Fin des frais d'itinérance : la commission européenne complexifie son modèle

Salam Arlaykoum,

La Commission européenne vient d'annoncer qu'à compter du 15 juin 2017, les Européens pourront naviguer sans frais supplémentaires partout en Europe sans limite de temps. Cela après avoir abandonné l'idée d'une limite de 90 jours. Pour contrer les abus, opérateurs et autorités devront trouver eux-mêmes les parades.
La veste de la Commission européenne n'en finit plus de tourner. Après quelques rebondissements, Ünther Oettinger, le commissaire européen chargé du numérique, a annoncé que la nouvelle proposition de l'institution ne contiendra pas de limite à l'itinérance dans les pays européens, à compter du 15 juin prochain. Cela alors que l'institution a d'abord proposé une limite de 90 jours par an pour le roaming dans d'autres États membres que celui de résidence, vite retirée devant le scepticisme de certains acteurs.
Une proposition claire abandonnée

En début de mois, la Commission proposait ainsi une limite de trois mois d'itinérance dans un autre pays européen, pour éviter les éventuels abus. Encore aujourd'hui, Günther Oettinger rappelle que « les voyages de plus de 90 jours représentent à peine 0,1 % des voyages des Européens ». Cette limite était accompagnée de règles précises, notamment pour accommoder les frontaliers, dont les journées de travail à l'étranger n'auraient pas été comptées s'ils se connectaient aussi sur le réseau national de leur opérateur le même jour.
Le but : empêcher notamment quelqu'un d'acheter une carte SIM dans un pays pour l'utiliser dans un autre où les forfaits mobiles sont bien plus chers. Surtout que les opérateurs paient toujours des frais de gros sur l'itinérance, qui ne doivent plus être transposés sur les factures des abonnés.
Las, cette proposition a été retirée en urgence deux jours plus tard. Explication : elle aurait été publiée sans que Jean-Claude Juncker, le président de la Commission, n'ait été mis au courant. Ce midi, Oettinger expliquait qu'en fait, c'est la contestation des associations de consommateurs, notamment BEUC, qui aurait mené à retirer cette version du texte. Un recul rapide, alors que la fin des frais d'itinérance est l'une des mesures les plus symboliques du marché unique numérique, qui doit lever les barrières entre États membres.
 
Un nouveau modèle aux contours plus flous

S'il n'y a plus de limite de jours d'itinérance, comment un opérateur pourrait-il se prémunir d'éventuels abus ? La question semble encore à trancher, tant Oettinger s'est empêtré dans des explications confuses lors de sa conférence de presse. Le communiqué, publié par la Commission, clarifie quelque peu les choses.
« Ce nouveau mécanisme sera fondé sur le principe de résidence ou de liens stables d'un consommateur avec un État membre (présence fréquente et substantielle dans le pays du fournisseur d'itinérance, par exemple) » écrit ainsi l'institution. Cela doit donc protéger les frontaliers, les employés qui voyagent longtemps à l'étranger ou encore les étudiants en Erasmus.
Pour déterminer un abus, trois critères sont retenus par l'institution : trafic national insignifiant par rapport à l'itinérance, inactivité prolongée d'une carte SIM dans son pays d'émission, voire utilisation uniquement en itinérance, et abonnement puis utilisation de plusieurs cartes SIM par le même client en itinérance. En cas de doute, un opérateur devra contacter le client pour qu'il justifie cet éventuel abus. Une complexité supplémentaire en pratique, que les régulateurs nationaux devront contrôler.
Des exceptions possibles à la fin des frais

En cas d'abus avéré, les opérateurs pourront donc appliquer des frais supplémentaires aux consommations du client, dans la limite des prix de gros maximaux proposés cet été par l'institution. Il s'agit de 0,04 euro par minute d'appel, 0,01 euro par SMS et 0,85 centime d'euro par Mo. Des frais qui, rappelons-le, seront toujours appliqués entre opérateurs.
Enfin, la Commission pourra permettre à des opérateurs de réactiver les frais d'itinérance « en cas d'augmentation des prix sur un marché spécifique ou d'autres effets négatifs pour leurs clients domestiques », et que le régulateur national (l'ARCEP en France) les y autorise. Car l'une des grandes questions qui restent à trancher est l'équilibre du trafic en itinérance entre pays, que ce soit pour de simples questions de migration intra-européenne ou d'attractivité des prix dans un autre État-membre. Des points à résoudre d'ici l'an prochain.

Source: Next Inpact
 
Retour
Haut