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Déjà un an que le Réseau des parlementaires contre la peine de mort au Maroc (RPCPM) a vu le jour. Dirigé et fondé par Khadija Rouissi, députée du Parti de l’Authenticité et Modernité (PAM), le réseau reste profondément déterminé à terminer son combat pour l’abolition totale de la peine de mort. Serait-on enfin à même de voir les fruits du combat de ce réseau, démarré il y a déjà plusieurs années? Le point sur le débat et entretien avec Khadija Rouissi.
Comment arriver à faire abolir une peine datant de plusieurs décennies au Maroc, ancrée dans les mœurs, et l’objet d’un combat souvent international? C’est la question que pose et repose souvent le RPCPM, par son combat et ses actions au niveau du Parlement. Ce réseau est ainsi décidé à agir sur tous les plans pour amener le Maroc à enfin ratifier le deuxième protocole facultatif relatif à l’abolition de cette peine ainsi qu’au statut de la Cour pénale.
La peine de mort n’est plus pratiquée au Maroc depuis 1993 grâce à la volonté de feu S.M. Hassan II et de S.M. le Roi Mohammed VI». Le parti du PJD a maintenu leur opposition de principe à la suppression de la peine capitale du code pénal, mais veulent plutôt sa régulation. Ils proposent, à cet effet, d’instaurer un moratoire de dix ans pour les condamnés et de ne passer à l’exécution par balle, le mode employé au Maroc, qu’après le refus de la demande de grâce royale présentée par le détenu.
Au Maroc, les crimes passibles de la peine capitale, selon le code pénal, sont au nombre de 30 dont 6 concernent le droit militaire. De 1982 à 1993, seules deux exécutions ont été effectuées. Depuis même si des condamnations à la peine de mort sont encore prononcées, elles n’ont plus été appliquées. « Il s’agit au Maroc d’un moratoire non-officiel, puisqu’il n’a pas été voté. Mais, de fait, il suffit de faire une demande d’amnistie à SM le Roi Mohammed VI, pour voir sa peine capitale évitée », explique la parlementaire. « En ne répondant à aucune demande d’amnistie, SM le Roi entretient ce moratoire non-officiel. Mais à présent, il faudrait rendre l’abolition officielle et automatique! Le Maroc, qui a connu des avancées considérables en matière des droits de l’Homme, doit prochainement abolir la peine de mort. Cette abolition est imminente, d’autant plus que la Constitution de 2011 consacre le droit à la vie. Il y a aujourd’hui une tendance mondiale à l’abandon de cette peine et à la consécration du principe fondamental de l’intégrité physique. Il est temps de finir avec le châtiment corporel », affirme Khadija Rouissi, soulignant la création en février 2013 du réseau des parlementaires marocains contre la peine de mort dont elle assure la coordination.
Même si le chemin semble être encore long, l’abolition de la peine capitale au Maroc pourrait placer le royaume comme premier pays du monde musulman à abolir la peine de mort. Prochaine étape: la discussion au sein de la Commission de Justice et Liberté en Avril prochain, pour clarifier les arguments de l’abolition.
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Pour Khadija Rouissi, la tendance mondiale à l’abolition est inéluctable pour le Maroc. Entretien.
ILLI: Quels sont vos arguments en faveur de l’abolition de la peine de mort au Maroc?
Khadija Rouissi: La peine de mort porte atteinte au droit à la vie, un droit que seul Dieu accorde et dont personne d’autre ne peut nous priver. L’expérience de l’erreur judiciaire doit nous faire prendre conscience que c’est le côté irréversible de cette peine qui est intolérable. Plus de 162 cas de peines capitales dans le monde ont condamné des innocents et il est évidement impossible de réviser ces peines une fois celles-ci appliquées.
ILLI: Les opposants à l’abolition avancent l’argument de la dissuasion par la peine de mort. Comment réfutez-vous cet argument ?
KR: De nombreuses études ont prouvé que la peine de mort n’a aucun effet de dissuasion sur les criminels. Plusieurs exemples le prouvent: le putsch militaire de 1971 l’illustre. Ses auteurs ont tous été mis à mort, et cela n’a pas empêché une deuxième tentative en 1972. Un autre exemple très célèbre et que les pro-peine capitale utilisent pour justifier celle-ci: le meurtrier de Taroudant, condamné à la peine capitale. En dépit de cette condamnation, un second meurtrier a réapparu dans la même ville, aussi petite soit-elle.
Ainsi, nous posons la question: à quoi bon tuer un criminel si cela n’a aucun effet sur la société? Il est possible et préférable de le priver de sa liberté et l’écarter de la société le temps nécessaire, jusqu’à ce qu’il soit garanti qu’il ne récidivera pas. Par ailleurs, nous prônons une autre lutte contre le crime, à travers l’éducation, la formation, l’intégration, l’encadrement, qui sont des solutions humaines et adaptées.
ILLI: Le Maroc est-il sur le point d’enfin abolir la peine capitale?
KR: Depuis 1993, plus aucune peine de mort n’a été appliquée. Mais paradoxalement, elles continuent à être prononcées ! Cette situation met le pays dans l’embarras et son honneur en péril. Le monde entier va dans le sens de l’abolition, et je suis convaincue que le Maroc suivra le même mouvement. Il faut cependant l’y aider et se battre pour cela. Il y a longtemps l’esclavage fut aboli, des pas importants ont été franchis: la réforme du code de la famille, la reconnaissance des droits culturels, l’égalité entre les sexes etc. L’abolition de la peine de mort aura un impact sur tout le système judiciaire en général, ainsi que sur toute la philosophie de la justice, et au long terme, sur la société.
