Isli et Tislit : légende marocaine

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Mims

Date limite de consommation : 26/01/2033
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La légende « Isli et Tislit » raconte l’histoire de deux lacs d’Imilchil : ils furent dans une époque lointaine deux amoureux dont les parents refusèrent le mariage ; ils moururent d’amour et se transformèrent en ces deux lacs nommés « Isli ET Tislit » signifiant « le fiancé et la fiancée ». C’est sur le bord de ces lacs que, lors du « Moussem des fiançailles d’Imilchil », les jeunes hommes et les jeunes femmes berbères se découvrent, s’observent, participent à des concours poétiques dans l’espoir d’y découvrir, séduire et épouser l’être aimé.



Que dit la légende ?



Adrukh iwa ru iwa gakh tin ijdad

A yasmum eqqar iâaqqub ar teqqarkh .



Traduction :



« Je pleurerai

Pleure

Faisons comme les oiseaux

O mon bien aimé

Appelle Iâaqqub et que je l’appelle».





D’un bout à l’autre de la montagne d’Imilchil, Tislit envoyait ces vers devenus célèbres à son amoureux qui y répondait par des vers non moins pathétiques.



Célèbres ? Plutôt légendaires car ces deux vers renvoient dans la culture amazighe du Moyen Atlas, à une légende qui dit à peu près ceci :



« Il était une fois il y a de cela bien longtemps, deux amoureux qui avaient défrayé la chronique par leur idylle merveilleuse. Mais le Dieu de l’amour, outré par je ne sais quel manquement aux règles, après les avoir transformés en oiseaux, décida que les deux amoureux vivraient dans la même forêt sans jamais pouvoir se voir. »
 
C’est ainsi que commença le calvaire de ceux qui sont devenus une réalité pour les habitants du Moyen Atlas : tout le monde ici vous dira, à la nuit tombée, que les beaux cris qui se suivent, que vous entendez dire clairement : « Yaâkoub » puis « Ishaak » sont ceux des amoureux maudits. Ils s’interpellent ainsi et se rapprochent petit à petit l’un de l’autre, jusqu’à dit-on occuper le même arbre.

A ce moment là, craignant de crier en même temps et ne pas s’entendre, ils se taisent tous les deux en même temps, et un lourd silence enveloppe la forêt. A ce moment précis, le cœur tordu, les femmes et les hommes qui savent et qui croient en l’amouront les larmes aux yeux. Chacun a pitié de ces damnés de l’amour sans raison apparente.



« Ah si l’un d’eux pouvait enfin crier ! Se lamente la contrée ».



Les amoureux attendent, attendent, dans les soupirs et la folle envie de voir enfin le bien aimé. En vain. Le désespoir, la lassitude mais surtout la volonté de recommencer de nouveau les prend tous les deux en même temps : ils s’envolent chacun dans une direction et, quelques kilomètres plus loin, ils se reposent sur la cime d’un cèdre, d’un chêne, d’un pistachier sauvage, d’un quelconque arbre. Puis le calvaire de l’absence, de la nostalgie, de la douleur recommence à crier : « Iâakououb » «Ishaaaak»…



Depuis les temps les plus reculés, ce cycle se refait chaque nuit au Moyen Atlas, surtout pendant les longues nuits d’hiver et de printemps. Il paraît que les deux oiseaux n’aiment pas l’été pour une raison non encore élucidée.



C’est donc en souvenir de cet éternel recommencement que Tislit envoie les vers déjà cités à Isli.



Un an auparavant, les deux jeunes se sont rencontrés, se sont aimés de toutes leurs forces. Mais pour leur malheur, ils appartenaient à deux groupes devenus rivaux pour une affaire que l’histoire n’a pas retenue.



Le mariage leur était donc impossible. Ainsi commença leur calvaire.



Pour venir à bout de la bêtise humaine, ils commencèrent une grève de la faim arrosée par leurs larmes et leurs chants.



La fille commença la première à chanter cet interdit contre nature dans ces termes :



« aha yach a memmi nu yach

Amuttl en umarg es imzwura“



« Je te dis mon ami

La malédiction de l’amour

Ce sont les anciens… »



Isli lui renvoya son izli ainsi:



«da etgallax ar i tebdit d ixf

allig da da zerrin midden walu

wer ya da essektayx »



« Je te jure que tu m’as séparé de ma tête

Et que les gens passent

sans que je les reconnaisse »
 
Tislit:



« Ennighak day ennighak amarg ennk

ami ezzlumx timzin

Iggama wul ad ikn ijjawn »



« Je te dis et redis:

Ton amour est comme qui mangerait

une épie d’orge

jamais mon cœur ne s’en rassasie »



Isli :



« ullah da tettax ar kni d ik tix assix afus

Ezzigh da tekkat inegri ed wuchi a wenna rix »



« je mange

et dès que je pense à toi

Je n’ai plus d’appétit

Ton absence est un obstacle

entre moi et la nourriture »



...un merveilleux arc en ciel fait par les mains de l’amour, s'étendait d'un bout à l'autre du lac, formant une couronne magistralement portée à la tête des deux amoureux d'Ait Hadiddou...

Je sais que ce lac sera notre adresse pour l'éternité .Tu verra, nous allons vivre dans la mort puisque on a été forcé de mourir dans la vie...

...et, désormais leur demain ''voulait dire malheureusement ''Jamais''...







La réalité

Entre les deux lacs : « Isli et tislit » , à Imi Lchil , se tient depuis les temps les plus reculés , un festival appelé par les habitants « Agdud » ou la fête des fiançailles . Chaque années en Septembre , les couples qui se sont formés pendant l’année viennent officialiser leur union par le passage devant « Agraw »
( la jmaâ ) par la formule rituelle : « je t’aime » . C’est là également que seront prononcés les divorces qui auront été décidé d’un commun accord .
Ainsi , ici , on laisse toute une année à la décision cruciale : celle de s’unir ou de se séparer.

Légende réelle ou réalité légendaire ?

Voici donc une belle légende bien de chez nous , mais aux supports physiques réels : deux lacs Isli et tislit , un festival annuel vivants , le tout constituant une leçon magistrale d’humanisme , où l’amour et la liberté constituent le centre . Une preuve supplémentaire de ce que la civilisation amazighe renferme des valeurs humaines universelles . Des valeurs dont nous avons tant besoin aujourd’hui .
 
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