YouTube - Les oubliés de Cassis
Trente ans après leur arrivée en France, une centaine de travailleurs immigrés tunisiens vivent toujours dans la misère et le dénuement, sans eau ni électricité. Rencontre.
Correspondance particulière
Ces mains sont capables de construire autre chose que ces baraques de bric et de broc. La force de ces bras a transformé Cassis de petit port de pêche aux portes de Marseille en station balnéaire réputée. Pourtant, depuis trente ans, 90 travailleurs immigrés tunisiens, que le consulat de France était allé chercher, contrat en main, dans leurs villages autour de Gabès pour participer aux trente glorieuses, continuent de vivre dans un bidonville, caché par une épaisse forêt de pins.
À la carrière Fontblanche, à plusieurs kilomètres du centre-ville, des caravanes côtoient des petites bâtisses de bois, dont les toits de tôles sont maintenus par des pierres. Pas suffisant toutefois pour empêcher le froid et la pluie de pénétrer dans les modestes intérieurs. Trois points d'eau en tout et pour tout, pas d'électricité et des petites cabanes dans les bois qui servent de sanitaires et de toilettes sont le seul luxe de ces oubliés de l'histoire.
À soixante-neuf ans, Mohamed Belaydi est la mémoire de ce " camp de transit ". Il se souvient comme si c'était hier de ce 13 novembre 1957, où il a posé pour la première fois le pied en France, sur le port de Marseille, avec en main un contrat de dix ans. À Cassis, ce fut d'abord l'hôtel Panorama où étaient logés dans les années soixante les immigrés, avant qu'une opération immobilière ne les chasse à coups de charges de CRS. Puis un premier bidonville, à la carrière Dora, dévasté par un incendie de forêt en 1970. C'est en juin 1971 que la mairie a mis à leur disposition la carrière Fontblanche, avec toutefois l'interdiction absolue de construire en dur, une interdiction qui se poursuit aujourd'hui.
" J'ai travaillé vingt-quatre ans comme manouvre dans le bâtiment, raconte Mohamed Belaydi. Mais, je n'ai jamais eu assez d'argent pour payer un loyer. Je rentre en Tunisie une ou deux fois par an, notamment pour le Ramadan. La Tunisie a beaucoup changé, mais moi je suis un Cassidain et je suis habitué à la France. " Comme tous ses compagnons, il a passé sa vie à envoyer de l'argent à sa femme et à ses enfants restés au pays. Tous ont fait construire une maison là-bas. Une maison dont ils ne profitent quasiment jamais, restant dans cette communauté d'hommes - les femmes y sont strictement interdites - à la recherche de petits boulots pour compléter leur maigre retraite.
Trente ans après leur arrivée en France, une centaine de travailleurs immigrés tunisiens vivent toujours dans la misère et le dénuement, sans eau ni électricité. Rencontre.
Correspondance particulière
Ces mains sont capables de construire autre chose que ces baraques de bric et de broc. La force de ces bras a transformé Cassis de petit port de pêche aux portes de Marseille en station balnéaire réputée. Pourtant, depuis trente ans, 90 travailleurs immigrés tunisiens, que le consulat de France était allé chercher, contrat en main, dans leurs villages autour de Gabès pour participer aux trente glorieuses, continuent de vivre dans un bidonville, caché par une épaisse forêt de pins.
À la carrière Fontblanche, à plusieurs kilomètres du centre-ville, des caravanes côtoient des petites bâtisses de bois, dont les toits de tôles sont maintenus par des pierres. Pas suffisant toutefois pour empêcher le froid et la pluie de pénétrer dans les modestes intérieurs. Trois points d'eau en tout et pour tout, pas d'électricité et des petites cabanes dans les bois qui servent de sanitaires et de toilettes sont le seul luxe de ces oubliés de l'histoire.
À soixante-neuf ans, Mohamed Belaydi est la mémoire de ce " camp de transit ". Il se souvient comme si c'était hier de ce 13 novembre 1957, où il a posé pour la première fois le pied en France, sur le port de Marseille, avec en main un contrat de dix ans. À Cassis, ce fut d'abord l'hôtel Panorama où étaient logés dans les années soixante les immigrés, avant qu'une opération immobilière ne les chasse à coups de charges de CRS. Puis un premier bidonville, à la carrière Dora, dévasté par un incendie de forêt en 1970. C'est en juin 1971 que la mairie a mis à leur disposition la carrière Fontblanche, avec toutefois l'interdiction absolue de construire en dur, une interdiction qui se poursuit aujourd'hui.
" J'ai travaillé vingt-quatre ans comme manouvre dans le bâtiment, raconte Mohamed Belaydi. Mais, je n'ai jamais eu assez d'argent pour payer un loyer. Je rentre en Tunisie une ou deux fois par an, notamment pour le Ramadan. La Tunisie a beaucoup changé, mais moi je suis un Cassidain et je suis habitué à la France. " Comme tous ses compagnons, il a passé sa vie à envoyer de l'argent à sa femme et à ses enfants restés au pays. Tous ont fait construire une maison là-bas. Une maison dont ils ne profitent quasiment jamais, restant dans cette communauté d'hommes - les femmes y sont strictement interdites - à la recherche de petits boulots pour compléter leur maigre retraite.