Si les succès ne manquent pas, la classe moyenne noire reste difficile à cerner, car elle est disséminée, sans représentants.
Depuis l'élection de Barack Obama, les associations noires françaises réclament de la visibilité et des postes prestigieux. Mais existe-t-il en France, l'équivalent de la classe moyenne noire qui a soutenu depuis des années, l'ascension de candidats et de cadres afro-américains ? Pas encore. Car l'histoire des Noirs de France en métropole, recoupe celle de l'immigration récente. Ils seraient «cinq millions» assurent certaines associations toutes prêtes à enrôler la moindre peau bronzée pour peser en politique. «Un chiffre farfelu», répond la démographe Michèle Tribalat. Les estimations les plus fiables reposent sur un sondage du CSA de 2007 et font état de 1,7 million de personnes de plus de 18 ans, antillais inclus. Au maximum, si l'on intègre les plus jeunes, ils représenteraient 4 % de la population française. Et une petite classe moyenne émergente. Car l'essentiel des Africains sont arrivés en France après 1976, rappellent Stephen Smith et Géraldine Faes dans leur ouvrage Noirs et Français ! (éditions du Panama). D'abord des travailleurs isolés, qui n'avaient pas besoin de visas. Suivis par leurs familles. Puis un flux croissant de ressortissants de pays en guerre. Dans les années 1990, la société française redécouvre ses nouveaux Noirs. Ils ne sont plus l'élite issue des colonies, ces poètes ministres comme Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor. Ils forment désormais une classe composite.
Des anciens étudiants africains
Avec d'un côté des étudiants africains qui ont choisi de rester, devant les déboires du continent noir. En France, ils ont perdu en prestige ce qu'ils ont gagné en stabilité. Souvent déclassés socialement, comme Amadou Soumaré, uvrant comme taxi après un master d'informatique, mais l'ambition intacte, ils ont élevé leurs enfants avec «la volonté, pas seulement le rêve, qu'ils réussissent» . L'aîné est centralien, son frère est également ingénieur et la cadette poursuit un doctorat de droit. «Lorsqu'ils étaient petits, nous vivions au Gros Saule, à Aulnay-sous-Bois. J'ai compris qu'en restant dans cet environnement difficile, nos enfants nous échapperaient.» La famille déménage en très grande banlieue à Mitry-Claye, «avec que des petits vieux autour». Une stratégie d'évitement qu'ont suivie beaucoup de ces universitaires africains, lorsque les vagues d'immigration suivante ont formé des bataillons de nouveaux prolétaires. Milos, haïtien, a quitté Évry pour Levallois, «parce que mes enfants se prenaient pour des Noirs du Bronx», résume-t-il. «Pour être acceptés par leurs copains, ils étaient nuls en classe, ils jouaient un rôle.» Aujourd'hui, sa fille est à HEC, son fils travaille dans le marketing d'un opérateur téléphonique, et lui sent que sa vie de professeur, interrompue lors de son arrivée en France, va enfin s'épanouir. «Ils sont taillés pour la société française», s'enorgueillit ce père, qui, lui, vit branché sur RFI, accroché aux nouvelles du pays. Tandis que ses enfants ont formé des couples avec des Français.
Olivier Bouchez, pharmacien, a lui grandi dans une cité à La Courneuve. À mesure que des familles africaines s'installaient, cet Antillais s'est senti sommé de choisir entre les Blancs et les Noirs. «Avec les années, j'ai compris que je serai noir de toute façon aux yeux des Blancs.» La recherche d'un logement dans le XVe arrondissement de Paris s'est avérée éprouvante, «je voyais la déception lorsque les agences découvraient mon visage». Il a fini par s'installer en banlieue. Comme lui, des copains noirs affichant de bons salaires ont essuyé les mêmes vexations. SOS-Racisme a récemment conduit plusieurs procès contre des agences qui codaient les clients pour éviter les Noirs, à la demande de certains propriétaires. Car, malgré Harry Roselmack, star de TF1, la nouvelle classe moyenne noire n'a pas encore émergé dans l'imaginaire.
