Le Maroc d'aujourd'hui

petitbijou

Casablanca d'antan
VIB
Bonjour

D'un côté on bétonne et on façonne, et de l'autre côté on oublie

Enclavement du monde rural

La route la plus proche à 74 km!

· Des records dans les zones montagneuses et pré sahariennes

· Cas de communes rurales à Chichaoua, Azilal, Taroudant, Errachidia

Plus de 70 km, soit un peu plus qu’un aller-retour Casablanca-Mohammédia. C’est ce que doit parcourir, en moyenne(1), un habitant de la commune rurale d’Aït Haddou Youssef (province de Chichaoua) pour atteindre la route goudronnée la plus proche. Un triste record qui révèle le niveau d’enclavement de certaines régions du pays. Avec tout ce que cela sous-entend comme impacts socioéconomiques sur la population. Cet isolement signifie tout simplement de grandes difficultés pour accéder aux structures de soin, à l’école… Le cas de cette commune n’est pas isolé. D’autres entités rurales se révèlent tout aussi enclavées avec des distances moyennes tournant autour de 60 km. C’est le cas pour des communes à Azilal, Taroudant, Errachidia. C’est ce qui ressort en tout cas d’une analyse publiée dans les Cahiers du Haut commissariat au plan (HCP) et basée sur le recensement général de la population de 2004. Les ruraux parcourent, grosso modo, 4,4 km avant de voir le premier bout de goudron. En revanche, 30% des campagnards sont obligés de parcourir des trajets dépassant cette longueur. Ce qui peut aller jusqu’à 8 km, dans certaines localités. C’est le cas pour les habitants de 15% des communes rurales. Ainsi, on s’en doute, quel que soit le niveau géographique, l’enclavement est beaucoup plus important dans les zones montagneuses ou pré-sahariennes. De fait, ce sont les habitants de la région de Guelmim-Smara qui souffrent le plus de l’isolement. Ils sont obligés de marcher au moins 8 km avant d’atteindre la route la plus proche. Ils sont suivis par les habitants de Souss-Massa-Drâa (7,3 km). Dans les régions de Marrakech-Tensift-Al Haouz, Taza-Al Hoceima-Taounate ou encore Tadla-Azilal, l’on se rapproche un peu de la moyenne nationale, soit 5 km.
En allant un peu plus dans le détail, et par provinces, c’est Assa-Zag qui caracole en tête des zones enclavées. Là, les habitants sont obligés de parcourir en moyenne 50 km pour accéder à la route! En deuxième position, la province de Smara (15 km), suivie des provinces de Ouarzazate, Taroudant, Tantan, Chichaoua et Figuig qui affichent chacune une distance moyenne de 12 km. Ainsi, plus on s’approche des espaces montagneux ou présahariens, plus l’enclavement des populations est important. Ceci concerne les trois composantes de l’Atlas, le Rif et les espaces géographiques longeant la frontière est du pays. Au niveau des communes rurales de ces zones, on enregistre des distances moyennes de 5 à 10 km, voire plus.
La «palme» revient à la commune de Aït Haddou Youssef dans la province de Chichaoua, avec 74 km. Elle est talonnée par Annergui (province d’Azilal): 71 km. Vient ensuite la commune d’Ahl Tifnoute à Taroudant avec 61 km en moyenne. Dans ce triste palmarès on retrouve, bien entendu, des communes parmi les plus pauvres, comme celle de Sidi Ali à Errachidia ou Taouyalt à Taroudant.
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(1) La distance moyenne est calculée à partir des réponses des chefs de ménages lors du RHPH de 2004 à la question sur la distance séparant leurs logements de la route goudronnée la plus proche.

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Les mieux lotis



Les ruraux des zones, dont le relief géographique est dominé par les plaines, sont mieux lotis. L’accessibilité à la route est en tout cas meilleure avec des distances de 2 km. C’est le cas des régions du Gharb-Cherarda-Beni Hssen, de Chaouia-Ouardigha, Doukkala-Abda ou encore de Rabat-Salé-Zemmour-Zaër.

