lundi 20 octobre 2008 - 05h:58
Alain Gresh - Le Monde Diplomatique
Salah Hammouri est ce jeune franco-palestinien, emprisonné durant plus de trois ans, condamné par un tribunal miliaire israélien sans preuves à sept ans de prison à lissue dun procès où lutilisation des « aveux » rappelle de sinistres souvenirs. Hammouri reste inconnu pour de nombreux français. Alors que la mairie de Paris et le gouvernement français se mobilisent pour les « otages », et en premier lieu pour le soldat franco-israélien Gilad Shalit, le silence autour du cas de Hammouri a quelque chose dexemplaire, comme lexplique dans un article dune page de Libération Christophe Ayad, « Israël : un Français aux oubliettes » (18-19 octobre 2008) - je nai pas trouvé larticle sur le site de Libération, hasard ? Jen reproduis donc de longs extraits.
« Salah Hammouri a été arrêté le 13 mars 2005 sur la route de Ramallah. Deux heures plus tard, la police israélienne retournait lappartement de ses parents, à Jérusalem-Est, à la recherche de preuves. Ils ont tout retourné, saisi le disque dur de son ordinateur. Ils sont allés jusquà démonter les lavabos, se souvent Denis Hammouri, la mère de létudiant en sociologie de luniversité de Bethléeem. Pendant que son fils est détenu pendant trois mois à la prison de la Moskobieh, à Jérusalem, elle apprend dans la presse quil est censé avoir participé à un complot visant à assassiner le rabbi Ovadia Yossfe, chef spirituel du parti Shas (ultra-orthodoxe séfarade). Il est aussi accusé dappartenir au FPLP. Pendant les trois années qui suivent, Salah Hamouri est maintenu en détention administrative, comme la grande majorité des 11 600 prisonniers palestiniens, cest-à-dire sans supervision de la justice civile. La routine en Israël. »
Pourquoi a-t-il avoué ?
Cest que le procureur lui a proposé un marché. « Si Salah reconnaît les faits, il prendra sept ans de prison : sinon ce sera quatorze. Le dossier est pourtant mince : aucune preuve matérielle, ni armes, ni mails, ni plan, ni écoutes. Les seules preuves sont les témoignages, aussitôt rétractés, de détenus palestiniens et laveu de Salah, qui a reconnu être passé devant la maison du rabbin avec un ami, accusé lui aussi. Lavocate conseille à la famille daccepter, car les juges militaires suivent toujours les réquisitions. En tant que Palestinien de Jérusalem, Salah na droit à aucune remise de peine. Il ne peut faire appel. »
Jusque-là, il faut le dire, rien que de très banal pour un Palestinien. Noublions pas que la Palestine occupée compte sans doute le plus grand nombre de prisonniers politiques du monde ; que la torture est dusage courant ; que les détentions sans jugement le sont aussi ; que la majorité des jeunes hommes, à un moment ou à un autre, passe par les prisons israéliennes ; que ces centaines de mineurs et de femmes sont aussi emprisonnés.
« Ce qui est scandaleux dans cette affaire, cest le silence assourdissant des autorités françaises. Dès la condamnation, souligne Christophe Ayad, les autorités françaises se retrancheront systématiquement derrière la décision de justice et derrière cet aveu de culpabilité. Dans un courrier, Rama Yade va jusquà reprocher à Salah Hammouri de ne pas avoir exprimé de regrets. Lors de sa rencontre avec Denise Hammouri, fin mai, la secrétaire dEtat aux droits de lhomme semble découvrir laffaire. Lambassadeur spécial des droits de lhomme, François Zimmeray est aux abonnés absents. Tout comme lElysée. »
Un mot sur François Zimmeray. Cet ancien député européen socialiste sest tellement aligné sur les positions israéliennes au début des années 2000 que le Parti socialiste, peu suspect pourtant de pencher en faveur des Palestiniens, a finalement décidé de ne pas le représenter aux élections de 2004. Mais Nicolas Sarkozy la récupéré. (une recherche rapide sur Google permet de trouver les déclarations de ce personnage).
