L'Angola, ravagé par 40 ans de conflit, se reconstruit à une vitesse foudroyante. Et, pour la jeunesse urbaine, cette renaissance a une bande-son : le kuduro, un genre de musique et de danse omniprésent à Luanda. Le rythme est rapide, syncopé, comme l'est celui des musiques traditionnelles. Loin des tam-tams, il est conçu sur des ordinateurs.
C'est au milieu des années 1990 que Tony Amado, un jeune chanteur de Luanda, la capitale angolaise, décide d'imiter les musiques de groupes de "dance" comme Reel 2 Real, notamment leur hit "I Like to Move It", qui cartonne dans le monde entier. Le résultat est en décalage complet avec les sonorités angolaises de l'époque. Finies les guitares et les mélodies du semba, cette musique angolaise née dans les années 1950 du mélange de la musique locale traditionnelle et de la guitare portugaise. Mais si le kuduro ne s'inscrit pas dans la lignée musicale du semba, d'un point de vue social, il en est l'héritier. Il porte aujourd'hui la voix révoltée du musseque (favela), de la même façon que le semba portait celle des bairros indigenas (quartiers ghettos angolais) durant l'occupation portugaise.
"En fait, Amado, considéré comme le créateur du kuduro, a simplement voulu faire une techno angolaise, recréer les rythmes traditionnels des musiques de carnaval en utilisant l'ordinateur et les boîtes à rythmes", précise Benjamin Lebrave, créateur du label Akwaaba Music (www.akwaabamusic.com), qui sort aujourd'hui une compilation dédiée au kuduro angolais, Akwaaba Sem Transporte (disponible sur iTunes).
Le son de Tony Amado est frénétique, rapide et saccadé. Il baptise cette nouvelle musique kuduro, transformation à peine déguisée de "cu duro", "*** dur" en portugais. Le "k" donne au mot une résonance kimbundu, une des principales langues d'Angola. Mais l'orthographe ne suffit pas à échapper aux foudres de la censure. Le kuduro commence donc son évolution dans l'ombre des scènes établies, dans les rues des musseques, ces quartiers pauvres où des millions d'Angolais sont venus fuir la guerre.
A l'image d'autres styles musicaux africains actuels, le kuduro s'inspire de musiques occidentales. Partout en Afrique, les jeunes écoutent de la "black music" américaine, de la pop européenne, mais aussi du reggae, de la salsa, du calypso. En mélangeant ces influences au terroir musical local, une nouvelle génération d'artistes a ainsi créé le hiplife au Ghana, réinventé le hip-hop au Mali ou au Sénégal... Mais dans le cas du kuduro, l'inspiration est différente. "Le kuduro sort du lot car il est purement électronique, analyse Benjamin Lebrave. A la différence du coupé-décalé ou de la musique congolaise, pourtant conçus sur les mêmes machines, il se rapproche des transes percussives traditionnelles, dans une version modernisée et formatée par l'ordinateur."
A ses origines, le kuduro est essentiellement instrumental, les paroles répétées forment des onomatopées scandées pouvant mener à la transe. On ne l'entend ni à la radio ni à la télé, car, tout comme le rap à ses débuts, il est considéré comme une musique des marges et de la délinquance. Mais à la fin des années 1990, plusieurs MC's angolais commencent à rapper de vrais textes sur des instrumentaux kuduro. Puto Prata, Bruno M, puis Os Lambas sont à l'origine de ce revirement soudain.
