Youcef Baadja, homme d’affaires évoluant dans la finance et les matières premières, mène une bataille sans relâche. L'entrepreneur qui affirme avoir été spolié par l'Algérie accuse les renseignements du pays de multiples enlèvements et de tentative d’empoisonnement.
Publié le 16/01/2024 · · Tom Benoit
Vous avez déposé plusieurs plaintes à propos d’un système de corruption dont vous affirmez avoir été la victime. Pouvez-vous revenir sur l’origine de cette affaire ?
Youcef Baadja : Je suis un entrepreneur de 48 ans, Algérien qui n’a jamais vécu en Algérie. Je travaille depuis plus de 25 ans dans la finance et dans le négoce de matières premières. Je précise que ma crédibilité a toujours incité les banques suisses et européennes à me financer.
J’ai bâti mon empire sur le négoce de matières premières à la Bourse de Londres. En 2010, je suis allé en Algérie pour bâtir dans mon pays et pour amener un plus à l’économie algérienne. De grands problèmes… La douane algérienne a bloqué mes sept sociétés. Tous mes comptes bancaires ont été bloqués.
Des décisions que vous jugez totalement arbitraires…
Sans aucune décision de justice ! Il s’agissait de décisions internes. Des plaintes ont été déposées contre moi, contre mes sociétés… Et toutes mes sociétés ont été bloquées. La première plainte date d’octobre 2013. Et puis, 120 plaintes ont suivi.
Selon vous, qu’est-ce qui a motivé ces plaintes ?
Le seul problème est que je n’avais pas le soutien d’un général. Je suis arrivé avec la mentalité européenne, et ils n’acceptent pas cela. Je travaille partout dans le monde. Nulle part ailleurs, je n’ai connu ça.
Il y a une forme de non-dit dans la façon de mener des affaires en Algérie ?
C’est tout à fait ça. Pour chaque secteur, il y a un général. Pour le sucre, il y a un général, pour le ciment… Si vous voulez monter une usine pour faire de l’eau plate, il faudra passer par un général qui vous donnera les agréments. L’Algérie est contrôlée par un système corrompu.
Vous dites avoir subi des persécutions particulièrement morbides…
J’ai eu gain de cause après cinq années de batailles. Pour gagner jusqu’à la Cour suprême. En 2018, j’ai reçu tous les jugements en ma faveur. Le tribunal d’Algérie a même condamné l’Etat à payer des dommages. Je suis allé voir le Premier ministre, qui aujourd’hui est en prison. Il n’a pas voulu me répondre. Je me suis retourné vers le ministre de la Justice. Lui aussi est en prison à présent. Il m’a dit : “Nous ne vous rembourserons pas”.
Alors, ils m’ont envoyé les services algériens. J’étais dans un café. On est venu me voir pour me proposer de m’ouvrir toutes les portes : crédits, banques… Même des crédits qui seraient ensuite effacés. En échange, « le patron veut que vous laissiez 50 % des dommages que vous demandez ». Je peux donner le nom du général, qui est lui aussi en prison aujourd’hui.
Publié le 16/01/2024 · · Tom Benoit
Vous avez déposé plusieurs plaintes à propos d’un système de corruption dont vous affirmez avoir été la victime. Pouvez-vous revenir sur l’origine de cette affaire ?
Youcef Baadja : Je suis un entrepreneur de 48 ans, Algérien qui n’a jamais vécu en Algérie. Je travaille depuis plus de 25 ans dans la finance et dans le négoce de matières premières. Je précise que ma crédibilité a toujours incité les banques suisses et européennes à me financer.
J’ai bâti mon empire sur le négoce de matières premières à la Bourse de Londres. En 2010, je suis allé en Algérie pour bâtir dans mon pays et pour amener un plus à l’économie algérienne. De grands problèmes… La douane algérienne a bloqué mes sept sociétés. Tous mes comptes bancaires ont été bloqués.
Des décisions que vous jugez totalement arbitraires…
Sans aucune décision de justice ! Il s’agissait de décisions internes. Des plaintes ont été déposées contre moi, contre mes sociétés… Et toutes mes sociétés ont été bloquées. La première plainte date d’octobre 2013. Et puis, 120 plaintes ont suivi.
Selon vous, qu’est-ce qui a motivé ces plaintes ?
Le seul problème est que je n’avais pas le soutien d’un général. Je suis arrivé avec la mentalité européenne, et ils n’acceptent pas cela. Je travaille partout dans le monde. Nulle part ailleurs, je n’ai connu ça.
Il y a une forme de non-dit dans la façon de mener des affaires en Algérie ?
C’est tout à fait ça. Pour chaque secteur, il y a un général. Pour le sucre, il y a un général, pour le ciment… Si vous voulez monter une usine pour faire de l’eau plate, il faudra passer par un général qui vous donnera les agréments. L’Algérie est contrôlée par un système corrompu.
Vous dites avoir subi des persécutions particulièrement morbides…
J’ai eu gain de cause après cinq années de batailles. Pour gagner jusqu’à la Cour suprême. En 2018, j’ai reçu tous les jugements en ma faveur. Le tribunal d’Algérie a même condamné l’Etat à payer des dommages. Je suis allé voir le Premier ministre, qui aujourd’hui est en prison. Il n’a pas voulu me répondre. Je me suis retourné vers le ministre de la Justice. Lui aussi est en prison à présent. Il m’a dit : “Nous ne vous rembourserons pas”.
Alors, ils m’ont envoyé les services algériens. J’étais dans un café. On est venu me voir pour me proposer de m’ouvrir toutes les portes : crédits, banques… Même des crédits qui seraient ensuite effacés. En échange, « le patron veut que vous laissiez 50 % des dommages que vous demandez ». Je peux donner le nom du général, qui est lui aussi en prison aujourd’hui.