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ahmed II

Sweet & Sour
Mon anniversaire approche, me signale, ce matin, une fonctionnaire en me préparant une carte d’identité plastifiée. C’est à cette date que commence vraiment la nouvelle année, pensais-je, que des choix se présentent pour formuler ses vœux. Cinquante six ans. Ou je la joue stoïcienne et je prends le taureau par les cornes ou je m'en balance comme dans un jardin épicurien; soit je lis Kafka ou Nietzsche et je tombe dans le monochrome intellectuel et mental de la solitude anéantisante, soit je m’efforce de rester en bonne santé physique et mentale en surfant sur les bons côtés de la vie.
 
Pour ce qui est de toute suite, je suis en train de lire Et Nietzsche a pleuré
d’Irvin Yalom, ironiquement. J’aime les rebondissements dans ce roman réaliste et
confondant. Et l’idée que la famille et le sensuel soient aussi importants -et peut-être
préférable- au pari nietzschéen, cet enjeu que représente la vie monastique contre la
séculière. Chez moi, le monastique, l’ascète, est un problème, surtout lorsqu’on
cherche à donner cette manière de vivre en idéal comme le fait Michel Onfray avec son
maître à penser, Diogène, qui vivait dans un tonneau. C’est antinomique, il me semble,
à son esprit de société populaire harmonieuse qu’il revendique.

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Mon anniversaire approche, me signale, ce matin, une fonctionnaire en me préparant une carte d’identité plastifiée. C’est à cette date que commence vraiment la nouvelle année, pensais-je, que des choix se présentent pour formuler ses vœux. Cinquante six ans. Ou je la joue stoïcienne et je prends le taureau par les cornes ou je m'en balance comme dans un jardin épicurien; soit je lis Kafka ou Nietzsche et je tombe dans le monochrome intellectuel et mental de la solitude anéantisante, soit je m’efforce de rester en bonne santé physique et mentale en surfant sur les bons côtés de la vie.

je choisirais la dernière option...si j'étais vous !

mais je ne le suis pas ;)
 
Le populaire, disais-je, c’est avec le bourgeois, et non sans. Avec des
lois et des rituels pour consacrer la paix et exploiter les arts au bénéfice de
tous les êtres. C’est difficile de faire rentrer cette évidence dans la tête des
gens, même des bourgeois. Baudelaire s’en est piteusement rendu compte en
postulant des pieds et des mains pour une place à l’Académie française, qu’il
n’obtint d’ailleurs pas. Comme polémiste il écrivait déjà, mi-figue, mi-raisin,
concluant un article : « C’est donc à vous, bourgeois, que ce livre est
naturellement dédié; car tout livre qui ne s’adresse pas à la majorité, -nombre
et intelligence- est un sot livre . »
…
 
Arthur Rimbaud en est un autre illustre exemple. Authentique bohème
anti-bourgeois par excellence dans sa jeunesse et chéri par des générations
de jeunes révoltés, sur son lit d’hôpital, cette idole de la poésie, épouvantée
par l’idée de la mort ainsi que de se faire voler l’or qu’il cachait dans une
ceinture autour de la taille, s’écriait : « Que je suis malheureux, que je suis
malheureux... et j’ai de l’argent sur moi que je ne puis même pas surveiller ! »
Toute cette vie géniale pour rimer en définitive dans la plus pitoyable
lamentation du bourgeois mauvais homme.

...
 
La vie d’Hegel, pour explorer l’autre bout du spectre, du strict point de vue
biographique, fut celle d’un homme aspirant à devenir fonctionnaire, à se marier et à
trouver la stabilité nécessaire au développement de sa pensée. Pour construire des
universités prestigieuses, ce n’est pas en se branlant sur la place publique (à la
manière de Diogène, ce qu’Onfray trouve très spirituelle, ou en organisant des partouzes
au goût de Montaigne que les humains s’épanouissent ou s’en donnent les moyens.
Je ne suis par certain que j’énonce-là une Lapalissade dans une démocratie où le mensonge
structure la morale, la politique et la science.
 