Au-delà des messages et de la musique, le kuduro est une danse frénétique sans équivalent en Afrique. Le geste est désarticulé, convulsif. Chaque "kuduriste" est accompagné d'une armada de gamins danseurs, les bailarinos, qui rivalisent de rapidité et de fluidité. En fait, le kuduro évoque plutôt le baile funk brésilien, autre forme de réappropriation de la musique occidentale. Comme ce dernier, le kuduro tarde à être accepté en Angola. Cela ne fait que trois ans que le gouvernement angolais le tolère à la télévision et à la radio. Pourtant, aujourd'hui, il domine : pas un concert sans "kuduristes", pas une émission musicale sans clips de kuduro
C'est au milieu des années 1990 que Tony Amado, un jeune chanteur de Luanda, la capitale angolaise, décide d'imiter les musiques de groupes de "dance" comme Reel 2 Real, notamment leur hit "I Like to Move It", qui cartonne dans le monde entier. Le résultat est en décalage complet avec les sonorités angolaises de l'époque. Finies les guitares et les mélodies du semba, cette musique angolaise née dans les années 1950 du mélange de la musique locale traditionnelle et de la guitare portugaise. Mais si le kuduro ne s'inscrit pas dans la lignée musicale du semba, d'un point de vue social, il en est l'héritier. Il porte aujourd'hui la voix révoltée du musseque (favela), de la même façon que le semba portait celle des bairros indigenas (quartiers ghettos angolais) durant l'occupation portugaise.
"En fait, Amado, considéré comme le créateur du kuduro, a simplement voulu faire une techno angolaise, recréer les rythmes traditionnels des musiques de carnaval en utilisant l'ordinateur et les boîtes à rythmes", précise Benjamin Lebrave, créateur du label Akwaaba Music (www.akwaabamusic.com), qui sort aujourd'hui une compilation dédiée au kuduro angolais, Akwaaba Sem Transporte (disponible sur iTunes).
Le son de Tony Amado est frénétique, rapide et saccadé. Il baptise cette nouvelle musique kuduro, transformation à peine déguisée de "cu duro", "*** dur" en portugais. Le "k" donne au mot une résonance kimbundu, une des principales langues d'Angola. Mais l'orthographe ne suffit pas à échapper aux foudres de la censure. Le kuduro commence donc son évolution dans l'ombre des scènes établies, dans les rues des musseques, ces quartiers pauvres où des millions d'Angolais sont venus fuir la guerre.
A l'image d'autres styles musicaux africains actuels, le kuduro s'inspire de musiques occidentales. Partout en Afrique, les jeunes écoutent de la "black music" américaine, de la pop européenne, mais aussi du reggae, de la salsa, du calypso. En mélangeant ces influences au terroir musical local, une nouvelle génération d'artistes a ainsi créé le hiplife au Ghana, réinventé le hip-hop au Mali ou au Sénégal... Mais dans le cas du kuduro, l'inspiration est différente. "Le kuduro sort du lot car il est purement électronique, analyse Benjamin Lebrave. A la différence du coupé-décalé ou de la musique congolaise, pourtant conçus sur les mêmes machines, il se rapproche des transes percussives traditionnelles, dans une version modernisée et formatée par l'ordinateur."
A ses origines, le kuduro est essentiellement instrumental, les paroles répétées forment des onomatopées scandées pouvant mener à la transe. On ne l'entend ni à la radio ni à la télé, car, tout comme le rap à ses débuts, il est considéré comme une musique des marges et de la délinquance. Mais à la fin des années 1990, plusieurs MC's angolais commencent à rapper de vrais textes sur des instrumentaux kuduro. Puto Prata, Bruno M, puis Os Lambas sont à l'origine de ce revirement soudain.
Au-delà des messages et de la musique, le kuduro est une danse frénétique sans équivalent en Afrique. Le geste est désarticulé, convulsif. Chaque "kuduriste" est accompagné d'une armada de gamins danseurs, les bailarinos, qui rivalisent de rapidité et de fluidité. En fait, le kuduro évoque plutôt le baile funk brésilien, autre forme de réappropriation de la musique occidentale. Comme ce dernier, le kuduro tarde à être accepté en Angola. Cela ne fait que trois ans que le gouvernement angolais le tolère à la télévision et à la radio. Pourtant, aujourd'hui, il domine : pas un concert sans "kuduristes", pas une émission musicale sans clips de kuduro