« Haïti, entre deux feux » : une série documentaire sur l’enfer de Port-au-Prince raconté par ses habitants

Drianke

اللهم إفتح لنا أبواب الخير وأرزقنا من حيت لا نحتسب
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Deux ans après l’assassinat du président haïtien Jovenel Moïse, la ville de Port-au-Prince continue de s’enfoncer dans une violence exponentielle. Les habitants de la capitale sont exposés tous les jours au risque d’être enlevés, blessés ou encore tués dans des affrontements de rue entre gangs, brigades civiles d’auto-défense et forces de police. Cette violence quotidienne a été documentée à travers les témoignages de 15 personnes vivant à Port-au-Prince, en grande majorité des membres du personnel de MSF, racontés dans la série documentaire « Haïti, entre deux feux ». L’enquête interne menée en parallèle par Epicentre, le satellite de MSF dédié à l'épidémiologie et à la recherche, confirme une exposition élevée aux violences extrêmes.

En avril, la capitale haïtienne et ses résidents ont connu une nouvelle vague de violences extrêmes, entraînant la mort de plus de 600 personnes. Au cours de la seule journée du 24 avril, les équipes de MSF ont reçu environ 50 blessés par balle ou à l'arme blanche. Nombre de victimes n’ont tout simplement pas pu se rendre dans des structures de santé, faute de pouvoir sortir de chez elles. Un peu plus tôt en février puis à nouveau en avril, MSF a été contrainte de suspendre l’activité de son hôpital à Cité Soleil, à cause des combats situés dans la rue voisine. En deux ans, 65 impacts de balles perdues ont été constatés à l’intérieur de l’enceinte hospitalière.

épisode 1 : états de violence...........​


 

Drianke

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L'ONU de retour en Haïti

Hier, l'ONU a voté l'envoi d'une mission au secours de l'Haïti. Reste à savoir si cette expression de solidarité permettra effectivement de soulager la détresse de tout un peuple.

C'est une mission dite de "soutien à la sécurité" et dont on ne peut objectivement douter qu'elle parte d'un bon sentiment. Mais sera-t-elle seulement en mesure d'apporter une solution structurelle salutaire, lorsqu'on sait combien Haïti est un pays aujourd'hui ravagé par des années de chaos à la fois politique, sociale, économique et humanitaire. Preuve, d'ailleurs, que la question se pose, non seulement il aura fallu pas moins d'un an d'atermoiements avant que le Conseil de sécurité de l'ONU ne donne finalement son feu vert hier, mais jusqu'à il y a encore deux mois à peine aucun volontaire n'était prêt à prendre la tête d'une telle mission. Il faut dire que les expériences passées (celle notamment de la Minustha restée sur place 13 années durant), comme les risques de se retrouver piégé dans un bourbier meurtrier ont depuis longtemps désillusionné la communauté internationale. Et c'est peut-être aussi la raison pour laquelle dès-hier l'ambassadrice américaine a tenu elle-même à prévenir : cette résolution certes "historique" n'est "que la première étape".
Tout commence donc aujourd'hui ou presque. Au total 1000 hommes vont être déployés dans le pays pauvre des Caraïbes pour aider la police haïtienne dans sa lutte contre les gangs. Avec l'espoir, à terme, qu'améliorer ainsi la sécurité permettra peut-être d'organiser enfin les premières élections dans ce pays depuis 2016.
 

Drianke

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Haïti: «L'arrivée de la force kényane est le résultat d'un deal conclu avec les Américains»​


Pourquoi le Kenya s'est-il porté volontaire pour envoyer 1 000 policiers en Haïti afin d'essayer d'y rétablir l'ordre ? Pourquoi cette offre vient-elle d'un pays d'Afrique et pas d'un pays du continent américain, comme les États-Unis ou le Canada ? Bref, quelles sont les raisons avouables et peut-être moins avouables de cette initiative surprenante ? L'anthropologue béninois Brice Ahounou connaît bien Haïti. Cet enseignant-chercheur est à Paris, correspondant du journal Haïti-Observateur de New York.

