Juifs et Arabes, une cohabitation saccagée

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Casablanca d'antan
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samedi 18 octobre 2008 - 07h:26

Joseph Algazy - Le Monde Diplomatique

Les troubles de Saint-Jean-d’Acre ne représentent pas, hélas, un phénomène isolé. Le risque est grand qu’ils se reproduisent, ici mais aussi dans d’autres villes mixtes à forte minorité arabe, comme Jaffa, Lod et Ramleh.

D’ordinaire, la semaine de la fête juive des Tabernacles (Soukot) constitue un événement dans la ville mixte - judéo-arabe - de Saint-Jean-d’Acre, dite ici Acco : pleine à craquer, elle accueille des visiteurs venus de tous les coins du pays, attirés par la beauté des lieux, les anciennes murailles de son fort, le dédale des étroites ruelles de la vieille ville, le souk avec ses boutiques et ses étalages débordant de poissons, de légumes, de fruits et de friandises orientales, le petit port de pêche, les églises et les mosquées, le festival de théâtre annuel, les commerçants charmeurs...

Rien de tel cette année. La ville semble triste et inquiète. Et pour cause : elle sort de graves troubles intercommunautaires, qui ont éclaté la nuit de Kippour, le jour du grand Pardon (8 octobre) et ont duré trois jours. Tout a commencé lorsque Toufiq el-Jdamal, un citoyen arabe accompagné de son fils, a décidé, vers minuit, de ramener en voiture à la maison sa fille, qui se trouvait chez des proches dans le quartier populaire à l’Est de la ville où vivent Juifs et Arabes de catégories modestes.

Il faut savoir que, depuis des années, une coutume sinistre s’est imposée dans le pays : tout véhicule, ambulance comprise, circulant le jour de Kippour risque d’être attaqué à coups de pierres. Chauffeur, médecin, infirmier, malade, chacun peut en être victime. C’est exactement ce qui s’est produit le 8 octobre : une foule excitée a attaqué le chauffeur et son fils, qui ont échappé au lynchage par miracle - un Juif chargé de surveiller une maison en construction a caché le père, des agents de police ont réussi à faire fuir le fils.

L’affaire ne s’est pas arrêtée là. Trois jours durant, des maisons arabes du quartier ont été saccagées, et leurs habitants attaqués. Seize familles arabes ont dû fuir : elles ont trouvé refuge dans un hôtel, dans des monastères de l’ancienne ville et chez des proches. Certaines de leurs demeures ont été pillées, et l’une d’elles incendiée. Des voitures ont été détruites. Plus tard, des femmes et des enfants qui tentaient de repasser chez eux pour récupérer des vêtements ont été molestés.

A l’annonce de l’attaque de la première nuit, et sur la foi d’une rumeur parlant (à tort) d’un mort, de jeunes Arabes sont accourus sur les lieux. Ils se sont livrés à des violences qui n’ont toutefois pas fait de blessés graves. Certains ont assouvi leur colère et se sont vengés en fracassant des vitrines de magasins juifs du centre-ville.

On a reproché aux forces de l’ordre d’avoir laissé faire les émeutiers au début des troubles. Rien de surprenant : la police et l’armée ont tendance à ne pas intervenir quand des Arabes sont attaqués. Courante en Israël même, cette pratique l’est a fortiori dans les territoires palestiniens occupés lorsque des colons attaquent des Palestiniens.

Police et médias ont répliqué en accusant Toufiq el-Jdamal d’avoir mis le feu aux poudres. Ses propos à la séance de la commission des affaires internes du Parlement, la Knesset, lui ont pourtant valu la considération des Juifs comme des Arabes. « Si je suis vraiment la cause des troubles à Saint-Jean-d’Acre, a-t-il déclaré, je suis prêt, afin de calmer les esprits, à ce qu’on me coupe la gorge. » Devant la mobilisation des députés d’extrême droite, la police l’a arrêté et a monté de toutes pièces un dossier contre lui : elle avait trouvé un bouc émissaire. Avec lui, elle a raflé aussi quarante personnes, Juifs et Arabes, suspectes d’avoir participé aux émeutes.

