Amine
En mode pause
Ce nest pas la version de-luxe-fêtes-de-fin-dannée. Robert Faurisson nest pas sur scène, Jean-Marie Le Pen nest pas dans la salle. Ce nest pas le Zénith. Mais en ce jour de représentation ordinaire de « Jai fait l*** », les spectateurs qui se serrent dans la salle du Théâtre de la Main dOr, à quelques encablures de la Bastille, réservent un accueil chaleureux à leur héros. Il y a là quelques filles à keffieh, des rangers et crânes rasés, des blacks et des beurs, deux ou trois cheveux blancs. Il nest pas apparu que déjà le public acclame son nom : « Dieudonné, Dieudonné ! » Tout à lheure, ils se presseront pour une photo avec lui. Il entre, ils crient leur ferveur.
Pour ceux qui ont raté les épisodes précédents, lancien candidat anti-FN à Dreux refait lhistoire. Il raconte comment le leader frontiste est devenu le parrain dune de ses enfants : « Javais besoin dun coup de pouce médiatique, jai appelé Jean-Marie. » Le retentissement du baptême la obligé, dit-il, à mettre la barre plus haut pour que lon parle de son nouveau spectacle. Et à inviter Robert Faurisson. Le vieil homme a construit sa notoriété sur la négation de la Shoah. Pour Dieudonné, il est lincarnation de la liberté dexpression bâillonnée : « Le mec, il conteste tout, cest son truc.Même le fait que les esclaves noirs partaient de lîle de Gorée, jétais choqué. » La salle rit. Suit une allusion à Julien Dray et à Ilan Halimi, « transformé en panini fromage » par le « gang des barbares » de Youssouf Fofana, et Dieudonné se campe en exterminateur froid de Pygmées. La description de la mère allaitant un enfant mort avant dêtre massacrée installe un léger malaise.
Vite estompé : voilà lapothéose du show, lentrée, sous lovation de la salle, de Jacky. Déguisé en déporté juif, cest lui qui a remis le « prix de linfréquentabilité » à Faurisson devant un Zénith hilare le 26 décembre dernier. Ce soir, il nest pas en pyjama « les flics lont saisi comme preuve à conviction » , mais en chemise de nuit. Une énorme étoile jaune a été cousue sur sa poitrine. La salle jubile. Jacky joue le candide : il ne comprend pas pourquoi il doit se déguiser en juif. « Cest pour que les gens noublient pas », hurle Dieudonné, raillant le devoir de mémoire et autres lois mémorielles. Jacky quitte la scène en bêlant « Noubliez pas ». Applaudissements, rires. Personne ne quitte la salle. Les sketchs sombres, cruels, se succèdent. Enrico Macias, indésirable en Algérie (un homme se lève : « Ouais, Dieudo ! »). Colin Powell, singe dun impérialisme qui a « inventé le 11-Septembre » (applaudissements) et fabrique du terrorisme pour justifier la main basse sur le pétrole. Un dictateur africain, employé absurde et sanguinaire de ses anciens colons. Un show télé sur les serial killers. Arrive la fin du spectacle. On ne rira pas, lheure est au premier degré, à la gravité et à lhommage à Claude Nougaro. Dieudonné scande à la toulousaine lhistoire dun kamikaze palestinien qui se fait sauter en Israël : « Palestine,puisquon ne peut vivre tous les deux, crevons ensemble. » ....Les spectateurs sont debout
Source: Nouvel Observateur
Pour ceux qui ont raté les épisodes précédents, lancien candidat anti-FN à Dreux refait lhistoire. Il raconte comment le leader frontiste est devenu le parrain dune de ses enfants : « Javais besoin dun coup de pouce médiatique, jai appelé Jean-Marie. » Le retentissement du baptême la obligé, dit-il, à mettre la barre plus haut pour que lon parle de son nouveau spectacle. Et à inviter Robert Faurisson. Le vieil homme a construit sa notoriété sur la négation de la Shoah. Pour Dieudonné, il est lincarnation de la liberté dexpression bâillonnée : « Le mec, il conteste tout, cest son truc.Même le fait que les esclaves noirs partaient de lîle de Gorée, jétais choqué. » La salle rit. Suit une allusion à Julien Dray et à Ilan Halimi, « transformé en panini fromage » par le « gang des barbares » de Youssouf Fofana, et Dieudonné se campe en exterminateur froid de Pygmées. La description de la mère allaitant un enfant mort avant dêtre massacrée installe un léger malaise.
Vite estompé : voilà lapothéose du show, lentrée, sous lovation de la salle, de Jacky. Déguisé en déporté juif, cest lui qui a remis le « prix de linfréquentabilité » à Faurisson devant un Zénith hilare le 26 décembre dernier. Ce soir, il nest pas en pyjama « les flics lont saisi comme preuve à conviction » , mais en chemise de nuit. Une énorme étoile jaune a été cousue sur sa poitrine. La salle jubile. Jacky joue le candide : il ne comprend pas pourquoi il doit se déguiser en juif. « Cest pour que les gens noublient pas », hurle Dieudonné, raillant le devoir de mémoire et autres lois mémorielles. Jacky quitte la scène en bêlant « Noubliez pas ». Applaudissements, rires. Personne ne quitte la salle. Les sketchs sombres, cruels, se succèdent. Enrico Macias, indésirable en Algérie (un homme se lève : « Ouais, Dieudo ! »). Colin Powell, singe dun impérialisme qui a « inventé le 11-Septembre » (applaudissements) et fabrique du terrorisme pour justifier la main basse sur le pétrole. Un dictateur africain, employé absurde et sanguinaire de ses anciens colons. Un show télé sur les serial killers. Arrive la fin du spectacle. On ne rira pas, lheure est au premier degré, à la gravité et à lhommage à Claude Nougaro. Dieudonné scande à la toulousaine lhistoire dun kamikaze palestinien qui se fait sauter en Israël : « Palestine,puisquon ne peut vivre tous les deux, crevons ensemble. » ....Les spectateurs sont debout
Source: Nouvel Observateur