Dans un entretien avec l’ambassadeur britannique Richard Parsons, Juan Carlos déclarait en 1983 que «si l’Espagne récupère Gibraltar, le roi Hassan II réactiverait ses revendications sur Sebta et Mélillia».
Cette déclaration figure dans un télégramme envoyé à l’été 1983 par le diplomate britannique en poste à Madrid au Foreign Office après une rencontre tenue avec le roi d’Espagne. Le télégramme vient d’être déclassifié par les Archives nationales britanniques.
Londres occupe le Rocher de Gibraltar en territoire espagnol depuis 1704, tandis que l’Espagne occupe Sebta en territoire marocain depuis le XVème siècle. Les deux enclaves, véritables sentinelles du détroit de Gibraltar par lequel transitent plus de 100.000 navires par an, ont une économie basée sur les services et la contrebande. Moins de 40.000 personnes vivent à Gibraltar et environ 110.000 vivent à Sebta.
Finalement Hassan II avait raison
Le Roi du Maroc liait constamment les deux questions. Il répétait constamment que l'Espagne ne pouvait détenir les deux clés du Détroit, Sebta d'un côté et Gibraltar de l'autre et que si elle récupératit Gibraltar, le Maroc dvait récupérer Sebta.
Au cours de cet été 1983, une première fois le 21 juillet lors d’un entretien en tête-à-tête avec le diplomate britannique, puis une seconde fois en le 6 septembre à Londres en présence des ministres des affaires étrangères espagnol et britannique Fernando Moran et Geoffrey Howe respectivement, et de l’ambassadeur britannique à Madrid Richard Parsons, le roi d’Espagne exprimera sa crainte de voir les revendications espagnoles sur Gibraltar conduire le Maroc à réclamer Sebta et Mélillia.
La particularité de la situation réside dans le fait qu’à l’époque, les socialistes espagnols arrivés au pouvoir à Madrid en 1982 et de plein accord avec la monarchie, étaient engagés dans les négociations d’adhésion à l’Union européenne après l’intégration de l’Espagne à l’OTAN, l’alliance militaire de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord. La demande d’adhésion de Madrid à l’UE avait été déposée à Bruxelles dès juillet 1977, moins de deux ans après le décès de Francisco Franco.
Avec la fin de la dictature franquiste, la restauration de la dynastie des Bourbons à Madrid, les progrès de la transition démocratique espagnole, l’arrivée des socialistes au pouvoir et l’adhésion à l’OTAN en 1982, l’adhésion à l’UE constituait l’objectif prioritaire de la diplomatie espagnole des années 1980. Il restait toutefois quelques conditions britanniques à remplir pour les atteindre, notamment la fin du blocus imposé par Franco au Rocher.
Il faut remonter aux années 1960 et très exactement à 1967 et 1969 pour comprendre la position de Londres sur Gibraltar et de Juan Carlos sur Gibraltar et sur Sebta.
D’un côté, il y a des relations hispano-britanniques tendues et une frontière de Gibraltar avec l’Espagne fermée sur ordre de Franco depuis 1969, sachant que deux ans auparavant, en 1967, les habitants de Gibraltar avaient voté par référendum contre l’intégration à l’Espagne.
Lorsque Franco décède en novembre 1975 et que l’Espagne commence sa transition démocratique avec l’adhésion à l’Europe en ligne de mire à partir de 1977, Londres fera savoir qu’ «il est impensable pour l’Espagne de rejoindre l’Union européenne et l’OTAN tant que la frontière est fermée, car vous ne pouvez pas avoir une partie de l’UE et de l’OTAN fermée et isolée, et l’opinion publique britannique ne l’aurait jamais toléré».
On peut raisonnablement supposer que dans ses rapports avec Madrid, Londres n’avait aucun intérêt économique à s’opposer à l’entrée de l’Espagne dans l’UE tant que les Espagnols ouvraient la frontière et laissaient services financiers et contrebande s’épanouir à Gibraltar. Londres ne venait-elle pas d’approuver l’entrée de l’Espagne dans l’OTAN quelques mois auparavant ?