Mais je n’ai jamais pu m’intéresser à Hegel. Ce n’est pas lisible. Je
ne comprends pas cette passion de l’Europe pour ce pilier de la philosophie
abstraite. Avec lui, on nage dans l’antiquité grecque en compagnie
d’Héraclite, Platon et d’Aristote. Les gens aiment ça. Moi pas. En
conséquence, je passe pour hérétique, excentrique, extravaguant,
réactionnaire, envieux, inculte et barbare, en trois mots : pour un serpent
noir venimeux. Et pourtant, je défends mes vues avec sérieux, fruits d’une
longue expérience culturelle.

Voici un exemple de son écriture dans laquelle il désigne l’État comme étant
tout et l’individu rien; et certains me diront que je suis ***, que c’est du
bla bla bla. (Suivez mon regard. Ceux-là, je vous l’assure, passeront un
mauvais quart d’heure sous ma plume. Mais c’est chiant à la longue de
toujours se faire dire qu’on raconte n’importe quoi par des gens qui ne
supportent pas la différence et les idées qui sortent des sentiers battus.)
Bref, lisez ce délire dont je donnais quelques hints, ailleurs, à propos de
l’évolution des espèces: « L’État est le monde que l’esprit s’est fait de
lui-même… il faut donc vénérer l’État comme un être divin-terrestre et
savoir que, s’il est difficile de comprendre la nature, il est infiniment plus
ardu de bien concevoir l’État… C’est la marche de Dieu dans le monde qui
fait que l’État existe. L’État est un organisme… C’est pourquoi l’État sait ce
qu’il veut et le sait dans son universalité. » Dixit, le champion contemporain
du concept de totalitarisme.
 
J’ai finalement fuit l’Algérie à cause d’idées de ce genre adoptées par
les Algériens. Ils insistaient pour que l’autorité morale et spirituelle de l’État
remplace la conscience personnelle des individus. Même mon père, un pieu
musulman qui ne saisissait pas bien toutes ces spéculations, compatissait à
ma révolte et fit des pieds et des mains pour me sortir du bourbier social
qu’est l’Algérie. Pour cela, je lui suis très reconnaissant, car à cette époque il
n’était pas aisé de quitter le pays si vous n’aviez pas fait deux ans de service
militaire. :fou:
 
Ah, mais je n’ai pas fini avec Hegel. Tout comme Aristote fut le
précepteur d’Alexandre le Grand, Hegel fut le philosophe de la cour et se
trouva bien placer pour faire triompher ses indigestes abstractions. Il est, si
je ne m’abuse, celui qui a assis définitivement la notion d’historicité, dont
j’ai pris beaucoup de temps à la comprendre dans sa définition moderne.
J’emploie le terme ‘‘notion’’, car c’est un mot tels que âme, science,
philosophie qui ont pris des sens spécifiques à partir d’un certain moment
dans le temps et se sont détachés de leur signification originelle. Par
exemple, on Occident, l’histoire commence avec J.-C, quasiment.
Aujourd’hui, bien évidement, la préhistoire est prise en compte dans ce
calcul par les savants. Mais, moi, j’ai une perspective culturelle différente.
L’histoire commence en réalité avec le début du monde. Comme je
l’expliquais à quelqu’un ici, godless de son pseudonyme, les Védas sont
bourrés d’informations sur les époques anciennes. Ils contiennent un corpus
de textes appelés les Purana, titre qui signifie ‘‘Histoire’’.

