En Syrie, la RTBF a pu rencontrer deux combattants belges de l’organisation terroriste Etat islamique aujourd’hui détenus par les forces Kurdes dans des conditions sanitaires épouvantables.
Depuis la chute du " Califat " autoproclamé, le nombre de prisonniers détenus dans la région a explosé.
Il faut traverser plusieurs portes cadenassées. Et puis, une vision d’horreur : des centaines de corps décharnés habillés de combinaisons orange. Les mêmes uniformes que l’organisation Etat islamique (EI) faisait porter à ses victimes avant de les exécuter. L’odeur est épouvantable. Parmi cette masse de prisonniers, deux djihadistes belges acceptent de nous parler à condition que l’interview se déroule dans une autre pièce, afin que les autres détenus ne puissent pas nous entendre.
Abdellah Nouamane a 24 ans, Adel Mezroui, 23. Recrutés par Sharia4Belgium, ils avaient quitté Anvers en 2013 et 2014 pour faire le djihad. Aujourd’hui, blessés au combat, ils vivent entassés dans cette prison avec 5000 autres individus suspectés d’être des membres de l’EI. La plupart ont été capturés ou se sont rendus en mars dernier lors de la bataille finale contre l’organisation terroriste dans la région de Baghouz, dans l’Est syrien.
" J’ai compris il y a environ trois ans que nous allions perdre la guerre. Tout commençait à s’effondrer, les gens fuyaient, les chefs disparaissaient. L’Etat islamique a commencé à tuer ses propres combattants. Ils ont assassiné un belge parce qu’il n’était pas d’accord avec eux. Ils se sont disputés, et ils l’ont tué, tout simplement", raconte Abdellah Nouamane. Son ton est moins assuré que lorsqu’il avait menacé la Belgique en 2015 dans un message de propagande. " Tout en Belgique part en fumée… Bibliothèques, écoles, hôpitaux… Nous ne tenons plus compte des victimes innocentes", avait-il alors scandé. Déclaré mort à plusieurs reprises, il était réapparu en vie en mars dernier.
Comme la plupart des prisonniers, ils prétendent ne " pas avoir de sang " sur les mains et tentent de faire passer leur ligne de défense à travers la presse. Pourtant, les combattants, comme eux, capturés lors de l’ultime bataille contre le " Califat " autoproclamé sont considérés comme des jusqu’au-boutistes extrêmement dangereux. " Est-ce que j’étais impliqué dans le meurtre de personnes à Paris, Bruxelles ou Zaventem ? Non. J’étais un membre de l’Etat islamique, je vivais dans l’Etat islamique, mais j’étais contre les attaques en Europe, " prétend Adel Mezroui.
" Selon moi, ce n’était pas stratégique de partir attaquer l’Occident sans d’abord terminer notre travail en Syrie, " poursuit-il. " La Syrie était trop grande pour tout terminer en seulement quelques années. On aurait dû nous concentrer là, puis nous intéresser aux pays voisins, et non pas attaquer l’Europe ".
Aujourd’hui, Adel Mezroui plaide en faveur d’un rapatriement en Belgique. Coupé du monde, il ignore que la justice belge a décidé il y a dix jours que le gouvernement se devait de permettre le retour de ses enfants. Mais pas lui. Le juge des référés a estimé qu’il était parti de son propre chef, et ne méritait donc pas une assistance consulaire.
Mais les autorités Kurdes disent ne pas avoir les moyens de s’occuper de tous ces prisonniers. Ils en détiendraient plus de 20.000, dont 2000 étrangers. " Pour le moment, personne ne nous aide. Nous devons gérer la situation seuls. Si la Belgique veut ses prisonniers, elle doit se coordonner avec notre administration, " explique Robar (un nom de guerre), le directeur de la prison d’Hassakeh. " Il en va de la responsabilité de chaque pays de s’occuper de ses propres combattants, " insiste-t-il.
Qu’adviendra-t-il de ces milliers de prisonniers dont personne ne veut ? La plupart des gouvernements européens refusent catégoriquement de rapatrier leurs ressortissants et les autorités kurdes ne souhaitent pas non plus les garder. Or la situation est loin d’être stable. A cause du conflit avec la Turquie, les forces kurdes disent avoir dû redéployer des soldats qui gardaient cette prison vers la ligne de front. Ce qui fait craindre un risque d’évasion, surtout que des cellules dormantes du groupe Etat islamique continuent de mener des attaques dans la région. Le dossier des combattants étrangers était un casse-tête, il est devenu un véritable cauchemar. Et personne ne semble avoir de solution.
https://www.rtbf.be/info/monde/deta...tants-belges-de-daesh-s-expriment?id=10394862
Depuis la chute du " Califat " autoproclamé, le nombre de prisonniers détenus dans la région a explosé.
