Léa Fehner : "Je voulais mettre en lumière la puissance et la force du métier de sage-femme"

Drianke · 7 Sept. 2023

Failles du système hospitalier et esprit de corps, Léa Fehner montre dans "Sages-femmes" la réalité d'un service des naissances de l'hôpital public en France. Dans ce film aux allures de documentaire, elle a pourtant recours à la fiction, qui lui permet d’écrire un traiet auquel on s'identifie.

Avec

Léa Fehner Cinéaste
Thierry Pech Directeur général de Terra Nova

Membre du collectif 50/50, Léa Fehner s'impose peu à peu sur la scène française. Après "Qu’un seul tienne et les autres suivront" (2009) nommé au César du meilleur premier film et "Les Ogres" (2016), elle revient ce 30 août 2023 avec "Sages-Femmes". Il sort demain au cinéma, mais était disponible sur Arte cet été. Cette fiction, qui ressemble à un documentaire prend les tripes dès les premières minutes. Il raconte le quotidien d'une maternité et la course contre la montre de sages-femmes qui adorent un métier qui les maltraite. Ce nouveau long-métrage a été tourné avec des élèves du Conservatoire (Conservatoire national supérieur de Paris) à l'aide d'un travail d'immersion pour coller au mieux à la réalité du quotidien de ce service oublié de l'hôpital public.

Un film engagé

Dans ce film, Sofia et Louise font leurs débuts dans un service de maternité. Il y a les accouchements qui se passent bien, ou mal, les accouchements des SDF, de mineures, de femmes qui arrivent seules ou en famille, des prématurés, des bébés de Noël, des conjoints violents. Le film se termine par une manifestation avec ces slogans : "Vous avez tué le plus beau métier du monde", "Il n'y a pas que le périnée qui craque", "Mise à mort des sages-femmes", etc. Ce film nous montre avec puissance la réalité de ces femmes et hommes qui, maltraités par le système, essaient d'accompagner au mieux les personnes dans un des moments majeurs de leur vie : la naissance d'un enfant, parfois, et même souvent au détriment de leur vie personnelle, de leur santé.

Pourquoi Léa Fehner a-t-elle eu envie de faire ce film ? "Il y a 1000 raisons, mais de mettre en lumière ce métier qui est assez hallucinant, qui accompagne des moments de nos vies aussi importants, au croisement de problématiques féministes, humaines, sociales et aussi métaphysiques – qu'est-ce que c'est de donner la vie ? De sortir de ces images un petit peu doucereuses, un peu mièvres, pour raconter la puissance et la force de métier-là." Elle voulait aussi montrer la noblesse de ce service public et son démantèlement à l'œuvre qu'elle trouve grave. Avec ce film, elle souhaitait aussi porter le cri d'alarme que les sages-femmes elles-mêmes lui ont transmis.

Concernant la situation économique des sages-femmes et leurs conditions de travail, Léa Fehner a écouté leurs revendications : "Il y a eu des revalorisations récemment, même si elles ont été quand même les grandes oubliées du Covid, alors qu'elles ont un métier qui est au cœur de l'urgence, qui ne pouvait pas s'arrêter pendant ce moment-là. Je crois que vraiment ce qui provoque l'hémorragie des personnels soignants, c'est plus l'incapacité à pouvoir soigner dans des bonnes conditions, à être suffisamment nombreux pour être auprès des patientes."...........................