Donc, pour en revenir à ce titan de la pensée qu’est Hegel, je disais qu’il
s’inspirait d’Aristote et de Platon, mais j’ai en tête de partager avec vous
les spéculations sur l’évolution de la matière et des espèces, des
théories.qui avaient cours à cette époque. Car les gens l’oublient et ne
parlent que de Darwin ou de Lamarck, comme si ces derniers avaient
découverts cette trouvaille par eux-mêmes. Pourtant, c’est du mâché et
remâché. Je tire ce passage ci-dessous d’un livre de Karl Popper, La société
ouverte. Popper était un philosophe, scientifique et écrivain dont j’aime
beaucoup l’écriture et sa façon de raisonner. Est-il besoin de préciser que
cette disposition d’esprit ne m’empêche pas d’être critique -très- vis-à-vis
de lui, même si je l’apprécie. Alors voici : «Pour Aristote, il peut exister des
changements vers le mieux, vers le progrès, là où, pour Platon, tout
changement conduit au contraire à la dégénérescence, dans la mesure ou,
en s’éloignant de l’original, c’est-à-dire de la forme ou de l’Idée parfaite,
l’objet changeant perd peu à peu sa similitude avec le modèle. Speusippe,
neveu et successeur de Platon, avait déjà abandonné cette théorie; mais
Aristote était, semble-t-il, hostile aux théories évolutionniste en faveur…»

---
 
Écoutez-le, ce maître à penser de nos intellectuels émérites - je
parlais plus haut de Montaigne- vanter dans ses Essais les sociétés où le
mariage est synonyme d’orgie nuptiale à plusieurs partenaires : « Si c’est
un marchand qui se marie, tous les marchands invités à la noce couchent
avec l’épousée avant lui; et plus ils sont nombreux, plus elle en tire
d’honneur et de réputation de robustesse et de capacité. »

Malheureusement, la profession et les mœurs dont Montaigne jouissait
parmi ses pairs de la haute société le contraignaient à ne pas souscrire
ouvertement aux plaisirs éprouvés par « des peuples, écrit-il, où il y a des
bordels publics pour les hommes, et même des mariages entre eux . »

L’amitié inestimable telle qu’il a cultivée avec La Boétie est une énigme
pour nous, hommes du XXI siècle, qui voudrions, sans être nécessairement
homosexuels ni débauchés, exprimer et vivre les choses de façon
authentique comme on dit, ou plutôt comme Witold Combrowicz le dit,
contre Proust : « De ce point de vue il est très instructif que la seule
beauté vraiment admirée par Proust, la beauté d’un jeune garçon tout
simple, ne pénètre même pas une seule fois dans les pages de son œuvre,
ni directement, ni indirectement. Cette beauté, la plus importante, elle est
tue. » Au moins, Combrowicz ne mâche pas ses mots. Montaigne, lui,
répondait, quand on le pressait : « parce que c’était lui, parce que c’était
moi . » Lorsque Combrowicz décrit un pédé amoureux d’un jeune polonais,
il n’y va pas par quatre chemins. Mais il se donne tout de même un
semblant de choix. « Le pousser dans les bras de ce ‘‘puto’’ (pédé) c’est le
livrer au vice, le jeter sur les routes qui ne mènent nulle part. [---]
L’arracher au pédéraste et le faire revenir au père, c’est le maintenir dans la
posture polonaise honnête et traditionnelle. Que choisir? La fidélité au
passé… ou la liberté de se créer à volonté? L’enfermer dans sa forme
atavique… ou ouvrir la cage, le faire s’envoler, et qu’il fasse ce qu’il voudra!
Qu’il se crée lui-même . »

Ce fameux Homme nouveau sur toutes les lèvres de l’époque communiste! À
l’instar de Che Guevara, éternel idole de la révolution cubaine, héros de la
culture pop alors même qu’il était un fanatique passionné de guérillas qui
rêvait de « deux, trois Vietnam » et haïssait les homosexuels, ce Che ne
jurait que par cette formule : l’homme nouveau.
 
Ce matin, je fredonne l’air de Pierre Perret dans une insouciance joyeuse :

Ouvrez, ouvrez la cage aux oiseaux
Regardez-les s'envoler c'est beau
Les enfants si vous voyez
Des p'tits oiseaux prisonniers
Ouvrez-leur la porte vers la liberté.

