La reprise des pourparlers indirects entre Washington et Téhéran inquiète Israël. Son gouvernement affiche détermination militaire et démarches diplomatiques. Pourtant, les critiques sur le retrait américain de l’accord sur le nucléaire iranien (JCPOA) en 2018, soutenu par Benjamin Netanyahou, se multiplient en Israël.
"Nous ne reculerons pas devant l'anéantissement d'Israël, pas même d'un millimètre. Nous voulons détruire le sionisme dans le monde", a déclaré le brigadier-général iranien Abolfazl Shekarchi, à une agence de presse iranienne, deux jours avant la reprise des négociations indirectes entre iraniens et américains à Vienne, ce lundi 29 novembre. Une mise en condition musclée qui ne laisse rien présager de bon. Certains diront que cela fait partie d’un jeu d’intimidation, que les Iraniens veulent obtenir l’arme nucléaire à des fins de domination régionale et ne tenteront rien contre l’Etat hébreu. Mais, les Israéliens, eux, ne le comprennent pas ainsi. "Vous savez, moi, quand quelqu’un dit qu’il veut éliminer les Juifs, j’ai tendance à le croire", confie un vieil homme, rescapé de la Shoah et qui a vu périr une grande partie des siens sous le nazisme.Or, le 29 novembre est une date symbolique dans la psyché israélienne. Elle évoque le vote des Nations Unies en 1947 décidant du partage de la Palestine mandataire en deux Etats, l’un arabe, l’autre juif où justement une partie des survivants de la Shoah ont trouvé refuge. Mais, aujourd’hui, le 29 novembre, pourrait devenir une date funeste pour Israël, celle qui annonce une opération militaire majeure. Car de son côté, Naftali Bennett, le Premier ministre israélien, a lui aussi, été clair bien que moins radical. "Même s'il y a un retour à un accord, Israël n'y est bien sûr pas partie prenante et n'est pas lié par celui-ci", déclarait-il y a quelques jours. Autrement dit, Israël se réserve le droit de mener une opération en Iran, seul ou avec le soutien de certains de ses alliés.
L'atout de la coopération avec les Emirats et le Bahreïn
Selon le New York Times, au cours des vingt derniers mois, Israël a déjà mené quatre attaques contre des installations nucléaires en Iran et éliminé leur scientifique nucléaire, Mohsen Fakhrizadeh. Autant d’actions qui ont retardé le programme nucléaire iranien mais sans le détruire. Israël peut-il faire plus ? D’après une source étrangère proche du dossier, "le plan du chef d’Etat major, Aviv Kohavi, est très ambitieux et très complexe". La grande majorité des experts s’accorde à penser que l’attaque sera plus difficile que celle contre le réacteur nucléaire Osirak en Irak en 1981. Cependant, Israël dispose d’un nouvel atout, qui pourrait se révéler déterminant, à savoir sa coopération avec les Emirats Arabes Unis et le Bahreïn. "Il suffit de regarder une carte et de voir où sont Israël, l’Iran, les Emirats et le Bahreïn et l’on comprend à quel point ces deux derniers peuvent être importants si jamais une action militaire était nécessaire", souligne Chuck Freilich, ancien conseiller adjoint à la sécurité d’Israël.En attendant, Israël utilise aussi l’arme de la diplomatie. Après la visite du président israélien Itzhak Herzog à Londres la semaine dernière, c’est au tour du ministre des Affaires étrangères, Yaïr Lapid, de se rendre au Royaume-Uni ce lundi et en France mardi, deux pays membres du JCPOA. A Paris, il doit rencontrer son homologue, Jean-Yves Le Drian et le président Emmanuel Macron. A Londres, Yaïr Lapid, a souligné que "les Iraniens viennent à ces pourparlers pour une seule raison, obtenir la levée des sanctions" ; ce que les Iraniens disent eux-mêmes d’ailleurs. Une source proche du dossier ajoute : "L’Iran veut gagner du temps. On va se faire balader. Ce sont les meilleurs négociateurs du monde. Même si les Iraniens veulent seulement devenir un pays du seuil, c’est-à-dire capable de construire une bombe nucléaire, cela ne règle pas le problème de la prolifération dans la région".