« Une ligne de démarcation virtuelle »

Plusieurs responsables de la communauté arabe se sont alors réunis et ont lancé un appel à la population juive de la ville. Ils ont rappelé que, depuis toujours, les citoyens arabes respectent les sentiments religieux de leurs compatriotes juifs. C’est pourquoi ils ont critiqué le chauffeur qui avait conduit sa voiture au cours de la nuit de Kippour. Ils ont condamné les jeunes Arabes qui ont causé des dégâts en ville, mais aussi les attaques contre des habitants arabes innocents, les vexations qui leur ont été infligées et la destruction de leurs biens. Dans leur texte, ils se sont toutefois abstenus d’utiliser le terme « pogrom », employé par certains, afin de ne pas verser d’huile sur le feu.

Lorsque je suis arrivé à Saint-Jean-d’Acre, le 15 octobre, il y avait très peu de voyageurs dans le train. A la sortie de la gare, les chauffeurs de taxi arabes s’inquiétaient de cette pénurie de clients. Certains criaient : « Soyez les bienvenus, vous allez apporter avec vous la paix ! » Celui qui me conduisait au « square du canon », où des jeunes du mouvement de jeunesse Hashomer Hatzaïr avaient érigé une « tente de l’amitié » (le Parti communiste, lui aussi, en a monté une), m’a confié : « Le drame de Kippour a tracé ici une ligne de démarcation virtuelle, qui sépare désormais les deux parties de la ville. Si tu vas dans les quartiers de l’Est, tu ne rencontreras pas un seul Arabe. Et si tu te balades dans la vieille ville, c’est à peine si tu verras des Juifs. D’habitude, durant les jours de la fête de Soukot, plein de Juifs visitent l’ancienne cité. Cette année, nous tous payons cher les troubles qui ont sévi ici. Et la décision de la mairie d’annuler le festival annuel de théâtre a aggravé notre situation. Ne t’étonne pas de rencontrer beaucoup de policiers. Malheureusement, ceux-ci sont intervenus trop tard. »

Saint-Jean-d’Acre compte 52 000 habitants. C’est une ville pauvre. A en croire les statistiques officielles, 8 % de la population active souffre du chômage. Et le revenu moyen par habitant est inférieur de 16 % à la moyenne nationale (il faut dire que près de la moitié des salariés atteignent à peine le salaire minimum). L’extrême droite juive canalise d’une manière démagogique le mécontentement et la frustration des couches juives démunies vers la haine et la violence contre les Arabes. Désormais fréquent, le slogan « Mort aux Arabes ! » a souvent retenti durant les émeutes de Saint-Jean-d’Acre - même la télévision s’en est faite l’écho.

La situation des 28 % d’habitants arabes est pire encore, en particulier pour ceux qui habitent la vieille ville, où sévissent misère, détresse et insalubrité. Plusieurs familles vivent (si cela s’appelle vivre) dans des maisons qui menacent de s’effondrer. Connaissant depuis longtemps les conditions de vie des habitants de l’ancienne ville, je peux témoigner qu’elles n’ont cessé d’empirer.

Si les responsables arabes ont tenté de calmer le jeu, cela n’a pas toujours été le cas du côté juif extrémiste. Les médias et Internet ont relayé des appels exhortant au boycottage des commerçants arabes. L’extrême droite, à l’approche des élections municipales prévues le 11 novembre, a exigé et obtenu du maire, Shimon Lankri, l’annulation du festival annuel de théâtre. Plusieurs personnalités juives et arabes ont d’ailleurs condamné cette décision, et des artistes, refusant de s’y plier, ont organisé des activités artistiques alternatives.

« Acco, c’est Eretz-Israël dans dix ans »

Les troubles de Saint-Jean-d’Acre ne représentent pas, hélas, un phénomène isolé. Le risque est grand qu’ils se reproduisent, ici mais aussi dans d’autres villes mixtes à forte minorité arabe, comme Jaffa, Lod et Ramleh. Certains ne se cachent pas de vouloir en provoquer. C’est ainsi que le site d’Arouts 7 (Chaîne 7), l’un des médias les plus virulents de l’extrême droite juive en Israël, citait le 11 octobre Yossef Stern, le rabbin de la yeshiva (école religieuse) du quartier Est où les violences ont éclaté.

.....
 
