Fondée en 2008 par et pour des personnes transgenres, le centre d’études islamiques Al-Fatah, à Yogyakarta, sur l’île de Java, résiste depuis des années. Un combat face à la haine des islamistes, aux préjugés contre les LGBTQ, aux discriminations administratives et plus récemment contre la précarité économique.
Ce jour-là, deux feuilles de papier jauni notifiant le rejet des transgenres par le fiqh, le droit musulman, étaient affichées sur le mur d’enceinte du bâtiment principal de la pesantren, centre d’études islamiques dans la tradition soufie indonésienne, Al-Fatah, à Kotagede, la vieille ville de Yogyakarta. Une pesantren transgenre. La lettre, datée du 9 février 2016, envoyée par le Front du djihad islamique local (FJI), sommait les musulmans de refuser toute forme de légalisation des LGBT.Pour la chef de la pesantren, Shinta Ratri, personne transgenre, et soixante de ses étudiantes, cette lettre a provoqué un profond traumatisme. Le 16 février 2016, des membres du FJI et de la police apposaient des scellés sur cette institution islamique. Forçant la pesantren à fermer pendant trois mois.
Dans une atmosphère de terreur, les étudiantes transgenres pratiquaient en secret. Certaines se sont fait couper les cheveux courts pour éviter d’être reconnues. Elles craignaient d’être attaquées dans la rue. Shinta se souvient :
Ce 20 novembre 2021, elle a accroché cette lettre datant de 2016 au milieu de l’exposition photo, commémorant la Journée du souvenir trans. Une journée en mémoire des personnes transgenres tuées dans le monde à cause des phobies et de la haine. Shinta explique :Il a été difficile de les convaincre de revenir à Al-Fatah. Elles avaient peur.”
Cette exposition documente toutes les activités de notre centre afin de montrer au public qu’Al-Fatah a survécu à une série de discriminations et d’atteintes à la liberté de culte.”
Un réseau de soutien)
Depuis 2019, les étudiantes et les enseignantes de cette pesantren transgenre cherchent un soutien dans divers cercles pour trouver des alliés face à la haine. Elles ont rencontré Sinta Nuriyah, l’épouse de l’ancien président Abdurrahman Wahid, alias Gus Dur [le premier président élu démocratiquement, en 1999, après la chute de la dictature], ainsi qu’une personnalité du conseil d’administration du Nahdlatul Ulama [la plus grande organisation musulmane d’Indonésie, de tradition soufie], Kiai Imam Aziz, et d’autres leaders religieux progressistes.Selon Shinta, ces rencontres ont eu le mérite de dissiper l’idée que la communauté transgenre était fermée sur elle-même et ne voulait pas dialoguer.
La pesantren coopère également avec Fatayat, l’organisation des femmes du Nahdlatul Ulama. Elle a envoyé 36 enseignantes bénévoles depuis 2019.
Présidente de Fatayat pour la région de Yogyakarta, Khotimatul Husna déplore les préjugés, la haine et l’hostilité envers les personnes transgenres et plus généralement différentes :
Les personnes transgenres sont des créatures de Dieu qui ont pour tâche de servir l’humanité et d’être les
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Genre. L’admirable résistance du centre d’études islamiques transgenre en Indonésie
Fondée en 2008 par et pour des personnes transgenres, le centre d’études islamiques Al-Fatah, à Yogyakarta, sur l’île de Java, résiste depuis des années. Un combat face à la haine des islamistes, aux préjugés contre les LGBTQ, aux discriminations administratives et plus récemment contre la
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