Istanbul, pour appartenance à un réseau illégal planifiant des attentats, des assassinats et des coups d'Etat.

Cette fois, les généraux Sener Eruygur, l'ancien chef de la gendarmerie, et Hursit Tolon, qui risquent la perpétuité, sont clairement désignés comme les cerveaux de quatre tentatives de putschs entre 2003 et 2007. Les deux premiers coups d'Etat manqués, révélés par la publication des carnets d'un général et baptisés "Fille blonde" et "Clair de lune", projetaient de renverser le gouvernement islamo-conservateur de Recep Tayyip Erdogan.

Le parquet met aussi en évidence le rôle du général Eruygur, président de l'Association pour la pensée d'Atatürk (le père de la Turquie moderne), dans l'organisation des manifestations "laïques" géantes organisées en 2007 pour empêcher l'élection d'Abdullah Gül à la présidence de la République.

Depuis la découverte, l'été 2007, d'une cache d'armes à Istanbul, et le démantèlement d'un premier groupe, les vagues d'arrestations et les révélations se sont succédé à un rythme effréné. Début mars, la presse publiait des extraits de l'agenda d'un rédacteur en chef du quotidien Cumhuriyet, lui aussi sur la dernière liste d'accusés. Ces notes confirmeraient les projets de coups d'Etat en 2004 et les profondes divisions à l'époque au sein de l'institution militaire.

UNE CELLULE SECRÈTE

L'enquête Ergenekon est décriée pour ses lourdeurs, ses imprécisions et pour sa partialité, selon des opposants. Mais elle aborde des pages sombres de l'histoire récente de la Turquie : parmi les militaires qui seront jugés, figurent, par exemple, plusieurs anciens responsables du Jitem, une cellule secrète de la gendarmerie chargée de la lutte antiterroriste dans le Sud-Est de la Turquie et soupçonnée des meurtres de plusieurs milliers de Kurdes depuis 1988.

L'ex-général Veli Küçük, fondateur du Jitem, avait menacé de mort le journaliste turco arménien Hrant Dink (assassiné à Istanbul en 2007).

Les commentateurs estiment que ce coup de balai marque un affaiblissement de l'armée, contrainte de se soumettre à la procédure judiciaire. Ses divisions s'étalent désormais au grand jour. Deux anciens chefs d'état-major ont déclaré qu'ils accepteraient de témoigner au procès Ergenekon si on le leur demandait.

Guillaume Perrier

http://www.lemonde.fr/international...re-ergenekon_1172695_3210.html#ens_id=1172702
 
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