Le jeûne est un acte d'adoration et d'élévation spirituelle, non une simple habitude ou une privation menant à la perdition

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Drianke

اللهم إفتح لنا أبواب الخير وأرزقنا من حيت لا نحتسب
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D'après Abou Hourayrah (qu'Allah l'agréé), le Messager d'Allah ﷺ a dit :



« Le jeûne ne consiste pas seulement à s'abstenir de manger et de boire, mais aussi à se détourner des paroles futiles et des comportements indécents. Si quelqu'un t'insulte ou agit avec ignorance à ton égard, dis-lui : "Je jeûne, je jeûne". »

Rapporté par Al-Hakim dans Al-Moustabak (N°1571)

et authentifié selon les critères de Boukhari et Mouslim,

avec l'approbation d'ADH-DHAHABI



Le jeûne ne se réduit pas à une prescription ancienne imposée aux peuples d'autrefois ; il constitue une discipline spirituelle et morale complète. Bien au-delà de l'abstention de nourriture, de boisson et de désirs, il engage l'âme dans un processus de purification, affine la lucidité de l'esprit et façonne un comportement empreint de noblesse, tant envers soi-même qu'envers autrui.



Ce hadith prophétique, qui exhorte le jeûneur à contenir sa colère et à s'éloigner des conflits, met l'humanité face à une épreuve concrète : celle de la maîtrise des émotions. Cette exigence s'applique non seulement à l'échelle individuelle, mais aussi à la société toute entière, jusqu'aux relations internationales où les dirigeants sont eux-mêmes appelés à faire preuve de retenue et de sagesse.



En réalité, bien des personnes considèrent le jeûne comme une contrainte physique ou une simple tradition sociale, négligeant ainsi son essence véritable, qui repose sur la patience et la discipline. Lorsqu'un individu est éprouvé par la faim ou la fatigue, il devient naturellement plus enclin à l'irritation et à l'emportement. Or, le jeûne lui enseigne à affronter ces états sans perdre son équilibre intérieur. C’est en cela que réside sa valeur en tant qu’instrument de purification de l’âme : il impose à l’individu des restrictions qui ne sont pas dictées par un contrôle extérieur, mais par une prise de conscience intime de la nécessité d’une conduite disciplinée.



Il y a plus de quinze siècles, dans ce hadith prophétique, le Messager d’Allah ﷺ ne s’est pas contenté d’ordonner l’abstention des comportements blâmables, mais il a également tracé une méthodologie claire pour faire face aux situations provoquant la colère. Il n’a pas seulement interdit al-rafath (les propos obscènes) et al-jahl (les actes d’imprudence et d’ignorance), mais il a aussi proposé une solution concrète : dire "Je jeûne". C’est là que réside la sagesse sublime de l’orientation prophétique, car cette expression n’est pas une simple déclaration d’état, mais une stratégie psychologique efficace.
 
Lorsqu’un jeûneur est confronté à une situation où l’on cherche à l’irriter, le fait de dire "Je jeûne" lui rappelle d’abord qu’il est en état d’adoration, ce qui réoriente immédiatement son esprit vers la patience et la maîtrise de soi. Dans le même temps, cette parole envoie un message à son interlocuteur, lui signifiant qu’il est résolu à contenir ses réactions, ce qui peut dissuader ce dernier de toute escalade dans la tension. Répéter cette phrase "Je jeûne, je jeûne" n’est pas une simple redondance, mais une affirmation consciente du devoir de lucidité et de la nécessité impérieuse de contrôler ses émotions spontanées.


Dans un monde où les tensions se sont accrues et où le rythme de vie est plus effréné que jamais, nous sommes sans cesse exposés à des situations qui peuvent engendrer du stress et susciter des réactions impulsives.


Que ce soit au travail, sur la route ou dans les interactions les plus simples du quotidien, nous nous trouvons fréquemment face à des circonstances qui mettent à l’épreuve notre patience. Les altercations ne sont plus rares, et les réactions colériques sont devenues monnaie courante, tant dans la réalité que dans l’univers virtuel, où une discussion banale peut, en un instant, dégénérer en un débat houleux.