Mais comment ne pas entendre dans ce refrain, une lubie qui envisage
l’existence sans sa dimension tragique. Car les petits français de l’époque,
en écoutant la chanson à la radio, ont ouvert les cages. Les oiseaux sont
morts. Je ne peux m’empêcher de faire le lien avec Gorki, le chantre officiel
de la révolution stalinienne. De très basse extraction, enfant, il a été
laissé à lui-même après avoir connu un grand-père absolument terrifiant.
« La vie m’a réchauffé à coups de poing. » écrit-il. Le karma étant à l’œuvre,
Gorki a un goût inné pour la lecture et devient autodidacte. Tolstoï, Gide,
Romain Rolland, Malraux, Bernard Shaw, Stéphane Zweig iront le visiter ou
le pleureront. Il aurait pu incarner l’homme nouveau. Il a écrit quelques
lignes fort lumineuses sur le sujet des animaux dans En gagnant mon pain :
« Alexis s’adonna à la chasse aux oiseaux. Il passait des heures dans les
bois, écoutant leurs gazouillis et tendant des filets. "Je regrette un peu
d’attraper de petits oiseaux et j’ai honte de les enfermer dans des cages.
J’aime mieux les regarder. Mais ma passion de la chasse et mon désir de
gagner de l’argent ont raison de ma compassion." »

---
 
L’avez-vous observé, vous, cet homme nouveau ? Son éventuelle évolution,
du singe à Che Guevara, par exemple, et du Che à sa projection
métaphysique, scientifique, ou ne serait-ce qu’idéologique, léniniste ou
marxiste ? "Shuut…Laisse-faire. On a tourné la page, le mur est tombé."
En tout cas, le résultat est plutôt nul. Cela n’a rien de nouveau. Même pas
de films de science-fiction pour donner vie à cette théorie. « Pas une théorie, mais un fait, ignorant ! » me lance de bon matin l’animateur Joël
Le Bigot sur Radio-Canada. Il tient l’information de première main; hier, il a
écouté Yves Coppens, celui qui affirme depuis plus d’un demi-siècle que
l’homme est né, il y a trois millions d’années, du monde animal, quelque
part en Afrique, pas loin d’où Ève a croqué dans la pomme, du paradis
terrestre. Vous prenez Jérusalem et vous vous dirigez vers le Sud. La
preuve, c’est qu’il y a encore plein de juifs noirs là-bas. Mais ils ne font pas
partie de l’élite, eux. Disons que les Israéliens les tolèrent. Ce sont les
parias de l’Ancien Testament; et du Nouveau... * (Voir la vidéo ci-dessous)

Et si Dieu n’aimait pas les noirs ? Dans ce livre à peine sorti des
presses, le journaliste martiniquais, Serge Bilé, regimbe à travers une
enquête sur le racisme au Vatican d’aujourd’hui. L’Église tente de retourner
à sa conception conservatrice du clergé qui avait pourtant réglé, au concile
de Vatican II, avec Jean-Paul II, le problème de la vision des juifs comme
déicides et des noirs comme maudits. Quand j’écris ces lignes, Barack
Obama vient d’être élu Président des Américains. C’est « le pygmée dans la
cage de l’orang-outan ». L’expression fait référence à la mentalité du peuple
au 18e et 19e siècle face à l’idée qu’il se faisait de nos origines. Un
chroniqueur, Steve Proulx, explique cette tournure sémantique : « On a déjà
présenté un pygmée en cage, juste à côté d’un orang-outan, en prétendant
qu’il s’agissait du célèbre chaînon manquant du bon vieux Darwin. » En fait,
ce jeu de mots consiste à être capable de discerner l’aberration là où tout le
monde voit la normalité; en l’occurrence la tradition monothéiste juive,
musulmane et chrétienne qui a du mal à évoluer, pratiquement, vers leurs
idéaux d’égalités et de paix. Comment ne pas défoncer, par la nomination
suprême de Barack Obama, le tabou qu’Adam et Ève étaient très
probablement noirs ?! Alors, vous comprendrez que l’Église ne soit pas en
faveur des idées de Darwin sur l’évolution. Quelle confusion ! Vient-on ou ne
vient-on pas du singe ?

http://www.youtube.com/watch?v=WJseGdtaNGc

L'homme nouveau en image
 

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Parenthèse. Notes et brouillons.