Khadija El HASSANI
 
Pauvreté, analphabétisme,... un lourd tribut

· La précarité s’accentue avec l’isolement

· Les femmes plus touchées

C’EST indéniable. Une bonne infrastructure routière impacte positivement les conditions de vie de la population. Et inversement, l’enclavement contribue à la précarité et la détérioration des indicateurs socioéconomiques des populations concernées. Chiffres à l’appui, une analyse du HCP parue dans le dernier numéro des Cahiers du Plan et basée sur le recensement général de 2004 démontre, en effet, cette corrélation via les indicateurs relatifs à la natalité, la fécondité et la mortalité infantile.
Ainsi par exemple, le taux de mortalité infantile chute de 62,5 à 44,8% en passant des niveaux élevés d’enclavement (tranche de 10 km et plus) à ceux plus bas (moins d’un km).
Mais plus parlants, les niveaux de précarité qui augmentent dans les localités mal desservies par le réseau routier. Ainsi, l’analyse du HCP qui s’appuie sur les données du RGPH de 2004 démontre la relation entre le taux de pauvreté et le niveau d’accessibilité à la route. Le taux de pauvreté qui était, en 2004, de 22% dans le milieu rural, grimpe au fur et à mesure que l’enclavement des localités rurales s’intensifie. Pour les ménages situés à moins d’un km de la route, le taux de pauvreté est de l’ordre de 19%. Il atteint son seuil le plus élevé (32%) dans les zones à fort niveau d’enclavement (10 km et plus pour la route la plus proche). Cette tendance est observée dans toutes les régions du pays avec quelques variations. Les écarts les plus élevés entre zones enclavées et non enclavées sont relevés au niveau de Tadla-Azilal, Guelmim-Smara et l’Oriental.
De même, l’impact sur la scolarité est aussi avéré. Le taux de scolarisation des enfants âgés de 7 à 12 ans, de l’ordre de 69% dans le milieu rural, affiche une tendance baissière nette pour les localités mal desservies par la route. Il passe ainsi à 54% chez les ruraux les plus enclavés contre 77% chez ceux qui le sont moins. Une tendance qui, on s’en doute, est particulièrement accentuée chez les filles. Ainsi, chez les garçons, le taux de scolarisation passe de 81% pour la tranche habitant à moins d’un km de la route à 63 pour celle de 10 km et plus. Chez les filles, il baisse respectivement de 74 à 46%.
Même constat pour l’analphabétisme. De l’ordre de 60% en milieu rural pour les 10 ans et plus, ce taux grimpe avec l’enclavement des populations. Il atteint ainsi 72% chez les populations obligées de parcourir 10 km et plus pour arriver à la route la plus proche contre 53% pour les populations désenclavées. Et c’est sans surprise que, dans ce schéma, l’élément féminin soit le plus défavorisé avec des taux encore plus élevés d’analphabétisme. On relève en effet jusqu’à 84% chez les populations féminines dans les régions les plus enclavées.
En matière d’équipement des logements, le désenclavement joue aussi un rôle dans l’amélioration des conditions de vie. Il en est ainsi de l’accès à l’eau et à l’électricité favorisé par la proximité d’une route.
Il est aussi établi que le réseau routier contribue à la diffusion des moyens de communication et d’information en milieu rural. Ainsi, selon les résultats du RGPH de 2004, la proportion des campagnards disposant d’un téléviseur est de l’ordre de 75% pour ceux résidant à moins d’un km d’une route revêtue. Elle chute à 37% pour la population rurale plus éloignée (10 km et plus).
Même tendance pour le téléphone qu’il soit portable ou fixe. Ainsi, alors que 55% des ruraux dans les localités désenclavées déclarent posséder un portable, ils ne sont que 29% à en disposer dans les localités enclavées. Même tendance baissière pour la ligne téléphonique fixe dont la fréquence en milieu rural est plus faible que celle du portable. Les proportions sont respectivement de 4 à 1%. Plus révélateur encore, l’équipement des foyers en toilettes dont le niveau s’améliore considérablement avec la proximité d’une route. On passe ainsi du simple (34%) à un peu plus du double (72%) entre localités enclavées et celles désenclavées.

