Souad Elmallem, passerelle de l'industrie aéronautique entre le Canada et le Maroc
Marocaine de la diaspora nord-américaine, Souad Elmallem a su convaincre ses patrons d'implanter, dans son pays d'origine, la première usine Bombardier du continent africain.
"Je participais en 2006 à l'inauguration de l'usine Bombardier au Mexique. Je me suis dit, pourquoi pas le Maroc?", raconte Souad Elmallem. Alors représentante en chef de la stratégie et développement des affaires internationales pour l'Afrique chez le constructeur d'aéronefs canadien, elle commence à "analyser la faisabilité d'un tel projet et le positionnement stratégique de Bombardier sur l'échiquier industriel aéronautique mondial ainsi que ses chaînes de valeurs", confie-t-elle. En 2008, la Marocaine de la diaspora installée au Québec décide de visiter plusieurs usines à Casablanca. "Je voulais corroborer mon ambition, en l'occurrence passer du sentimental au factuel. Lors de ce voyage, j'ai compris le potentiel incroyable de mon pays et j'ai accéléré sérieusement la cadence en militant à l'intérieur de Bombardier."
La tâche s'avère ardue. "Ce fut un très long chemin miné de beaucoup d'obstacles liés à la méconnaissance du Maroc et de ses capacités en la matière. Un classique pour une entreprise nord-américaine", souligne Souad Elmallem. Petit à petit, la jeune femme avance ses pièces. "Dans un premier temps, il a fallu s’assurer d’ajouter le Maroc comme destination stratégique potentielle dans la stratégie d’industrialisation globale", explique-t-elle. Ensuite, elle doit "convaincre, un à un, les dirigeants de Bombardier", qui ne croyaient pas à l'existence d'usines de classe mondiale au Maroc.
En septembre 2013, à Nouaceur (30 km au Sud de Casablanca), les responsables de Bombardier coupent le ruban de leur première usine du continent africain. Cette graine semée venait enrichir ce qui deviendra le pôle aéronautique de la zone franche Midparc avec, aujourd'hui, quelque 140 entreprises, près de 2 mrds$ de chiffre d'affaires et 17 500 emplois.
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La diaspora a un rôle crucial à jouer"
"La motivation de la Marocaine en moi a été un moteur essentiel qui a pu propulser la simple idée en un projet d'envergure, malgré tous les obstacles, les rejets et l'incrédulité", rappelle-t-elle. "Mon lien étroit avec ce pays a favorisé l'établissement d'un pont solide et efficace entre le Canada et le Maroc. Il a permis de bâtir un réseau solide d'affaires et d'amitié", souligne Souad Elmallem. Elle relève aussi comme atout, "sa connaissance fine et factuelle du pays, rafraîchie régulièrement, pour mettre en valeur la destination Maroc."
Souad Elmallem a décidé de capitaliser sur ce succès, en lançant, en septembre 2015 après avoir quitté Bombardier, la société 6temik. Grâce à une offre de services étoffée, elle accompagne désormais les entreprises nord-américaines dans leur croissance et leur implantation au Maroc en les aidant à définir leur stratégie d'internationalisation, leurs plans d'affaires et leurs dossiers d'investissement. 6temik a déjà finalisé trois projets majeurs dans ce pays (deux autres en cours devraient déboucher dans un an) avec plus d'un millier d'emplois directs créés.
"La diaspora a un rôle crucial à jouer. Elle doit mettre en exergue et à contribution ses compétences, utiliser sa capacité à propulser des initiatives concrètes, adéquates, structurantes et pérennes", affirme-t-elle.