En conclusion, Christophe Ayad souligne que lElysée, qui a trouvé le temps de recevoir les parents de Gilad Shalit, na pas trouvé le temps pour recevoir Denise Hammouri. « Une tiédeur qui contraste avec les mots de réconfort du père de Gilad Shalit, qui avait su trouver les mots pour répondre à la lettre que lui avait envoyé Denise Hammouri en souhaitant la libération de leurs deux enfants. »
Alain Gresh - Le Monde Diplomatique
Salah Hammouri est ce jeune franco-palestinien, emprisonné durant plus de trois ans, condamné par un tribunal miliaire israélien sans preuves à sept ans de prison à lissue dun procès où lutilisation des « aveux » rappelle de sinistres souvenirs. Hammouri reste inconnu pour de nombreux français. Alors que la mairie de Paris et le gouvernement français se mobilisent pour les « otages », et en premier lieu pour le soldat franco-israélien Gilad Shalit, le silence autour du cas de Hammouri a quelque chose dexemplaire, comme lexplique dans un article dune page de Libération Christophe Ayad, « Israël : un Français aux oubliettes » (18-19 octobre 2008) - je nai pas trouvé larticle sur le site de Libération, hasard ? Jen reproduis donc de longs extraits.
« Salah Hammouri a été arrêté le 13 mars 2005 sur la route de Ramallah. Deux heures plus tard, la police israélienne retournait lappartement de ses parents, à Jérusalem-Est, à la recherche de preuves. Ils ont tout retourné, saisi le disque dur de son ordinateur. Ils sont allés jusquà démonter les lavabos, se souvent Denis Hammouri, la mère de létudiant en sociologie de luniversité de Bethléeem. Pendant que son fils est détenu pendant trois mois à la prison de la Moskobieh, à Jérusalem, elle apprend dans la presse quil est censé avoir participé à un complot visant à assassiner le rabbi Ovadia Yossfe, chef spirituel du parti Shas (ultra-orthodoxe séfarade). Il est aussi accusé dappartenir au FPLP. Pendant les trois années qui suivent, Salah Hamouri est maintenu en détention administrative, comme la grande majorité des 11 600 prisonniers palestiniens, cest-à-dire sans supervision de la justice civile. La routine en Israël. »
Pourquoi a-t-il avoué ?
Cest que le procureur lui a proposé un marché. « Si Salah reconnaît les faits, il prendra sept ans de prison : sinon ce sera quatorze. Le dossier est pourtant mince : aucune preuve matérielle, ni armes, ni mails, ni plan, ni écoutes. Les seules preuves sont les témoignages, aussitôt rétractés, de détenus palestiniens et laveu de Salah, qui a reconnu être passé devant la maison du rabbin avec un ami, accusé lui aussi. Lavocate conseille à la famille daccepter, car les juges militaires suivent toujours les réquisitions. En tant que Palestinien de Jérusalem, Salah na droit à aucune remise de peine. Il ne peut faire appel. »
Jusque-là, il faut le dire, rien que de très banal pour un Palestinien. Noublions pas que la Palestine occupée compte sans doute le plus grand nombre de prisonniers politiques du monde ; que la torture est dusage courant ; que les détentions sans jugement le sont aussi ; que la majorité des jeunes hommes, à un moment ou à un autre, passe par les prisons israéliennes ; que ces centaines de mineurs et de femmes sont aussi emprisonnés.
« Ce qui est scandaleux dans cette affaire, cest le silence assourdissant des autorités françaises. Dès la condamnation, souligne Christophe Ayad, les autorités françaises se retrancheront systématiquement derrière la décision de justice et derrière cet aveu de culpabilité. Dans un courrier, Rama Yade va jusquà reprocher à Salah Hammouri de ne pas avoir exprimé de regrets. Lors de sa rencontre avec Denise Hammouri, fin mai, la secrétaire dEtat aux droits de lhomme semble découvrir laffaire. Lambassadeur spécial des droits de lhomme, François Zimmeray est aux abonnés absents. Tout comme lElysée. »
Un mot sur François Zimmeray. Cet ancien député européen socialiste sest tellement aligné sur les positions israéliennes au début des années 2000 que le Parti socialiste, peu suspect pourtant de pencher en faveur des Palestiniens, a finalement décidé de ne pas le représenter aux élections de 2004. Mais Nicolas Sarkozy la récupéré. (une recherche rapide sur Google permet de trouver les déclarations de ce personnage).
En conclusion, Christophe Ayad souligne que lElysée, qui a trouvé le temps de recevoir les parents de Gilad Shalit, na pas trouvé le temps pour recevoir Denise Hammouri. « Une tiédeur qui contraste avec les mots de réconfort du père de Gilad Shalit, qui avait su trouver les mots pour répondre à la lettre que lui avait envoyé Denise Hammouri en souhaitant la libération de leurs deux enfants. »