RFI : « Nos frères et sœurs haïtiens sont les premiers à avoir gagné leur combat pour la liberté face à la tyrannie coloniale. Et leurs cris sont arrivés jusqu’à nos oreilles », a lancé le président kényan William Ruto, c’était à la tribune de l’ONU il y a quelques jours. Brice Ahounou, quelle place occupe Haïti dans le cœur des Africains ?

Brice Ahounou
: Haïti est une Afrique très avancée dans la mer des Caraïbes. Et effectivement, Haïti occupe une place importante. Mais je dois dire, il y a de cela quelques années, la République Haïti était rentrée à l’Union africaine en 2012, et elle a mis 4 années à en sortir. Cela nous a amenés à nous interroger aujourd’hui pour savoir si, par exemple, les dirigeants politiques africains s’intéressent vraiment à Haïti, puisque la République de Haïti n’est plus membre de l’Union africaine.

Pourquoi est-elle sortie de l’Union africaine ?

Parce que, au départ, elle avait un statut de membre observateur et les dirigeants de l’Union africaine ne se sont pas tout à fait mis d’accord. Ils ont invoqué un article de la charte de l’Union africaine et ils ont mis Haïti dehors.

Il y a eu un sentiment de solidarité après le tremblement de terre de 2010. C’est peut-être pour cela qu’Haïti y est entrée en 2012 ?

Absolument. Et je dois dire que cette solidarité s’était aussi étendue à plusieurs pays comme le Sénégal.

Pourquoi dites-vous que, pour les Africains, Haïti est à la fois loin et proche ?

Loin, d’abord par la distance géographique. Vous verrez par exemple que le Kenya, qui accepte de prendre la tête d’une force internationale en Haïti, est à plus de 12 000 kilomètres. Et proche, parce que culturellement les Africains, notamment ceux de l’Ouest, considèrent que Haïti est une partie de leur culture. Le plus classique, c’est le vaudou et tout le reste. Quand on va en Haïti, on voit qu’il y a une grande ressemblance des gens qu’on voit, des modèles culturels et tout le reste. On pourrait se croire en Afrique quand on arrive en Haïti. Mais en même temps, les Haïtiens ont fait un trajet historique très important au cours des 200 dernières années et que Haïti est un pays de l’hémisphère nord-américain.

Vous parlez du vaudou qui relie Haïti à l’Afrique de l’Ouest et au Bénin. Pourquoi plutôt le Kenya que le Bénin pour manifester cette solidarité concrète en Haïti ?

C’est ce qu’il y a de plus étrange dans cette affaire justement. Mais en fait, nous savons très bien que l’arrivée des Kényans en Haïti est le résultat d’un deal conclu avec les Américains. C’est-à-dire que Washington a été depuis toujours, en tout cas depuis ces dernières années, un peu la puissance tutélaire en Haïti à travers le Core Group par exemple [Ambassadeurs d’Allemagne, du Brésil, du Canada, d’Espagne, des États-Unis d’Amérique, de France, de l’Union européenne, du représentant spécial de l’Organisation des États américains et de la représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies], ce club de pays du Nord qui s’ingèrent dans les affaires haïtiennes. Donc, le Kenya a répondu à une demande américaine en fait. Joe Biden met sur la table, je crois, 100 millions de dollars. Donc, le Kenya a accepté. D’ailleurs, on remarque très bien que l’opposition kényane, quelques voix de l’opposition kényane, s’étonne de cette offre que le Kenya accepte. Donc, je dirais que c’est un projet américain auquel le Kenya a répondu.

Il y a un opposant kényan qui a été candidat en 2017, Ekuru Aukot, qui dit que « les policiers kényans sont envoyés en Haïti pour nettoyer le sale travail des États-Unis et de la France »…



 
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