K. E. H.
 
Voyage au cœur de la Vallée des pommes

· L’un des hivers les plus durs de la région de Msemrir

· Parcours du combattant pour atteindre 3.000 m d’altitude

«Msemrir: la fin du goudron mais pas le bout du monde»... La phrase ressort comme un refrain auprès des jeunes de ce village berbère perdu du Haut Atlas. Point de ralliement de tous les nomades de la région, cette bourgade vit depuis quelques semaines l’un de ses hivers les plus froids. «Ce mois-ci est exceptionnel, nous connaissons la vague de froid la plus intense. Le thermomètre affiche des fois jusqu’à -7 degrés. A l’aube, la température baisse souvent au-dessous de 10 degrés», témoigne le propriétaire d’une auberge. Pour arriver au village, il faut s’armer de patience. Il a fallu une journée de route depuis Casablanca avant d’accéder à cette bourgade nichée non loin des célèbres Gorges du Dadès. A partir de Marrakech, le voyage devient périlleux. La zone de Tichka, sur la route de Ouarzazate est des plus risquées en ce moment: il a beaucoup neigé la veille et le verglas est omniprésent dans cette route montagneuse tristement célèbre par le nombre élevé d’accidents mortels qu’elle enregistre chaque année. Aux aguets, les automobilistes roulent lentement. «Le moindre coup de frein sur le verglas fait perdre complètement le contrôle du véhicule et entraîne inévitablement vers un gouffre abyssal», témoigne un chauffeur de taxi qui emprunte cette route depuis 1972. La veille, la neige a enregistré 2 à 3 mètres de hauteur autour de Tichka, poursuit-il. Du coup, la route a été bloquée, le temps qu’il faut pour que la niveleuse déblaie le terrain et écarte les blocs de glaces amassés tout au long du parcours. Passé le cap risqué de Tichka, nous voilà enfin à Ouarzazate avant d’embarquer pour Kelâat M’gouna puis Boumalen Dadès avant d’arriver à… Msemrir. En tout et pour tout, plus de 700 km parcourus pour atteindre le village le plus reculé et enclavé de la Vallée du Dadès: celui des Aït Attou Moussa perché à quelque 3.000 mètres d’altitude. Mais avant d’y arriver, c’est à bord d’un fourgon déglingué des années 70, qui fait office de taxi, qu’il a fallu embarquer pour atteindre d’abord Msemrir. L’estafette peinte en vert et blanc n’est autorisée à prendre qu’une douzaine de passagers par voyage, au maximum quinze. Ce jour-là, l’on est plus de trente, entassés les uns sur les autres! Vieillards, bébés, jeunes et autres commerçants ambulants rentrés d’un souk hebdomadaire… tous dans une promiscuité étouffante sur fond de cris de bébés, de sueur et de musique berbère assourdissante. A un moment, deux jeunes Américaines montent à bord. Elles travaillent pour le compte de Peace Corps dans cette région montagneuse. Dès qu’elles s’installent derrière, tout le monde se tourne vers elles. Les plus jeunes des voyageurs, l’air fasciné, tentent de leur parler dans un anglais très approximatif. Il a fallu deux heures et demie à ce taxi peu ordinaire pour parcourir la soixantaine de kilomètres qui sépare Boumalen de Msemrir, tellement la route est sinueuse et les arrêts intempestifs.
Des fois, des villageois n’hésitent pas aàarrêter le conducteur pour lui demander l’heure où des nouvelles d’une connaissance commune. Chose qui paraît normale aux yeux des passagers habitués à ces scènes insolites. Seule consolation à bord, un paysage pittoresque: une chaîne montagneuse couverte de neige, des rochers aux formes et couleurs impressionnantes, des collines, des oueds, des vallées, des pommiers, des chaumières, des grottes, des gîtes… Un décor envoûtant, digne des scènes du Far West. Après quelques secousses et coups de freins, nous voilà enfin à Msemrir. Terminus, tout le monde descend!

