Inde : L’école de la séduction

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le chinois
De plus en plus de jeunes Indiens désirent flirter avant le mariage. Les moins dégourdis font appel à des coachs spécialisés dans l’art de la drague.

“Vous embrassez divinement bien ? Etes-vous prêtes à montrer à des jeunes hommes qui n’y connaissent rien comment s’y prendre ?” Mesdames, si vous répondez oui à ces questions, vous pourriez bien être les spécialistes du baiser que recherche la Real Man Academy [Académie de l’homme véritable]. Cette école située à Bombay, qui enseigne aux hommes l’art de séduire les femmes, a passé une annonce pour embaucher deux coachs susceptibles d’aider les élèves à passer de la pratique du baisemain au véritable baiser. Pour compléter la formation, le fondateur de l’école, Shiva, a mis au point un manuel très complet avec des présentations *multi*médias, des modèles anatomiques et des jeux de rôle interactifs.

A en juger par le nombre d’élèves inscrits à l’école (500 au total, la plupart ayant entre 22 et 32 ans), l’époque n’est plus au rendez-vous de la Saint-Valentin auquel on se rendait, gauche et intimidé, loin des regards inquisiteurs des parents. Aujourd’hui, les portails de rencontres en ligne permettent de trouver l’âme sœur, et la drague sur téléphone portable s’effectue au moyen d’un simple SMS – par exemple, grâce à un service comme mobiDate, qui propose des messages tout prêts et compte jusqu’à un million d’utilisateurs. Le jeune séducteur indien a désormais de quoi se la raconter. Et, pour les âmes encore esseulées, des consultants spécialisés ne demandent qu’à venir à la rescousse.
 
A l’atelier de séduction de la Real Man Academy, les élèves apprennent à aborder l’autre grâce à des mises en situation avec des assistantes. Ces dernières commentent ensuite la performance des jeunes hommes, du ton de voix au langage corporel. Une fois bien entraînés, ils sont mis en situation réelle et accostent des femmes en train de faire leurs courses ou de boire un café. Sans parler de l’atelier de formation intitulé “Faire l’amour”, qui transforme, à l’aide de mannequins grandeur nature, l’Indien lambda en don Juan. La facture pour participer à un atelier s’élève à 8 800 roupies [128 euros]. Nitin (un pseudonyme), un homme d’affaires de 32 ans, explique : “Je ne pouvais pas demander conseil à mes amis car ils se seraient moqués de moi.” Grâce au stage, il a vaincu ses inhibitions et vécu son premier vrai flirt. La Real Man Academy n’est pas la seule école de la séduction qui tourne à plein régime. Vicky Kalwani, une consultante financière qui a quitté Londres pour s’installer à Bombay en 2010, travaille depuis huit mois comme “gourou de la drague”. Son carnet de rendez-vous est déjà archirempli. Chez elle, un client sur dix est une femme, parfois même une future mariée, disposée à débourser 10 000 roupies [146 euros] pour une semaine de cours théorique et 30 000 roupies [437 euros] pour un mois d’entraînement pratique.

Le charme est désormais un talent qui s’acquiert, comme le montre Superstud [Superétalon], une émission de télé-*réalité de la chaîne hindiphone UTV Bindass. Dans cette “école du flirt”, 13 concurrents tentent de séduire une femme au moyen d’exercices et de discussions. Leur instructeur chevronné, l’acteur Ashmit Patel, a même distribué aux trois finalistes un petit guide renfermant les secrets de la drague, le Superstud Blackbook [Guide du superétalon], dont une application pour téléphone portable est disponible. Karan Chhabra, le gagnant, est un expert en la matière. “Le meilleur moyen d’attirer l’attention des femmes lors de la première rencontre est d’employer la technique ‘du choc et de l’effroi’.” Chhabra s’explique : “Je lui dis : ‘Je vous arrête parce que vous avez tué quelqu’un.’ Stupéfaite, elle attend la suite, alors je poursuis : ‘Je suis la première personne que vous avez tuée avec votre beauté’.” C’est désarmant, en effet – il est le champion de “Superétalon”, ne l’oublions pas.
 
Sur le plateau, l’acteur Ashmit Patel enchaîne : “Les jeunes ne craignent plus les démonstrations d’affection en public, même dans les petites villes, où on les voit désormais s’embrasser dans la rue.” La drague n’est plus un phénomène limité à Bombay ou New Delhi. Ludhiana, Bhopal, Bénarès, Vellore, Haridwar, Tumkur : autant de petites ou moyennes villes où les jeunes sont de plus en plus nombreux à vouloir sortir avec quelqu’un “pour ne pas être un looser”, explique Tarun Davda, directeur de la branche indienne du site de rencontres en ligne Ignighter. “On reporte le mariage à plus tard, commente-t-il. Les femmes sont plus nombreuses à travailler et les mariages d’amour sont davantage acceptés. Aussi, les gens s’habituent à l’idée de se fréquenter avant de se marier.” Mais, malgré son désir de ne plus rester seul, le charmeur indien demeure hésitant, si l’on en croit VJ Andy, présentateur d’émissions de télévision consacrées à la drague. “C’est encore nouveau pour lui, alors il cherche à s’informer un peu partout.” Et, bien sûr, il tire d’abord son inspiration du cinéma de Bollywood. Andy appelle cela “la bollywoodisation de l’amour, qui ne correspond guère à la réalité”.

http://www.courrierinternational.com/article/2011/11/03/l-ecole-des-bourreaux-des-coeurs
 
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