Si j’utilise la méthode scientifique ou rationnelle, j’en déduis simplement que tout corps qui se respecte -animal, plante ou humain- abrite d’autres vivants intelligents, toutes proportions gardées. Dans le corps humain par exemple, vivent des vers, de même sur les planètes, du moins en ce qui concerne la Terre et dont nous ne pouvons renier la réalité. Ainsi, plus la structure organique est grande et vivante, plus il y a d’êtres intelligents qui y vivent. Voilà, ce que j’appelle une théorie scientifique simple et élégante; elle est démontrable et compréhensible à tous ceux qui veulent se donner la peine de réfléchir, c'est-à-dire de mettre de côtés leurs préjugés et ce qui parasite leur imagination. Pour ces bien-pensants, l’univers leur apparaîtra comme un immense corps vivant et intelligent, d’une perfection inouïe, abritant également une multitude d’êtres dont les sens sont certainement plus développés (et d’autres moins, il va de soi) que les nôtres. Renier cette vérité pour la banale raison qu’on ne peut la voir ou la vérifier, bien que scientifique, est une restriction imposée à l’esprit et qui nous borne dans notre découverte du monde.
 
Tout le débat sur l’évolution -des espèces ou de la matière- n’est qu’un bras de fer
théorique entre athées et monothéistes, une bulle d’ignorance fondamentale gardée par
les cerbères et les sphinx de l’antiquité : Grecs et Arabes. C’est ce que j’appelle le
paradigme de la pensée occidentale. À Part Schopenhauer, que je cite avec des
pincettes, je ne vois pas qui d’autres a essayé de passer outre ce conditionnement.
 

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IL y a peut-être 15 ans de cela que je me suis mis vraiment à étudier la
pensée occidentale. Avant, et cela depuis ma sortie de l’adolescence, je
suis d’abord devenu beatnik, mais avec la malchance de ne pouvoir exhiber
autre chose qu’un passeport algérien. Plus tard, je réussirai à contourner ce
maudit problème. Ce n’est qu’à l’âge de 45 ans que je le réglerai
définitivement, à ma grande liberté.

Une fois, donc, revenu de l’utopie "Peace & Love", au bout de quelques
années, vers 20 ans je me suis plongé dans le yoga et la méditation et lu
les livres sur le sujet. Cette littérature étant de piètre disponibilité en
français, j’ai appris l’anglais. J’ai acquis une livre que je voulais avidement
lire, j’ai acheté un dictionnaire et j’ai commencé à traduire mot pour mot.
Jusqu’à ce que je puisse lire le livre en anglais.

Jusqu’il y a 15 ans, je ne lisais que l’anglais. Mais le plus souvent, un vieil
anglais, écrit souvent par des religieux hindous, des pandits. Rien à voir
avec le Time Magazine qui me donnait pas mal de fils à retordre.
Finalement, je me débrouillais bien lorsque j’écrivais cette nouvelle langue.
Et puis j’aimais ça, le punch que je pouvais retirer de cette écriture.
Quand je me suis remis au français, et complètement abandonné l’anglais
pour me concentrer à bien écrire, j’ai lu beaucoup pour comprendre la
pensée occidentale. Je suis alors tombé sur Jean-François Revel. Sans le
savoir il est devenu mon maître. Il m’a appris à écrire et à lire, à raisonner
strictement et m’a dirigé dans mes lectures.

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Il disait de lui-même qu’il était agnostique. C’est la meilleure position qu’il ait pu se trouver, elle lui allait comme un gant et a sauvé son indépendance morale dans un milieu qui n’est pas évident si l’on ne veut pas être complètement marginalisé. Or ce n’était pas le cas de Revel. Chacun de ses devenait immédiatement un best-seller. Je vous en ai donné un extrait de lui, dernièrement, sur les Aryens.
 
