« Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de Cour vous rendront blanc ou noir », disait La Fontaine en 1668. Au Maroc de 2014, ça marche encore comme ça.
Quand on est éduqué dans l’idée que tout vous est dû, on finit par penser qu’on est au dessus des lois—ça fait partie du package. Ainsi fonctionne la progéniture de certaines élites marocaines. Beaucoup de choses ont changé dans la société du royaume dans les dernières décennies, mais ce type d’abus a la vie dure.
Pour preuve, l’impunité dont ont bénéficié de nombreux jeunes chauffards conduisant sous l’emprise de l’alcool, coupables d’accidents ayant coûté la vie ou au moins la validité de citoyens moins « bien nés » qu’eux. Une scène du film « Marock » (Leila Marrakchi, 2005), illustre ce dont certaines familles se rendent coupables pour couvrir les crimes de leurs enfants :
Exemple réel, et récent : le traitement judiciaire réservé à Mohammed Bennani après l’accident qui a couté la vie à sa mère et sa sœur, le 28 novembre 2012. A 5 heures du matin ce jour-là, l’entrepreneur de trente-et-un ans, en route vers l’aéroport, est percuté par une Jaguar roulant à très vive allure. A son réveil à l’hôpital, il est informé que ses deux accompagnatrices sont décédées, et que l'auteur de l’accident est libre. Des témoins que la peur empêchera de déposer l’informeront plus tard que le conducteur était ivre au moment de l’accident. Usant de son réseau familial lui aussi, l’homme réussit à obtenir l’incarcération du chauffard de 19 ans, pendant deux mois. Il refuse, en outre, l’offre qui lui est faite d’une compensation d’un million de dollars, en échange du retrait de sa plainte. Le procès-verbal de police identifie le chauffard comme Ismail El Menjra, fils de Abdelilah El Menjra, riche homme d’affaires et ex-Président du Wydad Athletic Club, (WAC), un des clubs de foot les plus en vue du pays. Au final, le jeune homme est condamné à deux mois d’emprisonnement. La peine couvrant la période préventive, il est libéré à l’énoncé du verdict. Mohamed Bennani raconte : « Nous avons du faire pression pour dessaisir le juge chargé de l’affaire, en raison de ses liens avérés avec la famille El Menjra. Mais la réaffectation du dossier n’a rien changé, comme en témoigne la légèreté du verdict. » L’avocat de Mohamed Bennani déclarera même avoir été l’objet d’une tentative de corruption par la partie adverse, lors des funérailles des deux victimes. Joint par « Free Arabs », l’avocat adverse, Abderrahman Filali Hassoun s’est refusé à tout commentaire, arguant qu'il ne représentait plus la famille El Menjra. Devant le parcours d’obstacles qu’est la procédure en appel, Mohamed Bennani soupire : « Nous attendons toujours une date. Le temps est un obstacle de taille, et le dossier pourrait tout simplement se perdre dans quelque bureau du tribunal ! »
Ce type de dysfonctionnement judiciaire est très fréquent au Maroc. Un fonctionnaire de police qui a requis l’anonymat témoigne : « La hantise d’un officier de police marocain, c’est d’être affecté au service des accidents de la route. Les interventions y sont monnaie courante et l’application de la loi, très difficile. »
Quand on est éduqué dans l’idée que tout vous est dû, on finit par penser qu’on est au dessus des lois—ça fait partie du package. Ainsi fonctionne la progéniture de certaines élites marocaines. Beaucoup de choses ont changé dans la société du royaume dans les dernières décennies, mais ce type d’abus a la vie dure.
Pour preuve, l’impunité dont ont bénéficié de nombreux jeunes chauffards conduisant sous l’emprise de l’alcool, coupables d’accidents ayant coûté la vie ou au moins la validité de citoyens moins « bien nés » qu’eux. Une scène du film « Marock » (Leila Marrakchi, 2005), illustre ce dont certaines familles se rendent coupables pour couvrir les crimes de leurs enfants :
Exemple réel, et récent : le traitement judiciaire réservé à Mohammed Bennani après l’accident qui a couté la vie à sa mère et sa sœur, le 28 novembre 2012. A 5 heures du matin ce jour-là, l’entrepreneur de trente-et-un ans, en route vers l’aéroport, est percuté par une Jaguar roulant à très vive allure. A son réveil à l’hôpital, il est informé que ses deux accompagnatrices sont décédées, et que l'auteur de l’accident est libre. Des témoins que la peur empêchera de déposer l’informeront plus tard que le conducteur était ivre au moment de l’accident. Usant de son réseau familial lui aussi, l’homme réussit à obtenir l’incarcération du chauffard de 19 ans, pendant deux mois. Il refuse, en outre, l’offre qui lui est faite d’une compensation d’un million de dollars, en échange du retrait de sa plainte. Le procès-verbal de police identifie le chauffard comme Ismail El Menjra, fils de Abdelilah El Menjra, riche homme d’affaires et ex-Président du Wydad Athletic Club, (WAC), un des clubs de foot les plus en vue du pays. Au final, le jeune homme est condamné à deux mois d’emprisonnement. La peine couvrant la période préventive, il est libéré à l’énoncé du verdict. Mohamed Bennani raconte : « Nous avons du faire pression pour dessaisir le juge chargé de l’affaire, en raison de ses liens avérés avec la famille El Menjra. Mais la réaffectation du dossier n’a rien changé, comme en témoigne la légèreté du verdict. » L’avocat de Mohamed Bennani déclarera même avoir été l’objet d’une tentative de corruption par la partie adverse, lors des funérailles des deux victimes. Joint par « Free Arabs », l’avocat adverse, Abderrahman Filali Hassoun s’est refusé à tout commentaire, arguant qu'il ne représentait plus la famille El Menjra. Devant le parcours d’obstacles qu’est la procédure en appel, Mohamed Bennani soupire : « Nous attendons toujours une date. Le temps est un obstacle de taille, et le dossier pourrait tout simplement se perdre dans quelque bureau du tribunal ! »
Ce type de dysfonctionnement judiciaire est très fréquent au Maroc. Un fonctionnaire de police qui a requis l’anonymat témoigne : « La hantise d’un officier de police marocain, c’est d’être affecté au service des accidents de la route. Les interventions y sont monnaie courante et l’application de la loi, très difficile. »