On apprend aujourd’hui, qu’en 1984-85, Londres, à plusieurs reprises, a menacé d’opposer son véto à l’adhésion de Madrid à l’UE si la situation à la frontière de Gibraltar ne s’améliorait pas. «Nous avions un droit de véto, indique l’ambassadeur Parsons dans un entretien à la Gibraltar Chronicle, mais nous devions en faire usage de manière prudente, car nous avions besoin de la bonne volonté de l’Espagne». La demande d’adhésion de Madrid à l’UE sera formellement approuvée par Bruxelles, et donc par Londres, en juin 1985. Ce qui signifie qu’à ce moment-là, Madrid avait fait les concessions souhaitées par Londres au sujet de Gibraltar.
C’est ainsi qu’au cours des années 1980 et jusqu’à l’adhésion de Madrid à l’UE le 1er janvier 1986, Madrid multipliera les paroles conciliantes et les gestes d’apaisement à l’endroit de Londres. Avant les déclarations de juillet et de septembre 1983, il y eut la réouverture partielle des frontières entre Gibraltar et l’Espagne en 1982 mais aussi des déclarations de Juan Carlos expliquant qu’ “il n’est pas dans l’intérêt de l’Espagne de récupérer Gibraltar à court terme“.
L’ouverture des archives nationales britanniques cette semaine permet d’apprendre que l’ambassadeur britannique à Madrid Richard Parsons a notamment communiqué à Londres que le roi d’Espagne l’avait contacté au début de l’été 1983 pour «déplorer la situation à Gibraltar et le manque de contact entre ministres espagnols et britanniques».
Dans son télégramme envoyé au Foreign Office, l’ambassadeur note que «le Roi a insisté, comme il l’a déjà fait avec moi auparavant, qu’il devenait nécessaire de bouger sur le dossier de Gibraltar pour rassurer l’opinion publique sur ce sujet».
Cette déclaration figure dans un télégramme envoyé à l’été 1983 par le diplomate britannique en poste à Madrid au Foreign Office après une rencontre tenue avec le roi d’Espagne. Le télégramme vient d’être déclassifié par les Archives nationales britanniques.
Londres occupe le Rocher de Gibraltar en territoire espagnol depuis 1704, tandis que l’Espagne occupe Sebta en territoire marocain depuis le XVème siècle. Les deux enclaves, véritables sentinelles du détroit de Gibraltar par lequel transitent plus de 100.000 navires par an, ont une économie basée sur les services et la contrebande. Moins de 40.000 personnes vivent à Gibraltar et environ 110.000 vivent à Sebta.
Finalement Hassan II avait raison
Le Roi du Maroc liait constamment les deux questions. Il répétait constamment que l'Espagne ne pouvait détenir les deux clés du Détroit, Sebta d'un côté et Gibraltar de l'autre et que si elle récupératit Gibraltar, le Maroc dvait récupérer Sebta.
Au cours de cet été 1983, une première fois le 21 juillet lors d’un entretien en tête-à-tête avec le diplomate britannique, puis une seconde fois en le 6 septembre à Londres en présence des ministres des affaires étrangères espagnol et britannique Fernando Moran et Geoffrey Howe respectivement, et de l’ambassadeur britannique à Madrid Richard Parsons, le roi d’Espagne exprimera sa crainte de voir les revendications espagnoles sur Gibraltar conduire le Maroc à réclamer Sebta et Mélillia.
La particularité de la situation réside dans le fait qu’à l’époque, les socialistes espagnols arrivés au pouvoir à Madrid en 1982 et de plein accord avec la monarchie, étaient engagés dans les négociations d’adhésion à l’Union européenne après l’intégration de l’Espagne à l’OTAN, l’alliance militaire de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord. La demande d’adhésion de Madrid à l’UE avait été déposée à Bruxelles dès juillet 1977, moins de deux ans après le décès de Francisco Franco.
