L'expatriation est un concept clé du XXIe siècle, couramment utilisé dans la vie de tous les jours pour désigner ces étudiants et cadres qualifiés s'établissant à l'étranger pour des raisons académiques et/ou professionnelles. C'est sûr, dit comme cela, ça fait rêver. Mais ne nous méprenons pas. Quitter son pays pour un autre bout de terre où la langue, la culture, les croyances, les traditions, la façon de penser et de se comporter en société, la situation économique, le régime politique et l'opinion publique diffèrent n'est pas aussi facile que ce que certains pourraient, à tort, le prétendre.
Selon la théorie "U-curve adjustement", pensée par Black et Mendenhall en 1990, la grande majorité des expatriés passeraient par quatre phases distinctes pendant leur séjour à l'étranger: l'étape de "lune de miel" (1), de crise (2), d'adaptation (3) et de maturité (4). Une fois ce processus parfois long et complexe terminé, chaque individu, de manière consciente ou non, tend à comparer de multiples aspects, enjeux et faits de société de son pays d'origine avec ceux de sa terre dite d'accueil.
après avoir vécu plus de quatre ans hors de l'Hexagone, je me pose des questions: voyager et m'ouvrir à de nouvelles cultures me permet-il de relativiser et prendre du recul sur les problèmes sociétaux que nous affrontons quotidiennement en France? En tant qu'Européen, est-ce possible d'avoir le même regard sur le monde que des personnes provenant de l'autre hémisphère? L'expatriation m'a-t-elle vraiment éloigné de mon pays d'origine ou m'en a-t-elle rapproché?
Novembre 2016, à l'occasion de la COP22, en tant que chargé des relations publiques internationales des membres du Comité de pilotage de la Conférence des parties, je foule pour la première fois le sol marocain. Durant une quinzaine de jours, des représentants de divers gouvernements, institutions, organisations et entreprises multinationales se rencontrent à Marrakech pour déterminer des actions concrètes à mettre en œuvre pour freiner le réchauffement climatique planétaire. Immergé dans une cohabitation pluriethnique temporaire gigantesque, je prends conscience à ce moment précis que l'ethnocentrisme dont nous faisons tous preuve est un frein bien réel aux relations pluriculturelles.
Je me demande alors: est-ce que tisser continuellement des liens avec des personnes provenant d'autres pays m'aiderait à gommer cette manière maladroite mais naturelle de dénigrer ce qui me semble incompréhensible et parfois même exaspérant? Ma perception de la situation est-elle plutôt influencée par ma culture d'origine, mon éducation ou par mes expériences personnelles du passé? Un peu des trois? Peut-être. Pas sûr. En tout cas, s'il y a une chose dont je suis à peu près certain, c'est que m'ouvrir au monde m'a permis d'être plus tolérant, flexible, patient et d'avoir une ouverture d'esprit plus large.
Lors de mon séjour au royaume chérifien, assis autour d'une table avec des collègues marocains, je me livre et perçois assez vite que nos préoccupations et visions générales sur nos deux sociétés divergent. De leur côté, malgré les difficultés socio-économiques, entre autres, que subit leur pays, ils conservent un certain optimisme et ne semblent pas inquiets du sort de leur continent. Ils m'expliquent que l'Afrique sera la terre de l'avenir et qu'elle est déjà celle du présent, que cette région du monde qui a connu durant des années une évolution assez lente se développe aujourd'hui à un rythme effréné et que pour devenir l'un des moteurs de notre planète, elle devra d'abord parachever sa décolonisation, réactualiser les valeurs qui sont les siennes et proposer un projet de civilisation ancré dans "ses potentialités heureuses".
En ce qui me concerne, le portrait que je dresse de la France est beaucoup plus pessimiste et anxiogène, un point de vue que mes interlocuteurs ne partagent pas. Pour eux, l'Hexagone représente avant tout un pays du Nord où les droits de l'Homme sont défendus, où "Liberté, Égalité, Fraternité" représente bien plus qu'une devise, où le système de santé et la politique sociale nationale se montrent solidaires et généreux envers ses concitoyens et où les inégalités socio-économiques ne sont pas aussi clivantes qu'au sud de la Méditerranée. Pour moi, la France est un pays où il fait bon vivre et dans lequel, paradoxalement, à tort ou à raison, la lamentation et l'autocritique perpétuelles sont reines.