« J’ai réuni la yeshiva, racontait-il. Nous sommes sortis dans les rues. Nous avons fait descendre les gens dans les rues, bien qu’il se soit agi du jour de Kippour et qu’on jeûne, car il fallait renforcer le peuple d’Israël et élever son moral. Acco est un lieu d’épreuve. Acco, c’est Eretz-Israël dans dix ans. Ce qui se passe à Acco aujourd’hui, c’est ce qui se passera alors en Israël. Nous sommes le front qui fait honneur à l’Etat. La coexistence n’est qu’un slogan : Acco est comme d’autres villes en Israël, il faut sauvegarder son identité juive. Nous sommes ici pour sauvegarder l’identité juive. Dans le quartier, des maisons étaient mises en vente. La situation suivante se présentait : soit des Arabes achetaient ces maisons, soit des étudiants de la yeshiva les achetaient. Grâce à Dieu, récemment, trente familles des nôtres sont venues habiter ici. Aujourd’hui, nous construisons une nouvelle grande yeshiva et aussi un quartier destiné à des militaires de carrière. »

Le but déclaré de cette yeshiva, créée en 2003, c’est donc bien de « judaïser » Saint-Jean-d’Acre. Ce faisant, les extrémistes juifs omettent, de fait, l’histoire de ces quartiers Est. Jusqu’en 1948, les terres sur lesquelles ces derniers furent bâtis dans les années 1950 appartenaient à un village palestinien nommé Al-Manshiyé, appelé aussi Manshiyet-Acca. Depuis la Nakba de 1948, cette bourgade a disparu et ses habitants ont trouvé refuge à Saint-Jean-d’Acre, dans certains villages voisins et, pour beaucoup d’entre eux, au Liban. Les descendants d’anciennes familles d’Al-Manshiyé possèdent même des documents prouvant que leurs terres étaient enregistrées au cadastre. C’est dire si les troubles ont ravivé chez les Arabes de la ville de douloureux souvenirs d’un passé pas si lointain.

Joseph Algazy est journaliste à Tel-Aviv.
 
Juifs et Arabes?
Soit:juifs et musulman
sinon
Israelien et palestenien
le titre est deja désequilibré!!!!

Sinon,concernant l'evenement,c'etait calculé par les colons juifs extremistes,ils cherchent le petit pretexte afin qu'ils chassent les palesteniens et occupent les biens de ces derniers
Comme à l'epoque de Vichy!!!!!
 
Juifs et Arabes?
Soit:juifs et musulman
sinon
Israelien et palestenien
le titre est deja désequilibré!!!!

Sinon,concernant l'evenement,c'etait calculé par les colons juifs extremistes,ils cherchent le petit pretexte afin qu'ils chassent les palesteniens et occupent les biens de ces derniers
Comme à l'epoque de Vichy!!!!!

Letranger : Je suis là !!!!!
 
Juifs et Arabes?
Soit:juifs et musulman
sinon
Israelien et palestenien
le titre est deja désequilibré!!!!

Sinon,concernant l'evenement,c'etait calculé par les colons juifs extremistes,ils cherchent le petit pretexte afin qu'ils chassent les palesteniens et occupent les biens de ces derniers
Comme à l'epoque de Vichy!!!!!
israelien et palestinien n aurait pas été aussi équilibré parce que je pense qu'ils sont israeliens ces 'palestiniens' non?

:rolleyes:

ceci dit pour le titre c'est que les médias en tendance à utiliser depuis bel lurette on se demande bien pourquoi :D
 
israelien et palestinien n aurait pas été aussi équilibré parce que je pense qu'ils sont israeliens ces 'palestiniens' non?

:rolleyes:

ceci dit pour le titre c'est que les médias en tendance à utiliser depuis bel lurette on se demande bien pourquoi :D

Comme à l'epoque coloniale:on disait souvent La france et les musulmans ou les arabes,
c'est à dire,le marocain,l'algerien ou le tunisien n'existent pas
et on se pose des questions pourquoi ils ont sifflé la marseillaise!!!!!
 
[Après les événements d¹Akko, où Juifs et Arabes de la ville se sont affrontés. La responsabilité d¹une majorité envers une minorité]

La majorité juive se sent comme l¹agneau sacrificiel Tzvia Grinfeld (1)

Traduction : Gérard pour La Paix Maintenant


Huit années ont passé depuis que 12 citoyens israéliens, tous arabes (ainsi qu¹un habitant des territoires occupés) ont été tués par la police israélienne. A la lumière des récents événements d¹Akko, il semble que nous n¹ayons pas appris grand-chose.