Avec la fin de la dictature franquiste, la restauration de la dynastie des Bourbons à Madrid, les progrès de la transition démocratique espagnole, l’arrivée des socialistes au pouvoir et l’adhésion à l’OTAN en 1982, l’adhésion à l’UE constituait l’objectif prioritaire de la diplomatie espagnole des années 1980. Il restait toutefois quelques conditions britanniques à remplir pour les atteindre, notamment la fin du blocus imposé par Franco au Rocher.
Il faut remonter aux années 1960 et très exactement à 1967 et 1969 pour comprendre la position de Londres sur Gibraltar et de Juan Carlos sur Gibraltar et sur Sebta.
D’un côté, il y a des relations hispano-britanniques tendues et une frontière de Gibraltar avec l’Espagne fermée sur ordre de Franco depuis 1969, sachant que deux ans auparavant, en 1967, les habitants de Gibraltar avaient voté par référendum contre l’intégration à l’Espagne.
Lorsque Franco décède en novembre 1975 et que l’Espagne commence sa transition démocratique avec l’adhésion à l’Europe en ligne de mire à partir de 1977, Londres fera savoir qu’ «il est impensable pour l’Espagne de rejoindre l’Union européenne et l’OTAN tant que la frontière est fermée, car vous ne pouvez pas avoir une partie de l’UE et de l’OTAN fermée et isolée, et l’opinion publique britannique ne l’aurait jamais toléré».
On peut raisonnablement supposer que dans ses rapports avec Madrid, Londres n’avait aucun intérêt économique à s’opposer à l’entrée de l’Espagne dans l’UE tant que les Espagnols ouvraient la frontière et laissaient services financiers et contrebande s’épanouir à Gibraltar. Londres ne venait-elle pas d’approuver l’entrée de l’Espagne dans l’OTAN quelques mois auparavant ?
On apprend aujourd’hui, qu’en 1984-85, Londres, à plusieurs reprises, a menacé d’opposer son véto à l’adhésion de Madrid à l’UE si la situation à la frontière de Gibraltar ne s’améliorait pas. «Nous avions un droit de véto, indique l’ambassadeur Parsons dans un entretien à la Gibraltar Chronicle, mais nous devions en faire usage de manière prudente, car nous avions besoin de la bonne volonté de l’Espagne». La demande d’adhésion de Madrid à l’UE sera formellement approuvée par Bruxelles, et donc par Londres, en juin 1985. Ce qui signifie qu’à ce moment-là, Madrid avait fait les concessions souhaitées par Londres au sujet de Gibraltar.
C’est ainsi qu’au cours des années 1980 et jusqu’à l’adhésion de Madrid à l’UE le 1er janvier 1986, Madrid multipliera les paroles conciliantes et les gestes d’apaisement à l’endroit de Londres. Avant les déclarations de juillet et de septembre 1983, il y eut la réouverture partielle des frontières entre Gibraltar et l’Espagne en 1982 mais aussi des déclarations de Juan Carlos expliquant qu’ “il n’est pas dans l’intérêt de l’Espagne de récupérer Gibraltar à court terme“.
L’ouverture des archives nationales britanniques cette semaine permet d’apprendre que l’ambassadeur britannique à Madrid Richard Parsons a notamment communiqué à Londres que le roi d’Espagne l’avait contacté au début de l’été 1983 pour «déplorer la situation à Gibraltar et le manque de contact entre ministres espagnols et britanniques».
Dans son télégramme envoyé au Foreign Office, l’ambassadeur note que «le Roi a insisté, comme il l’a déjà fait avec moi auparavant, qu’il devenait nécessaire de bouger sur le dossier de Gibraltar pour rassurer l’opinion publique sur ce sujet».