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Victime du succès des «stars» entrepreneurs




«Nous sommes des laissés-pour-compte. Des citoyens de seconde zone», lâchent des jeunes de Msemrir. Et à un instituteur d’ajouter: «Nous vivons dans l’un des villages les plus démunis de la région de Ouarzazate. Pour autant, nous ne sommes pas répertoriés zone INDH». Les explications ne se font pas attendre: Une vingtaine d’entrepreneurs (immobilier, BTP, routes, ouvrages d’art…) sont originaires de la région. Du coup, la rumeur selon laquelle les gens de Msemrir ont des affaires prospères partout au Maroc dans le bâtiment a éclipsé les conditions difficiles du village. «Nous sommes victimes du succès de quelques entrepreneurs qui brassent des milliards», explique le tenancier d’un gîte.

A. R.
 
Aït Attou Moussa: C’est encore le Moyen Âge!

· Le degré zéro des infrastructures

· Ni eau, ni routes, ni moyens d’approvisionnement...

Aït Attou Moussa: le paysage est pittoresque, mais la désolation y est sans limite. Perchée à 3.000 mètres d’altitude dans la haute vallée du Dadès, Haut-Atlas, la bourgade des Aït Attou Moussa vit depuis plus de deux semaines dans l’isolement. C’est le dernier douar niché au sommet avant Agoudal, à 80 km au sud d’Imilchil et à plus de 200 km de Ouarzazate dans la Vallée des pommes.
Une région du Maroc profond caractérisée par une extrême indigence. Coupé du monde et immaculé de blanc, ce village au milieu des cimes vit l’un de ses hivers les plus rudes.
Avant d’accéder au douar, il faut s’armer de patience. La piste est barrée au milieu d’un terrain abrupt et enneigé. Il va donc falloir marcher sur la neige, le verglas et la boue avant d’accéder au village. Les pieds gelés s’enfoncent 20 à 30 centimètres dans la neige et, au bout de quelques mètres, la marche devient lourde et pénible. D’autant plus que, avec l’altitude, la respiration s’avère difficile. Il a donc fallu plus de 2 heures 30 de marche avant d’arriver au douar englouti.
Difficile aussi d’aborder les femmes en cours de route. Elles portent toutes des «hendira» appelées aussi «tahendirt»: des étoffes en laine tissées localement avec des rayures verticales. Les rayures et les couleurs diffèrent selon la tribu d’origine. Quant aux hommes, ils portent des costumes communs: des djellabas ou encore des burnous en laine et se coiffent la tête d’un turban ou un bonnet. Mais oser prendre en photo une femme en cours de route est un autre exercice périlleux. «Je vous jetterai des pierres si vous me prenez en photo», répète une quinquagénaire.
Après avoir insisté, une femme exaspérée nous répond en berbère: «S’il le sait, mon mari va me briser les os». Plus loin encore, une autre plus âgée nous lâche: «Pas de photo s’il vous plaît. Sinon mon mari va me répudier». Des réactions qui paraissent a priori insolites. Mais dès que l’on apprend qu’une femme du village a été répudiée simplement parce qu’elle s’est laissée prendre en photo par un touriste français, l’on comprend vite le degré de conservatisme de la région. Même constat chez les jeunes filles «Elles savent très bien que si leur photo paraît dans la presse, personne de la région ne voudra d’elles», explique l’accompagnateur Ce qui en dit long sur un autre type d’enclavement. «C’est clair, pour les hommes de Tilmi et Aït Attou Moussa, il suffit que la photo d’une femme paraisse dans les journaux ou à la télé pour qu’elle soit traitée de tous les noms», explique un guide de montagne.
A l’entrée du village, l’air hirsute, une dizaine d’hommes emmitouflés dans des djellabas s’attellent tant bien que mal à déblayer le terrain. Après les salamalecs coutumiers, ils lâchent: «On ne demande rien, on veut la route. C’est tout!». Heureusement qu’il y a les mules et les femmes, poursuit Benhaddou, l’air sérieux.
Peu à peu, ils n’ont plus rien à dire et la conversation s’interrompt. Même l’accueil des tribus est des plus froids.
A l’instar du climat, l’accueil se veut aussi très froid à l’entrée du village. Le groupe rencontré se montre très peu loquace, distant, voire méfiant. Les autochtones n’ont pas l’habitude d’accueillir des visiteurs, qui plus est sont journalistes cette fois-ci. Certains d’entre eux ne bronchent pas et continuent d’évacuer les amas de neige.