Il faut traverser plusieurs portes cadenassées. Et puis, une vision d’horreur : des centaines de corps décharnés habillés de combinaisons orange. Les mêmes uniformes que l’organisation Etat islamique (EI) faisait porter à ses victimes avant de les exécuter. L’odeur est épouvantable. Parmi cette masse de prisonniers, deux djihadistes belges acceptent de nous parler à condition que l’interview se déroule dans une autre pièce, afin que les autres détenus ne puissent pas nous entendre.
Abdellah Nouamane a 24 ans, Adel Mezroui, 23. Recrutés par Sharia4Belgium, ils avaient quitté Anvers en 2013 et 2014 pour faire le djihad. Aujourd’hui, blessés au combat, ils vivent entassés dans cette prison avec 5000 autres individus suspectés d’être des membres de l’EI. La plupart ont été capturés ou se sont rendus en mars dernier lors de la bataille finale contre l’organisation terroriste dans la région de Baghouz, dans l’Est syrien.
" J’ai compris il y a environ trois ans que nous allions perdre la guerre. Tout commençait à s’effondrer, les gens fuyaient, les chefs disparaissaient. L’Etat islamique a commencé à tuer ses propres combattants. Ils ont assassiné un belge parce qu’il n’était pas d’accord avec eux. Ils se sont disputés, et ils l’ont tué, tout simplement", raconte Abdellah Nouamane. Son ton est moins assuré que lorsqu’il avait menacé la Belgique en 2015 dans un message de propagande. " Tout en Belgique part en fumée… Bibliothèques, écoles, hôpitaux… Nous ne tenons plus compte des victimes innocentes", avait-il alors scandé. Déclaré mort à plusieurs reprises, il était réapparu en vie en mars dernier.
Comme la plupart des prisonniers, ils prétendent ne " pas avoir de sang " sur les mains et tentent de faire passer leur ligne de défense à travers la presse. Pourtant, les combattants, comme eux, capturés lors de l’ultime bataille contre le " Califat " autoproclamé sont considérés comme des jusqu’au-boutistes extrêmement dangereux. " Est-ce que j’étais impliqué dans le meurtre de personnes à Paris, Bruxelles ou Zaventem ? Non. J’étais un membre de l’Etat islamique, je vivais dans l’Etat islamique, mais j’étais contre les attaques en Europe, " prétend Adel Mezroui.
" Selon moi, ce n’était pas stratégique de partir attaquer l’Occident sans d’abord terminer notre travail en Syrie, " poursuit-il. " La Syrie était trop grande pour tout terminer en seulement quelques années. On aurait dû nous concentrer là, puis nous intéresser aux pays voisins, et non pas attaquer l’Europe ".
Aujourd’hui, Adel Mezroui plaide en faveur d’un rapatriement en Belgique. Coupé du monde, il ignore que la justice belge a décidé il y a dix jours que le gouvernement se devait de permettre le retour de ses enfants. Mais pas lui. Le juge des référés a estimé qu’il était parti de son propre chef, et ne méritait donc pas une assistance consulaire.
Mais les autorités Kurdes disent ne pas avoir les moyens de s’occuper de tous ces prisonniers. Ils en détiendraient plus de 20.000, dont 2000 étrangers. " Pour le moment, personne ne nous aide. Nous devons gérer la situation seuls. Si la Belgique veut ses prisonniers, elle doit se coordonner avec notre administration, " explique Robar (un nom de guerre), le directeur de la prison d’Hassakeh. " Il en va de la responsabilité de chaque pays de s’occuper de ses propres combattants, " insiste-t-il.
Qu’adviendra-t-il de ces milliers de prisonniers dont personne ne veut ? La plupart des gouvernements européens refusent catégoriquement de rapatrier leurs ressortissants et les autorités kurdes ne souhaitent pas non plus les garder. Or la situation est loin d’être stable. A cause du conflit avec la Turquie, les forces kurdes disent avoir dû redéployer des soldats qui gardaient cette prison vers la ligne de front. Ce qui fait craindre un risque d’évasion, surtout que des cellules dormantes du groupe Etat islamique continuent de mener des attaques dans la région. Le dossier des combattants étrangers était un casse-tête, il est devenu un véritable cauchemar. Et personne ne semble avoir de solution.
https://www.rtbf.be/info/monde/deta...tants-belges-de-daesh-s-expriment?id=10394862