Selon la théorie "U-curve adjustement", pensée par Black et Mendenhall en 1990, la grande majorité des expatriés passeraient par quatre phases distinctes pendant leur séjour à l'étranger: l'étape de "lune de miel" (1), de crise (2), d'adaptation (3) et de maturité (4). Une fois ce processus parfois long et complexe terminé, chaque individu, de manière consciente ou non, tend à comparer de multiples aspects, enjeux et faits de société de son pays d'origine avec ceux de sa terre dite d'accueil.
après avoir vécu plus de quatre ans hors de l'Hexagone, je me pose des questions: voyager et m'ouvrir à de nouvelles cultures me permet-il de relativiser et prendre du recul sur les problèmes sociétaux que nous affrontons quotidiennement en France? En tant qu'Européen, est-ce possible d'avoir le même regard sur le monde que des personnes provenant de l'autre hémisphère? L'expatriation m'a-t-elle vraiment éloigné de mon pays d'origine ou m'en a-t-elle rapproché?
Novembre 2016, à l'occasion de la COP22, en tant que chargé des relations publiques internationales des membres du Comité de pilotage de la Conférence des parties, je foule pour la première fois le sol marocain. Durant une quinzaine de jours, des représentants de divers gouvernements, institutions, organisations et entreprises multinationales se rencontrent à Marrakech pour déterminer des actions concrètes à mettre en œuvre pour freiner le réchauffement climatique planétaire. Immergé dans une cohabitation pluriethnique temporaire gigantesque, je prends conscience à ce moment précis que l'ethnocentrisme dont nous faisons tous preuve est un frein bien réel aux relations pluriculturelles.
Je me demande alors: est-ce que tisser continuellement des liens avec des personnes provenant d'autres pays m'aiderait à gommer cette manière maladroite mais naturelle de dénigrer ce qui me semble incompréhensible et parfois même exaspérant? Ma perception de la situation est-elle plutôt influencée par ma culture d'origine, mon éducation ou par mes expériences personnelles du passé? Un peu des trois? Peut-être. Pas sûr. En tout cas, s'il y a une chose dont je suis à peu près certain, c'est que m'ouvrir au monde m'a permis d'être plus tolérant, flexible, patient et d'avoir une ouverture d'esprit plus large.
Lors de mon séjour au royaume chérifien, assis autour d'une table avec des collègues marocains, je me livre et perçois assez vite que nos préoccupations et visions générales sur nos deux sociétés divergent. De leur côté, malgré les difficultés socio-économiques, entre autres, que subit leur pays, ils conservent un certain optimisme et ne semblent pas inquiets du sort de leur continent. Ils m'expliquent que l'Afrique sera la terre de l'avenir et qu'elle est déjà celle du présent, que cette région du monde qui a connu durant des années une évolution assez lente se développe aujourd'hui à un rythme effréné et que pour devenir l'un des moteurs de notre planète, elle devra d'abord parachever sa décolonisation, réactualiser les valeurs qui sont les siennes et proposer un projet de civilisation ancré dans "ses potentialités heureuses".
En ce qui me concerne, le portrait que je dresse de la France est beaucoup plus pessimiste et anxiogène, un point de vue que mes interlocuteurs ne partagent pas. Pour eux, l'Hexagone représente avant tout un pays du Nord où les droits de l'Homme sont défendus, où "Liberté, Égalité, Fraternité" représente bien plus qu'une devise, où le système de santé et la politique sociale nationale se montrent solidaires et généreux envers ses concitoyens et où les inégalités socio-économiques ne sont pas aussi clivantes qu'au sud de la Méditerranée. Pour moi, la France est un pays où il fait bon vivre et dans lequel, paradoxalement, à tort ou à raison, la lamentation et l'autocritique perpétuelles sont reines.