Depuis l'élection de Barack Obama, les associations noires françaises réclament de la visibilité et des postes prestigieux. Mais existe-t-il en France, l'équivalent de la classe moyenne noire qui a soutenu depuis des années, l'ascension de candidats et de cadres afro-américains ? Pas encore. Car l'histoire des Noirs de France en métropole, recoupe celle de l'immigration récente. Ils seraient «cinq millions» assurent certaines associations toutes prêtes à enrôler la moindre peau bronzée pour peser en politique. «Un chiffre farfelu», répond la démographe Michèle Tribalat. Les estimations les plus fiables reposent sur un sondage du CSA de 2007 et font état de 1,7 million de personnes de plus de 18 ans, antillais inclus. Au maximum, si l'on intègre les plus jeunes, ils représenteraient 4 % de la population française. Et une petite classe moyenne émergente. Car l'essentiel des Africains sont arrivés en France après 1976, rappellent Stephen Smith et Géraldine Faes dans leur ouvrage Noirs et Français ! (éditions du Panama). D'abord des travailleurs isolés, qui n'avaient pas besoin de visas. Suivis par leurs familles. Puis un flux croissant de ressortissants de pays en guerre. Dans les années 1990, la société française redécouvre ses nouveaux Noirs. Ils ne sont plus l'élite issue des colonies, ces poètes ministres comme Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor. Ils forment désormais une classe composite.
Des anciens étudiants africains
Avec d'un côté des étudiants africains qui ont choisi de rester, devant les déboires du continent noir. En France, ils ont perdu en prestige ce qu'ils ont gagné en stabilité. Souvent déclassés socialement, comme Amadou Soumaré, uvrant comme taxi après un master d'informatique, mais l'ambition intacte, ils ont élevé leurs enfants avec «la volonté, pas seulement le rêve, qu'ils réussissent» . L'aîné est centralien, son frère est également ingénieur et la cadette poursuit un doctorat de droit. «Lorsqu'ils étaient petits, nous vivions au Gros Saule, à Aulnay-sous-Bois. J'ai compris qu'en restant dans cet environnement difficile, nos enfants nous échapperaient.» La famille déménage en très grande banlieue à Mitry-Claye, «avec que des petits vieux autour». Une stratégie d'évitement qu'ont suivie beaucoup de ces universitaires africains, lorsque les vagues d'immigration suivante ont formé des bataillons de nouveaux prolétaires. Milos, haïtien, a quitté Évry pour Levallois, «parce que mes enfants se prenaient pour des Noirs du Bronx», résume-t-il. «Pour être acceptés par leurs copains, ils étaient nuls en classe, ils jouaient un rôle.» Aujourd'hui, sa fille est à HEC, son fils travaille dans le marketing d'un opérateur téléphonique, et lui sent que sa vie de professeur, interrompue lors de son arrivée en France, va enfin s'épanouir. «Ils sont taillés pour la société française», s'enorgueillit ce père, qui, lui, vit branché sur RFI, accroché aux nouvelles du pays. Tandis que ses enfants ont formé des couples avec des Français.
Olivier Bouchez, pharmacien, a lui grandi dans une cité à La Courneuve. À mesure que des familles africaines s'installaient, cet Antillais s'est senti sommé de choisir entre les Blancs et les Noirs. «Avec les années, j'ai compris que je serai noir de toute façon aux yeux des Blancs.» La recherche d'un logement dans le XVe arrondissement de Paris s'est avérée éprouvante, «je voyais la déception lorsque les agences découvraient mon visage». Il a fini par s'installer en banlieue. Comme lui, des copains noirs affichant de bons salaires ont essuyé les mêmes vexations. SOS-Racisme a récemment conduit plusieurs procès contre des agences qui codaient les clients pour éviter les Noirs, à la demande de certains propriétaires. Car, malgré Harry Roselmack, star de TF1, la nouvelle classe moyenne noire n'a pas encore émergé dans l'imaginaire.