En revanche, dès l’arrivée d’étrangers au village, les enfants jubilent et les suivent de près, pieds nus, les joues roses et le nez dégoulinant.
Les plus petits d’entre eux se mettent à pleurer dès qu’ils voient le zoom d’un appareil photo braqué sur eux. En dépit du froid, ils sont plus que légèrement vêtus. Certains, en bas âge, marchent pieds nus dans la neige et pleurent, tellement ils ont froid. En moyenne, les autochtones des Aït Attou ont 7 à 8 enfants par ménage. Les couples les plus fertiles en ont 14 à 15! Pourtant, la polygamie est inexistante dans la région. La planification familiale ne veut pas dire grand-chose dans ce patelin. «Les pilules affaiblissent nos femmes et les rendent stériles», estime Benhaddou qui a 11 enfants dont l’âge varie entre 1 et 14 ans.
Autre fait surprenant, plusieurs tribus de cette région ont refusé qu’un lycée soit construit à proximité. A les écouter, ils sont convaincus que «l’établissement ne peut que ramener le vice dans la région. Nos filles en sortiront perverties en si peu de temps». Autrement dit, l’on préfère l’abandon scolaire aux études secondaires surtout lorsqu’il s’agit de scolarité de jeunes adolescentes.
Quant aux jeunes garçons, ils se font rares. D’année en année, les villages se vident de leurs jeunes qui partent vers des ciels plus cléments. Ils émigrent à Marrakech, Ouarzazate, Kelaât M’Gouna, Laâyoune, Dakhla... et travaillent généralement en tant que maçons ou main-d’oeuvre dans les chantiers si ce n’est pas des hommes de troupes dans l’armée ou les forces auxiliaires. Autre particularité poignante des Aït Attou Moussa, il faut traverser plus de 200 km dans un terrain impraticable avant de se rendre à l’hôpital provincial de Ouarzazate. Du coup, l’évacuation des femmes pour accouchement en urgence, de nouveaux-nés souffrant d’hypothermie ou de vieux, se solde par un drame. «Souvent, il est trop tard. Les femmes rendent l’âme sur la route ou accouchent d’un mort-né», se désole-t-on. Ce qui fait que l’on privilégie plus la piste des sages femmes.
«L’infirmier de campagne, nous ne l’avons vu qu’une seule fois en deux ans lors d’une opération de vaccination», témoigne Benhaddou.
La population locale demeure extrêmement pauvre et ne dispose pas des infrastructures de base les plus élémentaires. L’état des routes dissuade les plus téméraires de se rendre dans ce coin perdu. Pour subsister, c’est l’autarcie. Le pain nu, le thé très sucré à l’absinthe ou encore la semoule de maïs... sont les plus consommés, faute de mieux. «Des fois, à l’aube, la température peut descendre jusqu’à -10 degrés. «Nous sommes les plus exposés au froid et à la neige et les derniers lotis lorsqu’il s’agit de droits et infrastructures», résume Hssein Benhaddou, quadragénaire et déjà père de 11 enfants. Au fur et à mesure que l’on monte en altitude, les difficultés du terrain deviennent nombreuses et les conditions de vie moyenâgeuses.
Si Msemrir est l’un des douars dont les conditions de vie sont des plus difficiles, Aït Attou Moussa est une bourgade qui vit encore dans l’âge de pierre: de nombreuses familles ne sont pas encore raccordées à l’électricité, le téléphone fixe n’existe pas et le réseau GSM relève de la science fiction. Pas d’eau courante non plus. «On est obligé de boire l’eau de source et celle du fleuve car il est difficile de creuser des puits et le sol est très rocailleux», explique-t-on sur place. Quoi qu’il en soit, le transport et, donc, la route, restent la priorité des priorités.
En attendant, les autochtones vivent 3 à 4 mois par an en hibernation. Impossible de se rendre au souk hebdomadaire le plus proche situé à une trentaine de kilomètres.
L’espoir ici consiste à patienter toute l’année pour se rendre au légendaire moussem d’Imilchil, fin septembre. Une occasion rêvée pour vendre son bétail, s’approvisionner en céréales, fourrages, troquer, s’enquérir des villages lointains et des proches et pourquoi pas... se fiancer. «Les conditions de vie sont beaucoup plus tendres à Imilchil. Si notre village n’est pas aussi connu, quoique plus austère, c’est parce qu’il vit dans l’ombre d’un Imilchil très médiatisé par les touristes», précise le guide du village.
«Pour me rendre à Imilchil à pied ou à dos de mulet, il me faut une journée de marche sur un chemin escarpé. Je pars dès l’aube pour arriver au souk après le coucher du soleil», témoigne Hssein Benhaddou.
 
