Tensions au Liban : deuxième vague d'explosions d'appareils du Hezbollah
Les explosions attribuées à Israël de bipeurs et de talkies-walkies du Hezbollah pourraient provoquer une escalade susceptible de déboucher sur une guerre au Liban, voire avec l'Iran.
« La situation ne peut plus durer, il faut changer l'équilibre des forces avec le Hezbollah. » Benyamin Netanyahou avait lancé cette mise en garde à la milice chiite libanaise alliée de l'Iran quelques jours avant l'explosion de 3.000 bipeurs utilisés par le Hezbollah pour ses communications. Cette opération, sans précédent par son ampleur, a fait douze morts et des centaines de blessés graves mardi.
Mercredi après-midi, ce sont des talkies-walkies de la milice chiite qui ont explosé dans l'Est du Liban, faisant au moins cinq morts et 500 blessés, selon les médias libanais et des agences internationales. Les explosions, dont certaines se sont produites lors d'enterrement des victimes de la veille, ont provoqué des incendies et des scènes de chaos. Le Hezbollah a interdit aux chaînes de télévision locales de diffuser des images de la situation.
Les deux opérations ont été attribuées à Israël, qui ne les a pas revendiquées officiellement. Le gouvernement israélien a fait un pas de plus mardi dans l'escalade verbale. Pour la première fois depuis le début du conflit avec le Hamas à Gaza, il a proclamé que le retour de 60.000 Israéliens contraints de fuir leur foyer à la suite de tirs du Hezbollah vers les localités proches de la frontière libanaise constituait désormais un objectif de guerre, au même titre que l'éradication du pouvoir du Hamas.
Des « surprises » pour le Hezbollah
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Jusque-là, les affrontements étaient limités. Aux attaques du Hezbollah répondaient des raids aériens à répétition de l'aviation israélienne contre des objectifs au Liban liés à la milice chiite. Mais ces règles semblent désormais ne plus être à l'ordre du jour. Yoav Gallant, le ministre israélien de la Défense, a également prévenu qu'Israël avait préparé des « surprises » pour le Hezbollah en cas de conflit généralisé.
Sur le terrain, l'armée israélienne a modifié la répartition de ses forces ces derniers jours en diminuant ses effectifs dans la bande de Gaza. Dans l'enclave, l'appareil militaire du Hamas a été en grande partie anéanti après onze mois de combats, et 17.000 membres de la branche militaire du mouvement islamiste palestinien ont été éliminés, selon le décompte de Tsahal.
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Cette hécatombe a permis à l'armée israélienne de déployer des renforts sur le front nord et de placer les unités de défense aérienne dans ce secteur en état d'alerte renforcé. Toute la question est de savoir si, désormais, Benyamin Netanyahou va sauter le pas et donner son feu vert à une invasion terrestre israélienne dans le sud du Liban pour repousser les forces du Hezbollah vers le nord et occuper une « zone tampon ».
Pressions américaines
Selon un sondage publié ce mercredi, 52 % des Israéliens se déclarent favorables à une opération terrestre au Liban, contre 30 % qui s'y opposent. De leur côté, les Etats-Unis exercent des pressions sur Israël pour éviter un tel scénario, susceptible de dégénérer en une guerre régionale impliquant l'Iran.
Une autre inconnue porte sur le choix du moment. Selon des sources américaines, la décision de provoquer les explosions à la chaîne des bipeurs serait avant tout due au fait que des responsables des services de sécurité du Hezbollah commençaient à soupçonner ces appareils d'avoir été piégés. Autrement dit, cette opération aurait été lancée prématurément pour des raisons avant tout opérationnelles.
Plusieurs commentateurs militaires israéliens, tout en se félicitant du « coup très dur » asséné au Hezbollah qui a semé le chaos au sein de la milice chiite, se sont bien gardés de tout triomphalisme. « Nous devons garder à l'esprit que pour le moment, rien n'a changé. En fait, les 60.000 Israéliens du nord d'Israël sont encore loin de pouvoir retourner dans leur foyer », constate ainsi le quotidien « Israel Hayom », plutôt orienté à droite. « La victoire sur tous les fronts n'est nulle part à l'horizon », ajoute sans illusion « Haaretz », un journal d'opposition de gauche.
Pascal Brunel (Correspondant à Tel-Aviv)