Aujourd’hui, je lis un livre de Max Weber (1864-1920) dont j’aime les idées dans
Le savant et le politique. Par exemple, voici ce qu’il écrit : «Mais on peut
observer chez nous (Allemagne) que les développements les plus récents de
l’université, dans de larges domaines de la science, vont dans le sens de
l‘université américaine. Les grands instituts de science ou de médecine sont
des entreprises relevant du "capitalisme d’État". Ils ne peuvent être gérés
sans des moyens de fonctionnement de grande ampleur.» Et on assiste ici
au même phénomène que partout où se met en place l’entreprise capitaliste
: la "séparation du travail avec des moyens de production" (référence à
Marx). Le travailleur, l’assistant donc, doit utiliser les moyens de travail qui
sont mis à sa disposition par l’État. Par suite, il est tout aussi dépendant
du directeur de l’institut qu’un employé l’est dans une usine. […] Et
l’existence de l’assistant est fréquemment aussi précaire que n’importe
quelle existence "prolétaroïde". Je lis ainsi de suite avec tous les bons
sentiments pour l’auteur jusque lorsqu’il s’approche de mes cordes
intellectuelles.

Là, je deviens plus curieux et reprend mon sens critique. Il s’arrête sur le
mythe de la caverne de Platon pour nous expliquer la méthode scientifique
originale. Je ne vous la raconte pas dans les détails car vous devez tous la
connaître mais lisez l’analogie de l’homme qui revient dans la caverne
éclairer ses pairs ignorants : «Cet homme est le philosophe, et le soleil est
la vérité et la science, laquelle ne cherche pas à attraper des fantasme et
des ombres, mais l’être véritable. Qui, aujourd’hui, continue-t-il, entretient
un tel rapport avec la science? »
Vous comprenez quand je vous disais que j’aimais ses idées. Mais bon, c’est
commun tout de même. Voyons un peu plus bas : «L’enthousiasme
passionné de Platon dans la République s’explique en dernière instance par
le fait qu’à l’époque, pour la première fois, l’on venait de prendre conscience
du sens d’un des plus grands moyens de toute connaissance scientifique, à
savoir le concept.» Et voilà, il nous la sort également! Les grands
philosophes grecs qui ont tout inventé! La démocratie, la logique, la
philosophie, la science, et que sais-je encore? Mais je veux vous montrer la
faiblesse du raisonnement, c'est-à-dire le peu d’intérêt qu’il met à
démontrer ses jugements, en l’occurrence lorsqu’il s’agit de l’Inde.
 
-
(Je suis fort sur les parenthèse. Un ami, concerné par mes écrits, a
pensé à moi et m'a envoyé ce qui suit.)

Joseph Schumpeter et Max Weber à propos de la révolution bolchevique

Karl Jaspers, dans son essai sur Max Weber, raconte la conversation
suivante entre Max Weber et - Joseph Schumpeter :
« Les deux hommes se rencontrèrent dans un café de Vienne en présence de
Ludo Moritz Hartmann et de Felix Somary. Schumpeter souligna combien la
révolution socialiste de Russie lui procurait une grande satisfaction. Désormais,
le socialisme ne se bornerait plus à un programme sur le papier, il aurait à
prouver sa viabilité.

«Ce à quoi Weber répondit, en témoignant de la plus grande agitation, que
le communisme à ce stade de développement en Russie constituait
virtuellement un crime, qu'emprunter cette direction conduirait à une misère
humaine sans équivalent et à une terrible catastrophe.

« "Cela se passera tout à fait ainsi", répondit Schumpeter "mais quelle
parfaite expérience de laboratoire". "Un laboratoire où s'entasseront des
montagnes de cadavres", répondit Weber fiévreusement. "On pourrait dire la
même chose de n'importe quelle salle de dissection", répliqua Schumpeter. »

Cet échange se situe au tout début du régime bolchevique, puisque Max
Weber est mort en 1920. Ainsi, l'un des plus grands sociologues et l'un des
plus grands économistes de notre siècle étaient d'accord pour ne nourrir par
avance aucune illusion sur le communisme et pour en déceler les
dispositions criminogènes. Un point, cependant les séparait :

