Histoires criminelles de l'ère victorienne sur la Toile

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anti beurettes !
En Angleterre, les assassins, les voleurs, les pervers ou les sadiques seraient-ils plus excessifs qu'ailleurs ? La mise en ligne sur Internet, depuis lundi 3 août, des détails de 1,4 million de procès criminels anglais et gallois, qui se sont tenus entre 1791 et 1892, met en lumière leurs méfaits. En dévoilant les détails des crimes jugés, le nom des accusés, leur âge, le lieu du procès ainsi que le verdict, cette initiative du site britannique ancestry.co.uk, spécialisé dans la généalogie, et du Service national des archives permet de survoler le monde étrange, fascinant, cauchemardesque de la justice, en particulier à l'ère victorienne.


Le bazar des faits divers de l'époque était tout aussi achalandé qu'aujourd'hui. Les documents concernent 900 000 condamnations à des peines de prison, 97 000 déportations dans les colonies et 10 300 exécutions par pendaison.

Les abonnés au site ont ainsi accès au dossier de Roderick Maclean, l'auteur de la tentative avortée d'assassinat de la reine Victoria, le 2 mars 1882, à Windsor, qui fut enfermé à vie dans un asile d'aliénés. Les amateurs de Dickens découvriront l'escroc Isaac Solomon, condamné à la déportation dans les colonies en 1830, qui aurait inspiré le personnage de Fagin dans Oliver Twist. Les passionnés de Jack l'Eventreur, ce meurtrier hors du commun qui avait sauvagement assassiné cinq prostituées à Londres en 1888, peuvent lire les détails du procès de Thomas Neil Cream, condamné à la pendaison en 1892 pour avoir empoisonné plusieurs personnes. Le médecin avait affirmé sur la potence être le fameux tueur en série de l'East End londonien, bien qu'il ait été en prison quand certains des crimes avaient eu lieu.

A l'époque, les juges à perruque avaient la main lourde, en particulier en ce qui concerne la petite délinquance. En 1791, une femme de 63 ans, Sarah Douglas, a écopé d'une peine de déportation en Australie pour avoir volé une nappe. Mary Wilton, 65 ans, a eu droit à une condamnation similaire pour avoir subtilisé un bébé. Et le bourreau ne chômait pas. Tout vol supérieur à 5 shillings (35 euros aujourd'hui), le braconnage de lapin de garenne, l'abattage d'arbre, mais aussi le fait d'avoir noirci son visage étaient punis de la peine capitale.

"Dislocations sociales"

La réforme pénale des années 1850 avait toutefois atténué la sévérité de la justice. Ainsi, en 1874, un certain John William Aylward avait été condamné à quatorze ans de prison pour avoir eu une relation sexuelle avec une mineure ; "une peine similaire à ce qu'il recevrait aujourd'hui", note le Times.

En filigrane se dessine la misère avilissante de la classe ouvrière qui avait poussé Marx à appeler le prolétariat à la lutte des classes lors de son séjour londonien. "Les autorités étaient conscientes de l'effet sur la criminalité des dislocations sociales provoquées par la poussée démographique, l'urbanisation et la révolution industrielle. D'où la nécessité de collecter des données précises sur la délinquance", souligne Paul Carter, chargé du projet aux archives nationales. Les famines irlandaises, l'exode rural, le besoin d'une main-d'oeuvre bon marché et la précarité avaient entraîné un taux vertigineux de prostitution, de vols, de crimes.
Marc Roche (Londres, correspondant)
 
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