Maroc-france: l’éclipse du beau fixe

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Les relations entre le Maroc et la France ont toujours été qualifiées d’exemplaires ; d’une solidité suffisante pour résister aux fluctuations de conjonctures et aux nuances d’obédiences politiques des locataires de l’Élysée. Que s’est-il passé donc pour que ce beau fixe légendaire reçoive un coup de froid aussi subit qu’intense, comme s’il était touché de plein fouet par la météo ambiante ?


Un bref rappel des faits. Profitant de la présence à la résidence parisienne de l’ambassadeur du Maroc, de Mohamed Hassad, ministre de l’Intérieur, et Abdellatif Hammouchi, patron de la DST, des policiers ont débarqué, le jeudi 20 février, pour présenter à ce dernier une convocation d’un juge d’instruction français. Motif, une plainte pour complicité de torture déposée par une ONG française. Réaction immédiate et vigoureuse de Rabat qui juge la démarche pour le moins cavalière et inadmissible, sans respect aucun pour les canaux diplomatiques habituels, pour ce genre d’affaires. De plus, les accusations sont totalement infondées, précise-t-on.


À Paris, on tente de minimiser « un incident regrettable, sans impact sur la qualité des rapports entre les deux pays ». Rien n’y fait. Les conventions de coopération judicaire avec la France sont suspendues, avec les conséquences réciproques que l’on imagine, aussi bien au niveau civil que sécuritaire.

Ceci dit, ce type de péripétie n’est pas nouveau. Au Maroc, on a toujours eu une appréhension certaine par rapport à la présence au pouvoir de la gauche française, sur le vaste dégradé de ses couleurs partisanes. Le double mandat de François Mitterrand (1981-1995) s’inscrit dans cet état d’esprit. Méfiance et vigilance, crispation et suspicion. Hassan II a fait le premier pas, en se rendant à Paris, le 26 janvier 1982, pour une visite de travail et de prise de langue. Une année après, presque jour pour jour, Mitterrand a rendu la politesse, le 23 janvier 1983. Son séjour sera marqué par deux évènements d’importance. Le jour même de son arrivée, il apprend la mort, officiellement accidentelle, du général Ahmed Dlimi. Un homme qu’il ne portait pas dans son cœur, en raison de l’implication de celui-ci dans l’affaire sans fin de Mehdi Ben Barka, dont il se sentait très proche. Puis, il participe au lancement des travaux du barrage Aït Chouarit, dans le sud du pays. Il reviendra le 23 avril 1985 pour la mise en eau du même ouvrage hydraulique.


Le courant était rétabli, mais il est resté alternatif. Particulièrement, du fait d’une mauvaise militance de son épouse, Danielle Mitterrand, au profit du Polisario, avant qu’elle ne se rende compte de sa méprise.
Le même sentiment de prudence craintive a prévalu, plus de trente ans après, lors de la rude bataille électorale entre Nicolas Sarkozy et François Hollande. Parmi l’intelligentsia marocaine et un peu au delà, il y a eu des Sarkozistes impénitents et des Hollandistes enflammés. Comme à chaque fois, les présidentielles françaises sont aussi une affaire marocaine. La tendance générale penche plutôt pour le président-candidat Sarkozy, considéré comme un bon client pour le Maroc. Sa politique de coopération fructueuse était bien vue. Seulement voilà, c’est François Hollande que le peuple électeur de France a choisi. Les craintes de Rabat vont se préciser lorsque celui-ci réserve à l’Algérie son premier déplacement au Maghreb. Un peu comme pour rattraper l’héritage de son paternel qui était un farouche partisan de « l’Algérie française ». Assurément, les socialistes à l’Élysée, ça ne nous réussit pas. L’actuelle crise diplomatique semble confirmer cette constance de soubresauts épisodiques entre la France et le Maroc.


Bien avant les péripéties des quarante dernières années, il y a eu un autre personnage, avec une autre idée de la France et de son rapport à ses anciennes colonies. Un de Gaulle qui a très mal encaissé l’enlèvement de Mehdi Ben Barka sur le territoire français, un 29 octobre 1965. Un assassinat politique dont les suites judicaires continuent, à ce jour, à rebondir, au gré des juges français chargés d’une instruction interminable.


En définitive, les relations franco-marocaines n’ont jamais été un long fleuve tranquille. Elles ont, plutôt, toujours été marquées par un fort cachet passionnel. Une attractivité partagée et paradoxale ; souvent apaisée, parfois conflictuelle. Il y a fort à parier que la fièvre actuelle finira par tomber. Les intérêts mutuels et bien compris, adossés au substrat de la raison d’État, reprendront le dessus.

Youssef Chmirou, Directeur de la publication
http://www.zamane.ma/maroc-france-leclipse-du-beau-fixe-4/
 
Une fois de plus, l’histoire du passé aide à y voir clair dans l’histoire du présent. Merci pour la citation :cool:

Bien avant les péripéties des quarante dernières années, il y a eu un autre personnage, avec une autre idée de la France et de son rapport à ses anciennes colonies. Un de Gaulle qui a très mal encaissé l’enlèvement de Mehdi Ben Barka sur le territoire français, un 29 octobre 1965. Un assassinat politique dont les suites judicaires continuent, à ce jour, à rebondir, au gré des juges français chargés d’une instruction interminable.
Le nom de Ben Barka me rappel quelque chose, mais je n’ai aucune idée de l’affaire, seulement qu’elle a été importante. S’il y a des gens dans le même cas, voici une playlist d’un reportage :

http://www.dailymotion.com/playlist/x33g0z_didyou2_affaire-mehdi-ben-barka/1

Je ne l’ai pas encore regardé, et je ne sais pas ce que ça vaut.
 
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