Source et suite (Illion Web) : LE MAROC EST-IL SUR LE POINT D’ABOLIR LA PEINE CAPITALE?
Comment arriver à faire abolir une peine datant de plusieurs décennies au Maroc, ancrée dans les mœurs, et l’objet d’un combat souvent international? C’est la question que pose et repose souvent le RPCPM, par son combat et ses actions au niveau du Parlement. Ce réseau est ainsi décidé à agir sur tous les plans pour amener le Maroc à enfin ratifier le deuxième protocole facultatif relatif à l’abolition de cette peine ainsi qu’au statut de la Cour pénale.
La peine de mort n’est plus pratiquée au Maroc depuis 1993 grâce à la volonté de feu S.M. Hassan II et de S.M. le Roi Mohammed VI». Le parti du PJD a maintenu leur opposition de principe à la suppression de la peine capitale du code pénal, mais veulent plutôt sa régulation. Ils proposent, à cet effet, d’instaurer un moratoire de dix ans pour les condamnés et de ne passer à l’exécution par balle, le mode employé au Maroc, qu’après le refus de la demande de grâce royale présentée par le détenu.
Au Maroc, les crimes passibles de la peine capitale, selon le code pénal, sont au nombre de 30 dont 6 concernent le droit militaire. De 1982 à 1993, seules deux exécutions ont été effectuées. Depuis même si des condamnations à la peine de mort sont encore prononcées, elles n’ont plus été appliquées. « Il s’agit au Maroc d’un moratoire non-officiel, puisqu’il n’a pas été voté. Mais, de fait, il suffit de faire une demande d’amnistie à SM le Roi Mohammed VI, pour voir sa peine capitale évitée », explique la parlementaire. « En ne répondant à aucune demande d’amnistie, SM le Roi entretient ce moratoire non-officiel. Mais à présent, il faudrait rendre l’abolition officielle et automatique! Le Maroc, qui a connu des avancées considérables en matière des droits de l’Homme, doit prochainement abolir la peine de mort. Cette abolition est imminente, d’autant plus que la Constitution de 2011 consacre le droit à la vie. Il y a aujourd’hui une tendance mondiale à l’abandon de cette peine et à la consécration du principe fondamental de l’intégrité physique. Il est temps de finir avec le châtiment corporel », affirme Khadija Rouissi, soulignant la création en février 2013 du réseau des parlementaires marocains contre la peine de mort dont elle assure la coordination.
Même si le chemin semble être encore long, l’abolition de la peine capitale au Maroc pourrait placer le royaume comme premier pays du monde musulman à abolir la peine de mort. Prochaine étape: la discussion au sein de la Commission de Justice et Liberté en Avril prochain, pour clarifier les arguments de l’abolition.
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Pour Khadija Rouissi, la tendance mondiale à l’abolition est inéluctable pour le Maroc. Entretien.
ILLI: Quels sont vos arguments en faveur de l’abolition de la peine de mort au Maroc?
Khadija Rouissi: La peine de mort porte atteinte au droit à la vie, un droit que seul Dieu accorde et dont personne d’autre ne peut nous priver. L’expérience de l’erreur judiciaire doit nous faire prendre conscience que c’est le côté irréversible de cette peine qui est intolérable. Plus de 162 cas de peines capitales dans le monde ont condamné des innocents et il est évidement impossible de réviser ces peines une fois celles-ci appliquées.
ILLI: Les opposants à l’abolition avancent l’argument de la dissuasion par la peine de mort. Comment réfutez-vous cet argument ?
KR: De nombreuses études ont prouvé que la peine de mort n’a aucun effet de dissuasion sur les criminels. Plusieurs exemples le prouvent: le putsch militaire de 1971 l’illustre. Ses auteurs ont tous été mis à mort, et cela n’a pas empêché une deuxième tentative en 1972. Un autre exemple très célèbre et que les pro-peine capitale utilisent pour justifier celle-ci: le meurtrier de Taroudant, condamné à la peine capitale. En dépit de cette condamnation, un second meurtrier a réapparu dans la même ville, aussi petite soit-elle.
Ainsi, nous posons la question: à quoi bon tuer un criminel si cela n’a aucun effet sur la société? Il est possible et préférable de le priver de sa liberté et l’écarter de la société le temps nécessaire, jusqu’à ce qu’il soit garanti qu’il ne récidivera pas. Par ailleurs, nous prônons une autre lutte contre le crime, à travers l’éducation, la formation, l’intégration, l’encadrement, qui sont des solutions humaines et adaptées.
ILLI: Le Maroc est-il sur le point d’enfin abolir la peine capitale?
KR: Depuis 1993, plus aucune peine de mort n’a été appliquée. Mais paradoxalement, elles continuent à être prononcées ! Cette situation met le pays dans l’embarras et son honneur en péril. Le monde entier va dans le sens de l’abolition, et je suis convaincue que le Maroc suivra le même mouvement. Il faut cependant l’y aider et se battre pour cela. Il y a longtemps l’esclavage fut aboli, des pas importants ont été franchis: la réforme du code de la famille, la reconnaissance des droits culturels, l’égalité entre les sexes etc. L’abolition de la peine de mort aura un impact sur tout le système judiciaire en général, ainsi que sur toute la philosophie de la justice, et au long terme, sur la société.
Source et suite (Illion Web) : LE MAROC EST-IL SUR LE POINT D’ABOLIR LA PEINE CAPITALE?