Les plus chanceux s’y rendent en camion. Ils s’entassent dans et sur la cabine parmi le bétail (chèvres, moutons, mules et vaches). Ici, on n’hésite pas à voyager sur les porte-bagages de fourgons. Faute de moyens de transport, la surcharge devient la règle. Six fourgons seulement sont autorisés à transporter plus de 22.000 habitants depuis Boumalen Dadès à Aït Attou en passant par Msemrir.
Bon an, mal an, «la traversée des montagnes par camion vers Imilchil (80 km) se fait en 6 à 7 heures en moyenne», ajoute le guide de montagne.
Au-delà du grand jour d’Imilchil, la réalité quotidienne est tout autre.
A partir du mois d’octobre, plus question de quitter la tribu: la vague de froid s’intensifie, les orages sont de plus en plus forts, les crues et les pluies abondantes. Mais ce n’est pas le froid qui dérange tant les autochtones, ils s’y sont accommodés au fil des années. C’est plutôt la neige et les crues des oueds. Dans ce village oublié, la vie s’adapte aux caprices de la nature et non l’inverse.
«Ici, nous n’avons que deux saisons par an. Le climat est doux et tempéré l’été. Il est très proche du printemps, mais avec un air glacial dès octobre qui caractérise l’hiver et l’automne», précise Mbarek Abdelmoujoud, à peine la quarantaine, mais le visage déjà buriné. De Msemrir à Tilmi (20 km), le taxi emprunte une piste sinueuse. Passé le cap de Tilmi, le terrain devient impraticable, caillouteux, boueux, accidenté...
Passé le village de Tilmi et à 7 kilomètres des Aït Attou, la piste est barrée. Elle est complètement engloutie et dissuade plus d’un de se rendre au village. «Je n’avance plus d’un centimètre», lâche furieux le conducteur du taxi.

