Islamophobie et État sécuritaire. Yasser Louati fait face au « Repli »

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اللهم إفتح لنا أبواب الخير وأرزقنا من حيت لا نحتسب
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Partant de la lutte des ouvriers immigrés de l’automobile au début des années 1980, Joseph Paris raconte dans Le Repli la montée du racisme et des discours sécuritaires en France. Un temps porte-parole du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), militant des droits humains, ancien pilote d’avion ayant vécu dans le Golfe et aux États-Unis, Yasser Louati est le fil rouge de ce documentaire habile qui sort aujourd’hui sur les écrans.

Le repli est un film en apesanteur, comme nous sommes nombreux à l’être, sidérés par l’ampleur qu’ont prise ces dernières années, dans l’espace public, les discours racistes, et par les tours de vis sécuritaires amorcés par Nicolas Sarkozy, amplifiés par François Hollande — et ses premiers ministres Manuel Valls et Bernard Cazeneuve — et poursuivis par Emmanuel Macron. En apesanteur d’abord, parce que son réalisateur filme Paris comme rarement : du ciel, des trottoirs des boulevards, dans un noir et blanc d’inquiétude, hommage à la fois sombre et éclairant à l’esprit de la capitale, fait de rébellion, de résistance, mais aussi d’une exceptionnelle liberté de ton que de nombreux régimes ont tenté en vain d’étouffer depuis la Restauration, il y a plus de deux siècles.

Le film est en apesanteur ensuite par sa forme documentaire à la mise en scène soignée, mix d’archives documentaires, d’interviews fouillées d’observateurs comme Mireille Delmas Marty, Abdellali Hajjat ou Thomas Deltombe et d’images flashs, papiers déchirés, dessins à l’encre de Chine, comme autant de brisures graphiques. Son réalisateur Joseph Paris a également fait le choix de mettre l’humain au cœur du discours politique qui structure le film. Le militant Yasser Louati en est le fil rouge, à la fois témoin et acteur. Lui-même semble parfois en apesanteur.


Le repli • Trailer - YouTube


« Ils ne sont pas de nos rangs »​

C’est une douleur extrême dont témoigne, dans le film, Yasser Louati sur la promenade des Anglais, aux côtés de proches de victimes de l’attentat de Nice, le 14 juillet 2016, qui a fait 83 morts, dont de nombreux musulmans.

Yasser, aujourd’hui âgé de 44 ans, bel homme toujours tiré à quatre épingles, aimant porter un chapeau qui lui donne fière allure, a émergé sur la scène publique dans les jours qui ont suivi les attaques du 13 novembre 2015. Il est alors porte-parole du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF, dissous par Gérald Darmanin en 2020), et est sollicité par CNN pour une interview. C’est le petit matin sur la place de la République, où le plateau improvisé de la chaîne américaine est installé. Les journalistes veulent obtenir de Yasser Louati son avis sur la « responsabilité » de la communauté musulmane française dans les attentats, perpétrés « par des individus issus de vos rangs ». « Ils ne sont pas de nos rangs, riposte Louati, qui parle parfaitement anglais. Notre camp est le camp français, n’ayez aucun doute là-dessus ». Les journalistes américains insistent, l’un demande pourquoi « personne n’a rien dit ». Les musulmans complices, et complices honteux, ne devraient pas « se dérober ».
 
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