boptitprince
je ne suis qu'un prince..
Le Wooncode et la loi du talion
Jean-Paul Marthoz Journaliste et essayiste
mardi 16 mars 2010, 10:36
Le désir de vengeance est lune des pulsions les plus ataviques de lhomme. Un prêté pour un rendu, tit for tat, leer om leer : les lexiques regorgent de mots qui expriment ce puissant désir de représailles.
Dans certains pays marqués par des traditions claniques, cette obsession du règlement de comptes débouche régulièrement sur des vendettas et des assassinats. Le crime dhonneur en est lune des illustrations les plus veules.
il pour il, dent pour dent : la loi du talion exerce également ses ravages entre les communautés ethniques ou religieuses. La semaine dernière, le massacre de centaines de chrétiens par des extrémistes musulmans au Nigeria a été justifié par ses auteurs comme un « juste retour des choses », comme une réponse à une tuerie dont les musulmans avaient été les victimes quelques mois plus tôt.
Dans les pays de droit, heureusement, la vengeance est domestiquée par de multiples règles qui interdisent de se faire justice soimême ou encore de répondre à la discrimination par linjustice.
La tentation est grande, pourtant, dutiliser les mêmes armes que ladversaire, de répondre par des excès à ses abus, de lui rendre la monnaie de sa pièce.
Cette « réciprocité négative » menace à tout moment les relations entre des communautés. Le gouvernement marocain vient, par exemple, dexpulser des missionnaires étrangers en les accusant de prosélytisme. « Cette mesure sinscrit dans le cadre de la lutte menée contre les tentatives de propagation du credo évangéliste, visant à ébranler la foi des musulmans », a déclaré le ministère marocain de lIntérieur.
Pourquoi, ont protesté des évangéliques, les musulmans bénéficieraient-ils en Europe ou aux Etats-Unis de lois qui reconnaissent légalité des droits des croyants, alors que la plupart des Constitutions des pays de confession islamique officialisent la discrimination, voire la répression, à lencontre des autres religions ?
Le même réflexe guette certains francophones qui soffusquent avec raison de lapplication par la Région flamande dun code du logement crûment discriminatoire. Pourquoi, sinterrogent-ils, nimposerions-nous pas les mêmes critères aux Flamands désireux dacheter un chalet en Ardennes ?
Réciprocité, loi du talion ? Cest ici que les eaux se partagent, que la division sopère entre larchaïsme et la modernité. Le comportement des autorités marocaines, comme celui du gouvernement flamand, relève dune conception pré-moderne et pré-démocratique de lEtat et de la société. Il nous renvoie à la dhimmitude du vieil Empire ottoman, qui tolérait les minorités chrétiennes et juives sans leur accorder les mêmes droits quaux musulmans. Il semble ne pas avoir été touché par ce 18e siècle éclairé qui, avec les Révolutions américaine et française, marqua une rupture avec lordre ancien en décrétant les principes de liberté, dégalité et de fraternité.
suite
Jean-Paul Marthoz Journaliste et essayiste
mardi 16 mars 2010, 10:36
Le désir de vengeance est lune des pulsions les plus ataviques de lhomme. Un prêté pour un rendu, tit for tat, leer om leer : les lexiques regorgent de mots qui expriment ce puissant désir de représailles.
Dans certains pays marqués par des traditions claniques, cette obsession du règlement de comptes débouche régulièrement sur des vendettas et des assassinats. Le crime dhonneur en est lune des illustrations les plus veules.
il pour il, dent pour dent : la loi du talion exerce également ses ravages entre les communautés ethniques ou religieuses. La semaine dernière, le massacre de centaines de chrétiens par des extrémistes musulmans au Nigeria a été justifié par ses auteurs comme un « juste retour des choses », comme une réponse à une tuerie dont les musulmans avaient été les victimes quelques mois plus tôt.
Dans les pays de droit, heureusement, la vengeance est domestiquée par de multiples règles qui interdisent de se faire justice soimême ou encore de répondre à la discrimination par linjustice.
La tentation est grande, pourtant, dutiliser les mêmes armes que ladversaire, de répondre par des excès à ses abus, de lui rendre la monnaie de sa pièce.
Cette « réciprocité négative » menace à tout moment les relations entre des communautés. Le gouvernement marocain vient, par exemple, dexpulser des missionnaires étrangers en les accusant de prosélytisme. « Cette mesure sinscrit dans le cadre de la lutte menée contre les tentatives de propagation du credo évangéliste, visant à ébranler la foi des musulmans », a déclaré le ministère marocain de lIntérieur.
Pourquoi, ont protesté des évangéliques, les musulmans bénéficieraient-ils en Europe ou aux Etats-Unis de lois qui reconnaissent légalité des droits des croyants, alors que la plupart des Constitutions des pays de confession islamique officialisent la discrimination, voire la répression, à lencontre des autres religions ?
Le même réflexe guette certains francophones qui soffusquent avec raison de lapplication par la Région flamande dun code du logement crûment discriminatoire. Pourquoi, sinterrogent-ils, nimposerions-nous pas les mêmes critères aux Flamands désireux dacheter un chalet en Ardennes ?
Réciprocité, loi du talion ? Cest ici que les eaux se partagent, que la division sopère entre larchaïsme et la modernité. Le comportement des autorités marocaines, comme celui du gouvernement flamand, relève dune conception pré-moderne et pré-démocratique de lEtat et de la société. Il nous renvoie à la dhimmitude du vieil Empire ottoman, qui tolérait les minorités chrétiennes et juives sans leur accorder les mêmes droits quaux musulmans. Il semble ne pas avoir été touché par ce 18e siècle éclairé qui, avec les Révolutions américaine et française, marqua une rupture avec lordre ancien en décrétant les principes de liberté, dégalité et de fraternité.
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