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Sans lumière



«La vallée du Dadès est plus connue à l’international que chez nous», témoigne Mbarek, guide. Casbahs, ksars, vallées, oueds, collines, montagnes, gîtes d’étape... Le paysage rappelle les décors des films du Far-West. Sauf que la zone manque cruellement d’infrastructures touristiques les plus élémentaires pour développer le produit écotourisme. Pis encore, dès qu’il s’agit d’initiatives privées, c’est le black-out total.
En témoigne l’investissement de Hazi Saïd, un MRE de 63 ans rentré de Paris. «J’ai mis toutes mes économies dans ce gîte, plus de 1 million de DH», explique le MRE désabusé. Mais l’auberge de 6 chambres ne fonctionne pas encore. Pourtant, Hazi a eu toutes les autorisations. Son gîte baptisé Ighounba a été jugé conforme «aux exigences et normes requises». Il est autorisé à exercer par la délégation du tourisme de Ouarzazate. Curieusement, les travaux de raccordement à l’électricité, dont il devait bénéficier en tant qu’investisseur, ont contourné l’auberge!



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Sortir de l’anonymat par l’urne



Le village relève de la commune rurale de Tilmi. Une localité située à 180 km au sud de Ouarzazate. Elle est sortie de l’anonymat le 7 septembre 2007. Les électeurs avaient refusé de se rendre aux urnes pour les législatives. Depuis, le village est réputé pour avoir enregistré l’un des taux d’abstention les plus élevés lors des dernières législatives. «Les 11 urnes sont revenues vides. Par ce geste, nous avons voulu faire valoir nos droits et manifester notre désarroi», explique-t-on, non sans fierté, dans le village. Plus encore, si rien n’est fait d’ici le mois de juin, les tribus menacent de boycotter les élections communales.



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Hors INDH



Les communes les moins nanties sont d’ailleurs concentrées, entre autres, dans la région de Souss-Massa-Draâ (98 communes) où se trouvent justement Msemrir, Aït Attou Moussa, Tilmi... Selon le rapport 2004 du HCP sur la pauvreté, ces communes rurales sont parmi les plus indigentes, avec un taux qui oscille entre 30 et 40%. La faute n’incombe pas forcément aux élus locaux, car ces communes ont un budget dérisoire. Pour autant, la zone n’est pas répertoriée INDH! Mais l’annonce récente de la création d’une province à Tinghir (50 km de Boumalen) met du baume au cœur.

Amin RBOUB

 
c'est où Talaouine????

pas loin de Ouarzazate, la vallée du Safran ;)

Salam,

Qui t'en veux ?
Ne vis-tu pas en paix dans un pays pacifique et ouvert ?

au vue des images qui ont défilé pendant plus de 20 et qui ne sauront tardées de défiler encore si la situation ne s'améliore pas à Gaza, je remerciais le bon dieu de manger à ma faim, et d'avoir un toit, ma famille à mes côtés et surtt dans un pays en paix comme tu le disais si bien..après pacifiste, vendu, pouilleux, ouvert, fermé..je m'en fou ce n'était qu'un détail..

cela dit il est vrai que quand on voit le décallage entre ces deux mondes alors que c'est le même pays, des fois la même ville ça peut choquer..mais est ce que c'est propre à notre pays? est ce que c'est tout le temps la faute des autorités et dirigeants? sommes nous pas quelque part responsable de notre destinée certes à une échelle réduite, mais nous en sommes reponsables
 
Salam,

Qui t'en veux ?
Ne vis-tu pas en paix dans un pays pacifique et ouvert ?

je ne veut rien hamdullah , qu ' on me laisse trankil , c'est a dire que ce makhzen se casse de chez moi tant que qu il m'a rien offert , la majorité des rifains vivent grace a l'europe (pays bas , france ...)
 
une big pensée à tous ces gens qui n'ont rien, qui ne demandent rien et qui sont prets à partager le peu qu'ils ont.

ceci dit ils ont de ce qui ne s'achete pas, ne se construit pas, ne se donne pas, ne se vend pas : leur dignité.


Juste
 
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