En un mois, dix personnes sont décédées sur fond de trafic de drogue à Marseille. Dans les quartiers nord, de nombreuses familles vivent dans la peur que l'un de leurs enfants ne soit enrôlé dans le deal. À tel point que des centaines de demandes de relogement sont adressées à la municipalité chaque année.
D'ici à 2025, la petite résidence HLM Bassens 2, située tout au nord de Marseille, sera détruite. Démolie par le passage d'une ligne ferroviaire reliant Marseille à Nice. Paradoxalement, c'est un soulagement qu'éprouvent bon nombre de ses habitants. « La plupart d'entre nous sommes nés ici, on va forcément perdre un morceau de notre identité. Mais c'est un mal pour un bien, souffle une riveraine, préférant garder l'anonymat. C’est la seule solution pour régler le problème Bassens ! » Car ici, comme dans des dizaines d'autres quartiers du nord de la ville, les trafics de drogue gangrènent inexorablement la vie. Faisant des habitants des otages, ou plutôt des prisonniers, d'un système tentaculaire et bien souvent funeste.En un mois, les claquements de balles ont fait dix morts dans ces quartiers populaires de la cité phocéenne. Sept personnes sont décédées successivement entre le 25 juin et le 9 juillet. Des meurtres qualifiés, pour au moins cinq d'entre eux, de « règlements de compte » par la police judiciaire de Marseille. Auxquels il faut ajouter trois homicides le week-end du 24 et 25 juillet, rapportés par les autorités locales comme étant des « règlements de compte présumés ».
LES JEUNES INTERDITS DE TRAÎNER
Outre l'enchaînement rapide et inédit de violence, l'émotion a été vive après le meurtre par balles d'une jeune fille de 17 ans, à Septèmes-les-Vallons, dans la banlieue de Marseille, le 9 juillet dernier, dont la police a déclaré qu'il s'agissait d'une « victime collatérale ». « Maintenant, on a peur partout et de tout, même si l’on n’est pas impliqué dans les trafics, poursuit la résidente de Bassens. Ça fait deux semaines qu’au moindre pétard on sursaute, qu’au moindre bruit brusque on se met à l’abri. » Parmi les dix morts, l'un était originaire de la cité Bassens. Il a été abattu au beau milieu des immeubles, le 29 juin dernier.Face à l'horreur et l'insécurité permanente, beaucoup d'habitants ne sortent plus de chez eux. « C'est devenu une cité fantôme », observe la jeune femme. Et certains jeunes ont interdiction de traîner aux bas des immeubles. Car la peur des familles de les voir basculer dans les trafics est immense. « Mon frère, s'il sort, c'est en dehors de la cité, pour voir autre chose, pour faire autre chose », poursuit-elle.
Récemment, un collectif nommé « Trop jeune pour mourir » est allé jusqu'à demander, par voie de presse, « l’instauration d’un couvre-feu aménageable à partir de 21 h sur les quatre arrondissements du nord de la ville de Marseille (XIIIe, XIVe, XVe, XVIe) ». Tandis que d'autres songent à des solutions plus radicales encore : le déménagement.