Hillary Clinton prône un recentrage au Proche-Orient

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Pourquoi aller faire une tournée au Proche-Orient à un moment où il n'y a pas de gouvernement en Israël ni de perspective très claire dans les discussions interpalestiniennes sur un gouvernement d'unité nationale ? Ceux qui s'interrogeaient sur l'opportunité de la visite de la secrétaire d'Etat, Hillary Clinton, dans la région auront eu la réponse dès la première étape, à Charm El-Cheikh. Mme Clinton y a participé, lundi 2 mars, à la conférence internationale sur la reconstruction de Gaza : l'ancienne First Lady a l'intention de s'impliquer personnellement dans un dossier sur lequel son mari a buté jusqu'à la fin de sa présidence.

Lors d'une rencontre avec la presse, avant de partir pour Tel-Aviv, Mme Clinton a défendu son engagement avec des accents qui lui ont valu les applaudissements des journalistes arabes présents. "C'est quelque chose qui me concerne passionnément, qui me tient à coeur, pas seulement quelque chose qui est dans mon portefeuille", a-t-elle dit. Elle a indiqué avoir rappelé au président égyptien, Hosni Moubarak, les "nuits blanches" qu'il a passées à travailler en compagnie de Bill Clinton. La recherche "énergique" d'une "solution à deux Etats" va reprendre. "Vous allez voir l'importance des efforts américains", a-t-elle promis.

Depuis l'arrivée de Barack Obama, l'administration américaine a multiplié les gestes pour montrer qu'elle recentre sa politique. Le tout premier coup de fil du nouveau président a été pour son homologue palestinien, Mahmoud Abbas. Deux jours plus tard, provoquant une certaine déception en Israël, il a nommé un médiateur respecté pour son honnêteté dans le monde arabe, l'ancien sénateur George Mitchell. "Son père était irlandais et sa mère libanaise", a précisé en souriant Mme Clinton. "Il a déjà résolu la moitié des problèmes de sa famille. Maintenant, il s'est attaqué à la deuxième partie et nous espérons qu'il réussira."

L'envoi à Gaza du sénateur John Kerry le 19 février pour qu'il se rende compte par lui-même de l'ampleur des dégâts causés par les 22 jours de bombardements israéliens sur cette petite enclave surpeuplée (1 330 Palestiniens, en grande majorité des civils, et au moins 300 enfants sont morts, ainsi que 13 personnes dont 10 soldats en Israël) a aussi été apprécié dans le monde arabe.

La nouvelle administration a changé à l'égard des Palestiniens. Mais, jusqu'ici, il s'est surtout agi d'un changement de ton. L'équipe Obama, il est vrai, est contrainte d'avancer lentement. Au Congrès, il se trouvait encore ces jours derniers des élus pour proposer un amendement interdisant de faire transiter l'assistance aux Palestiniens par l'Unrwa, l'agence des Nations unies pour les réfugiés, qu'ils considèrent infiltrée par le Hamas.

Sur l'aide américaine promise lundi aux Palestiniens (900 millions de dollars en tout), un tiers seulement est destiné à Gaza, et le Hamas n'en recevra rien, a assuré Robert Wood, porte-parole du département d'Etat. Mme Clinton l'a rappelé aussi : il n'est pas question de négocier avec le Hamas, sauf s'il remplit les trois conditions imposées par le Quartet (reconnaissance d'Israël, acceptation des accords israélo-palestiniens précédents et renoncement à la violence).

Mais l'administration américaine a encouragé les discussions entre l'Autorité palestinienne et le Hamas. Elle est même désormais favorable à un "gouvernement d'union nationale" palestinien, a dit, lundi, Mme Clinton, et pourrait discuter avec lui, quitte à fermer les yeux sur la présence de membres du Hamas, selon le New York Times. Là où l'administration Bush essayait de favoriser la Cisjordanie et d'isoler Gaza, le gouvernement Obama cherche à réconcilier.

Hillary Clinton est déjà venue deux fois en Israël, en visite avec son mari. Même si elle se présente comme une grande amie d'Israël, il est clair que cette administration sera moins accommodante que la précédente.

L'administration Obama est en effet moins simple à appréhender que celle de George Bush. Y figurent aussi bien le "faucon" Dennis Ross, nommé conseiller de Mme Clinton, que des éléments jugés propalestiniens comme Charles Freeman, dont la nomination, la semaine dernière, à la présidence du National Intelligence Council (Conseil national du renseignement) a suscité une levée de boucliers parmi les défenseurs de la droite israélienne.

A Jérusalem, Mme Clinton devait rencontrer les "sortants" - le premier ministre Ehoud Olmert, la ministre des affaires étrangères Tzipi Livni et le ministre de la défense Ehoud Barak - et le premier ministre pressenti Benyamin Nétanyahou. Un homme qui s'est jusqu'à présent abstenu de soutenir publiquement l'idée de "deux Etats pour deux peuples", et que Bill Clinton, dit-on, détestait. Mme Clinton a refusé de confirmer qu'elle aborderait la question du gel des colonies. Comme le dit le quotidien israélien Yediot Ahronoth : "C'est une visite d'étude plutôt que de confrontation." Au moment même où elle arrivait à Jérusalem, l'organisation pacifiste israélienne La Paix maintenant faisait état de projets de construction de 73 000 nouveaux logements en Cisjordanie.

Corine Lesnes, Michel Bôle-Richard et Patrice Claude


http://www.lemonde.fr/proche-orient...recentrage-au-proche-orient_1162592_3218.html
 
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