Idéologies linguistiques et Etat-nation au Maghreb

  • Initiateur de la discussion Initiateur de la discussion Amkhlaw
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Al-Arsouzi est séduit, lui aussi, par l’idée de la supériorité des langues chez Fichte. Il insiste sur la charge affective suscitée par l’arabe littéraire. Parlant des Arabes, il les qualifie de « peuple élu ». Quant à leur langue, elle est considérée comme « miraculeuse », car, dit-il, « c’est parce l’arabe est, depuis l’origine de l’humanité, la langue miraculeuse que Dieu s’est exprimé en arabe par le Coran » (Carré, 1993 : 71). Le miracle, selon lui, ne date pas de Mahomet mais d'Adam, et l’idiome coranique est celui des origines précédant Babel. Arsouzi décrit l’arabe littéraire comme une langue divine pour deux raisons : 1) le fait qu’Allah a dicté le Coran en « pur arabe » ; 2) le caractère inimitable (al’iajâz) de cet idiome dans le Coran. C’est donc l’aspect linguistique du Coran qui fait de l’arabe une langue miraculeuse. De ce fait, on voit que le nationalisme arabe est difficilement concevable sans l’islam.

A l’instar de Fichte, Arsousi affectionne l’idée de la langue qui se perpétue sans aucune interruption sur un même territoire. Se fondant sur le caractère morphologique triconsonantique du lexique arabe (tous les verbes et noms sont formés à partir d’une même racine, majoritairement trilitère), il considère l’arabe littéraire comme la langue « racine ». Arsouzi donne à son discours une tonalité exclusive lorsqu’il déclare :

« Les autres langues n’ont pas de telles racines dans la Nature. Par conséquent, la nation arabe a une essence propre, elle est l’Authentique. Cela veut dire que l’apparition de la nation arabe sur la scène de l’histoire coïncide avec l’apparition de l’humanisme. » (Cité dans Carré, 1993 : 74).

Extrait de la thèse que vous pouvez consulté en intégralité ici : http://www.amazighworld.net/studies/language/ideologie_ling.php
 
Le premier est relatif au principe de la langue officielle unique selon l’équation sousjacente, un Etat = une langue, autrement dit, un Etat ne peut avoir qu’une seule langue officielle. Cette équation s’inscrit dans l’idéologie de la langue unique, fondement de l’unité nationale, idéologie clairement exprimée par la Révolution française. Or, on sait que ce modèle n’est ni universel ni plus démocratique qu’un autre.

Le second problème est relatif à une idée largement partagée au sein de la société maghrébine selon laquelle une langue nationale est toujours préférable à une langue étrangère. Si la description des pratiques langagières effectives révèle l’existence d’au moins deux langues nationales, l’arabe et tamazight, seule la première est déclarée comme telle. Cela pourrait avoir deux interprétations possibles : 1) tamazight n’existe pas, 2) tamazight n’est pas une langue nationale. La première signifie que tamazight ne fait pas partie du paysage sociolinguistique maghrébin, ce qui, bien sûr, va à l’encontre des faits ; la seconde signifie qu’il ne s’agit pas d’une langue mais d’un dialecte, non standardisé, qui ne peut prétendre au statut de langue nationale. Les deux interprétations illustrent le non-dit et surtout la contradiction entre le fait et le droit. Par ailleurs, si l’on admet qu’une langue nationale est une langue autochtone enracinée dans la pratique socioculturelle de la communauté nationale ou d’une fraction de cette communauté, pourquoi tamazight, présent au Maghreb depuis la Haute Antiquité, ne pourrait-il pas exprimer l’authenticité maghrébine ?

Ainsi il apparaît clairement que le discours des concepteurs de la politique linguistique a pour objectif de réduire le plurilinguisme, qui caractérise le marché linguistique maghrébin, à une seule langue légitime. Explicitement, l’arabe est opposé au français mais, implicitement, on l’oppose à tamazight, l’objectif étant de disqualifier les deux d’un même trait. Si, comme on l’a vu, le français est assimilé au néo-colonialisme, tamazight, lui, symbolise le particularisme et la division de la nation.
 
Bourguiba qui a dit tout haut ce que tous les dirigeants maghrébins pensent tout bas (on peut se demander où est tamazight dans tout ça...) :

" En Tunisie, le courant empruntant le discours de la francophonie est représenté par l’élite dirigeante qui a pris le pouvoir au lendemain de l’indépendance. Il est symbolisé, entre autres, par l’ex-président Habib Bourguiba.

« Ma fierté, elle, tient assurément au fait que je puis m’adresser à vous [Québécois] en étant compris immédiatement de tous, en une langue qui nous est commune. A vous, parce que la langue française est plus qu’un héritage, le fondement de votre être et de votre identité. A nous, Tunisiens, parce que la langue française est celle que nous avons choisie, presque à égalité avec notre langue maternelle, comme langue de culture, de travail et de rencontre. » [Discours prononcé à Montréal le 11 mai 1968.]"
 
ya une confusion flagrante dans le second poste

l amazigh est bel et bien une langue nationale (plusieurs regions au Maroc parlent uniquement cette langue ) mais elle n est pas officielle certes (qualification que l'on estime une simple question de forme)
 
ya une confusion flagrante dans le second poste

l amazigh est bel et bien une langue nationale (plusieurs regions au Maroc parlent uniquement cette langue ) mais elle n est pas officielle certes (qualification que l'on estime une simple question de forme)

On parle politique et constitutionnalisation là!
 
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