Fondamentalement, ce qui a conduit à cette tuerie tient à un état d¹esprit qui ne doit jamais être légitimé dans une démocratie, celui qui dit que des forces gouvernementales peuvent tirer sur des citoyens. L¹Etat appartient à ses citoyens et non au gouvernement. L¹Etat n¹est là que pour s¹occuper du bien commun. Seul un danger mortel peut justifier une réaction d¹une même gravité. L¹indifférence de l¹opinion à la mort de ces citoyens, il y a huit ans, et le harcèlement des habitants arabes d¹Akko aujourd¹hui, révèle donc un autre échec, plus profond : l¹attitude très rude à l¹égard de la minorité arabe, niée ou refoulée par la plus grande partie de l¹opinion juive qui, sûre de son bon droit, se considère comme la partie menacée.

Dans la société israélienne, trop de gens ne perçoivent pas le réel rapport de forces dans le pays et refusent de comprendre que les Juifs ne sont pas une minorité parmi d¹autres, persécutée et méritant une protection particulière, mais bien une majorité nombreuse et souveraine qui est responsable de sa minorité.

L¹une des difficultés particulières à la société israélienne tient à l¹idée communément admise selon laquelle rien de fondamental n¹a changé depuis 60 ans et que la majorité juive est toujours un agneau sacrificiel. Le grand rabbin d¹Akko, par exemple, a déclaré aux médias que les émeutes rappelaient celles contre les Juifs en Allemagne.

Le peuple juif aspirait à la souveraineté. Il l¹a acquise. Mais la souveraineté, dans un monde démocratique, signifie assumer la responsabilité des affaires sociales, économiques et culturelles et les gérer le mieux et de la manière la plus juste possible pour le bien de tous les citoyens. Non au bénéfice des plus forts ou des dirigeants et de leurs proches, ou pour la seule synagogue, mais pour tous.

Il est vrai que cet idéal politique est difficile à atteindre. Israël, comme la plupart des pays d¹aujourd¹hui, est non seulement hétérogène et multiculturel, mais aussi multinational. Non que sa politique d¹immigration soit particulièrement libérale ou ouverte, mais parce qu¹il inclut une importante minorité palestinienne. Pour cette seule raison, Israël devra vivre en démocratie avec des relations majorité - minorité complexes, souvent très chargées, que ce soit à cause des tentatives de l¹un et de l¹autre des groupes de se définir comme opposé à l¹autre, ou à cause de l¹animosité quasi normale de la minorité envers un Etat dirigé par des membres de la majorité. Bien sûr, le conflit historique sanglant entre Juifs et Palestiniens et la perpétuation de l¹occupation fait empirer les choses.
Et quand nous ajoutons, non seulement l¹occupation et l¹histoire insupportable des maux que se sont infligés mutuellement ces deux grands groupes nationaux et religieux, mais encore la discrimination contre la minorité par la majorité, les solutions sont encore plus difficiles à trouver.

Et pourtant, il est important de garder à l¹esprit que des situations extrêmement tendues existent entre majorités et minorités dans bien d¹autres endroits. Les Canadiens francophones du Québec ont voulu pendant des années faire sécession du Canada et créer leur propre Etat indépendant. Un nombre très important de latinos du sud des Etats-Unis exige que l¹espagnol soit reconnu comme une langue nationale. Sans parler des tensions entre Flamands et Wallons et Belgique ou de la minorité kurde en Turquie.

On peut supposer que, dans des sociétés multinationales et multiculturelles, des tensions éclateront de temps en temps et que des individus sans scrupule feront en sorte de monter les uns contre les autres. Sans vouloir sous-estimer la gravité de ces actions, une démocratie saine doit apprendre à traiter ce genre de heurts localisés avec détermination et doigté. Pour que ce faire, il y a une condition absolument essentielle : la majorité doit reconnaître sa responsabilité envers la minorité et assumer la tâche de la réconciliation et de la retenue. Si la majorité ne se reconnaît pas ce rôle, ou même le dénie, alors, malheureusement, il faudra craindre de sérieux ennuis.
 
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