Schumpeter conservait encore une illusion que Weber n'avait pas, l'illusion
que les échecs et les crimes du communisme serviraient de leçon à l'humanité.
Exaspéré, le pauvre Weber ne put se maîtriser. Jaspers poursuit
: «Toute tentative pour les détourner vers d'autres sujets de conversation
échoua. Weber parlait de plus en plus fort et avec violence. Schumpeter
demeurait silencieux et de plus en plus sarcastique. Les autres participants
attendaient, écoutant avec curiosité, jusqu'à ce que Weber se lève
brutalement, s'écriant « je ne peux en entendre davantage », et quitte les
lieux, suivi de Hartmann qui portait son chapeau. Schumpeter, resté sur
place, remarqua en souriant : «Comment un homme peut-il crier si fort dans
un café ? »

En économiste, Schumpeter pensait que faillite vaudrait réfutation. En sociologue,
Weber savait qu'aucune utopie ne se sent jamais réfutée par sa
propre faillite.

1. Karl Jaspers, Three Essays: Leonardo, Descartes, Max Weber, Harcourt,
Brace and World, New York, 1964, p. 222.

Jean-François REVEL, La Grande Parade, 2000

;)
 
«Il revient à Socrate de l’avoir découvert dans toute son ampleur, écrit
encore Max Weber.» parlant du concept. C’était un génie ce Socrate… Dans toute son
ampleur, ça me fait penser à un témoin de Jéhovah frappant à ma porte
pour trompéter qu’il veut m’entretenir de Dieu : «Avez-vous lu la Bible?
C’est le plus grand livre du monde parce que le Dieu véritable en est
l’auteur.» Logique, non? Aujourd’hui encore, des musulmans me faisaient
une de leurs démonstrations logiques en soutenant Tariq Ramadan au sujet
de sa défense du voile que portent, soi-disant, librement les femmes : «Le
voile est une prescription, donc obligatoire mais il ne peut être imposé.» J’ai
eu beau leur expliquer que le syllogisme clochait de la patte droite, que
c’était du sophisme taillé à la hache, rien à faire. Ils réagissaient ainsi
parce que j’affirmais que Tariq Ramadan faisaient l’autruche sur la question
du voile. Je donnais mon avis parmi d’autres. Quand quelqu’un m’a lancé le
syllogisme présenté plus haut, je savais que je quittais le domaine du
raisonnement. Alors, je lui ai demandé de m’en dire plus. Cela a suffit pour
que la personne en question s’évanouisse dans les limbes de Bladi.net.
Puis, sont apparus les zonards, agressifs, vicieux et bêtes. Mais, bon, il en
va de même chez les intellos, sinon pire. C’est la vie!

Dans toute son ampleur, disais-je, citant Max Weber. Mais connait-il les
Upanishad, la Bhagavat-gita? Non. Ou il en a vaguement entendu parler. Et
puis, pourquoi lire des ouvrages étrangers à sa culture? Pour lui, qui ne
connait pas l’histoire générale des idées, sa propre croyance est de loin et
de haut la plus juste (mais il y a encore pas longtemps, l’histoire générale,
du monde, signifiaient les idées occidentales). Il en va de même ici, avec
l’expression de Weber. Franchement, de quelle ampleur nous parle-t-il?
A-t-il lu et étudié la littérature védique pour proclamer de telles
présomptions ? Quelle connaissance en a-t-il ? Il me fait penser à cette
petite histoire; c’est une grenouille qui tombe dans un puits. Là, d’autres
grenouilles y vivent et se pressent autour d’elle pour écouter ses
descriptions de l’ampleur du monde extérieur. Elles demandent : «L’océan
est-il beaucoup plus grand que notre puits? –Beaucoup plus grand! leur
répond la nouvelle venue –Trois fois plus grand! –Bien plus grand, mais très
très grand! –Oh, là, là, dix fois comme notre puits!» Et ainsi de suite. La
seule référence qu’elles ont, c’est la dimension du puits et ne peuvent
imaginer l’immensité de l’océan

Voyons voir…
 

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