Au moment où se prépare une loi plus répressive sur laccueil des étrangers, «Libération» a rencontré au Maroc trois jeunes dont lexpulsion a interrompu le cursus scolaire.
La grille rouillée grince. Comme si elle se plaignait quon lui demande encore de souvrir. Les mauvaises herbes mangent le jardin. Hassan qui vient de pousser le portail, sourit dun air gêné : «Entrez». Les pas résonnent dans les pièces vides. Une entrée nue, un couloir, un petit salon. Deux chaises et une table basse sont posées là. Sur létagère : un oignon, trois fourchettes, une casserole, un petit réchaud à gaz. Rien de plus. Au bout, la chambre à coucher avec un matelas, trois grosses couvertures et un téléviseur. «Tout ce qui est là, on me la gentiment prêté. Jai de la chance, souffle sans conviction le jeune homme. Même la maison, cest une dame qui me la prête, elle nen a pas besoin pour le moment.»
Hassan, 22 ans, expulsé en mars 2009
«Je nai rien fait dillégal»
Hassan Bouyahyaoui a 22 ans. Il y a presque un an, il a été expulsé vers le Maroc alors quil terminait un contrat dapprentissage en mécanique. Il est lun des 29 000 étrangers en situation irrégulière expulsés de France en 2009. Cest 2000 de plus que lobjectif fixé par Nicolas Sarkozy. Sauf quHassan, comme des centaines dautres, est arrivé légalement en France. Il débarque à Montpellier à 15 ans. Sa grand-mère, qui soccupait de lui depuis la séparation de ses parents, venait de mourir. Sa mère, il ne la pas revue depuis des années, il ne se souvient plus. Son père, maçon installé en France depuis les années 60, lhéberge. Trois ans passent. A sa majorité, alors en CAP mécanique, Hassan fait une demande de titre de séjour. Refusée. A la place, on lui remet quatre autorisations provisoires de six mois. Hassan rate ses derniers examens. Nouvelle demande de rester sur le territoire. Nouveau refus. Cette fois, il reçoit une «obligation de quitter le territoire français» (OQTF). Le 9 mars, alors quil rend visite à son frère, près du commissariat de Montpellier, on lui demande ses papiers. Tout va très vite. En quelques heures, Hassan se retrouve sur un bateau au départ de Sète, direction Tanger, dans le nord du Maroc.
«Je narrive pas à my faire», confie Hassan onze mois plus tard, le regard dans le vide. Il serre son blouson de cuir pour se réchauffer, installé dans le jardin, sur une chaise en plastique. Il y fait moins froid que dans la maison. «Cest dur, poursuit-il. Je nai personne ici. Il y a juste mon grand-père, mais il est vieux et il na pas les moyens de soccuper de moi. Et il narrête pas de me dire que je suis nul, que cest ma faute si jai été expulsé». A son retour, Hassan a vécu chez son grand-père dans lest du Maroc, mais plus souvent dans la rue. Lassé, il a mis le cap sur Rabat. Une militante associative lui trouve cette maison et un emploi dans un garage à Temara, petite ville au sud de la capitale. «Et le jour où je vais devoir rendre cette maison ?, se demande sans cesse Hassan. Je suis incapable de payer un loyer avec ce que je gagne. En France au moins, je pourrais gagner ma vie correctement, évoluer. Ici, il y a des gars qui bossent depuis trois ans dans ce garage et ils gagnent toujours 10 dirhams de lheure.» Soit 85 centimes deuros, le smic horaire. Hassan répète encore une fois: «Ils se sont trompés, je nai rien fait dillégal.»
La grille rouillée grince. Comme si elle se plaignait quon lui demande encore de souvrir. Les mauvaises herbes mangent le jardin. Hassan qui vient de pousser le portail, sourit dun air gêné : «Entrez». Les pas résonnent dans les pièces vides. Une entrée nue, un couloir, un petit salon. Deux chaises et une table basse sont posées là. Sur létagère : un oignon, trois fourchettes, une casserole, un petit réchaud à gaz. Rien de plus. Au bout, la chambre à coucher avec un matelas, trois grosses couvertures et un téléviseur. «Tout ce qui est là, on me la gentiment prêté. Jai de la chance, souffle sans conviction le jeune homme. Même la maison, cest une dame qui me la prête, elle nen a pas besoin pour le moment.»
Hassan, 22 ans, expulsé en mars 2009
«Je nai rien fait dillégal»
Hassan Bouyahyaoui a 22 ans. Il y a presque un an, il a été expulsé vers le Maroc alors quil terminait un contrat dapprentissage en mécanique. Il est lun des 29 000 étrangers en situation irrégulière expulsés de France en 2009. Cest 2000 de plus que lobjectif fixé par Nicolas Sarkozy. Sauf quHassan, comme des centaines dautres, est arrivé légalement en France. Il débarque à Montpellier à 15 ans. Sa grand-mère, qui soccupait de lui depuis la séparation de ses parents, venait de mourir. Sa mère, il ne la pas revue depuis des années, il ne se souvient plus. Son père, maçon installé en France depuis les années 60, lhéberge. Trois ans passent. A sa majorité, alors en CAP mécanique, Hassan fait une demande de titre de séjour. Refusée. A la place, on lui remet quatre autorisations provisoires de six mois. Hassan rate ses derniers examens. Nouvelle demande de rester sur le territoire. Nouveau refus. Cette fois, il reçoit une «obligation de quitter le territoire français» (OQTF). Le 9 mars, alors quil rend visite à son frère, près du commissariat de Montpellier, on lui demande ses papiers. Tout va très vite. En quelques heures, Hassan se retrouve sur un bateau au départ de Sète, direction Tanger, dans le nord du Maroc.
«Je narrive pas à my faire», confie Hassan onze mois plus tard, le regard dans le vide. Il serre son blouson de cuir pour se réchauffer, installé dans le jardin, sur une chaise en plastique. Il y fait moins froid que dans la maison. «Cest dur, poursuit-il. Je nai personne ici. Il y a juste mon grand-père, mais il est vieux et il na pas les moyens de soccuper de moi. Et il narrête pas de me dire que je suis nul, que cest ma faute si jai été expulsé». A son retour, Hassan a vécu chez son grand-père dans lest du Maroc, mais plus souvent dans la rue. Lassé, il a mis le cap sur Rabat. Une militante associative lui trouve cette maison et un emploi dans un garage à Temara, petite ville au sud de la capitale. «Et le jour où je vais devoir rendre cette maison ?, se demande sans cesse Hassan. Je suis incapable de payer un loyer avec ce que je gagne. En France au moins, je pourrais gagner ma vie correctement, évoluer. Ici, il y a des gars qui bossent depuis trois ans dans ce garage et ils gagnent toujours 10 dirhams de lheure.» Soit 85 centimes deuros, le smic horaire. Hassan répète encore une fois: «Ils se sont trompés, je nai rien fait dillégal.»