Prenons l’exemple des réseaux sociaux : une simple remarque anodine peut rapidement dégénérer en une polémique enflammée, conduisant parfois à la rupture des liens d’amitié. Dans le monde du travail, la pression des tâches accumulées peut attiser les tensions entre collègues ou détériorer la relation entre un employé et son supérieur. Même dans la rue, un instant de colère au volant peut mener à un geste irréfléchi dont on regrettera ensuite, amèrement, les conséquences.

Dans un tel climat, où les tensions sont omniprésentes, cultiver la patience et la pondération devient une nécessité impérieuse et non une simple vertu morale. Les enseignements prophétiques qui exhortent à la maîtrise de soi, à la rétention de la colère et au pardon ne sont pas de simples conseils théoriques ; ils constituent de véritables remèdes pratiques pour préserver l’équilibre psychologique et social. Celui qui domine sa colère ne se protège pas seulement des conséquences de décisions impulsives, mais il préserve aussi ses relations et s’offre une vie plus apaisée et harmonieuse.
 
D’un autre côté, si l’on observe les comportements des gens durant le mois de Ramadhan, on y découvre un paradoxe frappant : d’un côté, une atmosphère spirituelle emplie de ferveur et un engouement pour l’adoration, mais de l’autre, une recrudescence de l’irritabilité et des altercations, comme si le jeûne était devenu un prétexte à l’exaspération plutôt qu’un moyen d’élévation morale. Cela révèle une problématique plus profonde : nombre de ceux qui s’abstiennent de nourriture et de boisson ne s’abstiennent pas pour autant des comportements blâmables. Une question fondamentale se pose alors : le jeûne remplit-il réellement son rôle dans la maîtrise de soi, ou bien n’est-il devenu qu’une habitude annuelle dont l’effet s’estompe sitôt le mois sacré achevé?



Il est donc essentiel de revoir notre perception du jeûne : il ne s’agit pas d’un acte temporaire qui s’éteint avec la fin du mois béni, mais d’un entraînement spirituel destiné à façonner notre vie entière, dès l’enfance en général, et plus particulièrement dès l’âge de la puberté. Celui qui parvient à discipliner son âme dans un état de vulnérabilité physique – marqué par la faim et la soif – devient plus apte à exercer cette même maîtrise sur lui-même tout au long de l’année.



L’islam établit une parfaite harmonie entre les actes cultuels et leurs objectifs éducatifs : la prière éloigne de la turpitude et du blâmable, la zakât inculque le sens des responsabilités sociales, le pèlerinage enseigne la discipline et le dépouillement de l’égoïsme. Quant au jeûne, il est une école de volonté, une épreuve de patience et un véritable laboratoire où l’on apprend à interagir avec autrui sous l’effet de la contrainte et de la pression.



Pour que le jeûne ait un impact réel sur le comportement du croyant, il doit être empreint d’une conscience profonde. Loin d’être une simple obligation rituelle, il doit être appréhendé comme une expérience qui enseigne au fidèle à être plus serein, plus sage et plus apte à vivre en harmonie avec les autres, sans sombrer dans des querelles vaines et nuisibles.
 
Cette compréhension éclairée est ce qui nous élève du simple jeûne physique vers un jeûne des attitudes et des comportements contraires aux véritables valeurs de l’islam.



Lorsque cette conscience devient collective, l’effet du jeûne dépasse la sphère individuelle pour s’étendre à l’ensemble de la société, instaurant ainsi un véritable projet de réforme sociale. Imaginez une communauté où chacun fait preuve de patience, maîtrise ses émotions et répond aux provocations par la douceur et la tolérance. Quel en serait l’impact ? Quel niveau de respect mutuel s’établirait alors entre les individus ?



Pour parvenir à cet idéal, un effort conscient doit être déployé afin d’ancrer ces valeurs, que ce soit à travers l’éducation familiale ou une sensibilisation plus large par le biais des médias et des prêches religieux. Si le mois de Ramadhan cesse d’être un simple moment de privation formelle pour devenir un temps de redressement spirituel et de réforme intérieure, son influence se prolongera bien au-delàs, et nous pourrons alors observer un véritable changement dans les interactions humaines, tant dans le monde réel que dans l’univers virtuel.





*Article paru dans le n°57 de notre magazine Iqra.
 
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