Renouvellement de l’Exécutif des Musulmans de Belgique, restons vigilants !

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Renouvellement de l’Exécutif des Musulmans de Belgique, restons vigilants !

Par Karim GEIRNAERT

Si certains d’entre vous l’ignorent encore, la communauté musulmane de Belgique, par le biais de son organe chef de culte (Exécutif des Musulmans de Belgique - EMB), planche actuellement sur un nouveau modèle de représentativité à transmettre au SPF Justice.

Selon certains, il semble en effet que la précédente formule en vigueur ne rencontre pas l’efficacité souhaitée, bien que l’origine exacte de sa défaillance n’ait encore jamais fait l’objet d’une étude sérieuse. Si bien que l’on ne sait toujours pas, à l’heure actuelle, si les dysfonctionnements constatés proviennent d’une erreur de choix structurel ou bien d’une mauvaise utilisation du système, par des personnes manifestement incompétentes et/ou animées d’intentions peu louables…

Reste que le Ministre de la Justice attendait pour cette fin d’année 2009 un projet concret de la part de l’EMB, à qui il avait donné le mandat de mener des concertations au sein de la communauté musulmane en vue de la mise sur pied d’une nouvelle structure. Mais les dissensions internes et le manque de méthodologie dont ont fait preuve les membres de l’EMB ne leur ont pas permis de remplir l’importante mission qui leur avait été confiée.

Profitant de l’amateurisme pratiqué par l’EMB, la Fondation Diyanet de Belgique a concocté dans les coulisses un projet de renouvellement qu’elle entend maintenant imposer à toute la communauté musulmane de Belgique !...

Avant d’en venir à ce fameux projet, rappelons en quelques mots ce qu’est Diyanet…


Fondation Diyanet de Belgique


Surnommée « le Vatican turc », il s’agit du Ministère turc des affaires religieuses. Sa tâche est d’organiser et de coordonner les institutions qui sont sous sa coupe, dans le domaine de la religion musulmane. Ainsi, elle gère et finance près de la moitié des mosquées turques en Belgique, y envoie et paie des imams formés en Turquie. Pas mal d’associations turques ont également un lien avec elle.

« La Diyanet a son siège chaussée de Haecht à Schaerbeek. Elle entend garder le leadership religieux parmi les 150.000 Turcs de Belgique. Rien n’est laissé au hasard : entretenir l’identité turque (cours de langue, de danse..), servir la communauté (cours de coran, fêtes musulmanes…), gérer les rapatriements funéraires…

Le président de la Fondation Diyanet a le statut de conseiller diplomatique à l’ambassade de Turquie. L’institution est en contact permanent avec les autorités belges (ministères, Sûreté, Office des étrangers..). Mais une certaine opacité règne sur ces liens officieux.

En décembre 2005, plusieurs voix internes se sont élevées pour dénoncer les problèmes de financement de la Diyanet, son manque de transparence budgétaire, son absence de visibilité, son déficit médiatique. » (H.D., Le Soir, 6 novembre 2006).

Prétendant être « organisée », elle utilise en réalité des procédés peu démocratiques, ne laissant guère de place à la liberté de penser et d’agir à ceux qui sont sous sa coupe.

Pourquoi tient-elle tellement à avoir une place de choix au sein de l’organe représentatif des musulmans de Belgique ?

Nous apprenions dans le Vif l’Express du 3 avril 2009 que, « suite à une décision de l’ancienne ministre de la Justice, Laurette Onkelinx (PS), les imams ne reçoivent plus automatiquement leur visa, alors que la Diyanet les relève tous les trois ans pour éviter qu’ils perdent leur caractère « turc ». (M.-C.R.)

C’est bien là que le bât blesse : la Turquie craint que les membres de sa diaspora ne perdent leur identité turque, en réalité, ne s’intègrent dans leur nouveau pays d’accueil... Elle imagine qu’en gardant la mainmise sur l’EMB, par l’intermédiaire de la Diyanet, elle pourra garantir l’envoi en Belgique d’imams turcs pour un temps suffisamment court qu’il ne leur permette pas d’apprendre ni la langue, ni les us et coutumes de notre pays…Elle pense ainsi contribuer au maintien de la population belge d’origine turque sous son joug.

D’où son intérêt de faire avaliser le modèle de représentativité qu’elle préconise…


Système de délégation proposé par la Diyanet


Ce système consiste à confier la gestion du temporel du culte musulman aux « grandes fédérations ». En réalité, il n’existe en Belgique que deux fédérations : La Diyanet justement, et le Milli Görüs (mouvement politico-religieux turc). Quelques représentants marocains auto-proclamés soutiennent également ce modèle car il constitue leur seule chance de trouver une place dans la future instance représentative des musulmans de Belgique.


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Ce modèle est basé sur les délégations. Il permettrait à la Diyanet de désigner directement et unilatéralement ses représentants, écartant de la sorte le système électoral qui était en vigueur en 1998 et en 2005. Elle avait pourtant bénéficié de ce système en 2005, profitant d’un large boycott des élections par une grande partie de la communauté marocaine, qui souhaitait de la sorte protester contre l’ingérence de l’État belge dans le processus d’institutionnalisation de l’Islam.

Elle avait ainsi appuyé la désignation de présidents d’origine turque issus de son réseau à la tête de l’EMB, en 2005 et 2008, pour s’en assurer le contrôle et faciliter la réalisation de ses projets.

Michaël Privot, belge converti à l’islam et islamologue, mettait en garde contre ce système de délégation préconisé par la Diyanet dans une Carte blanche parue dans Le Soir du 6 mars 2008 : « Aucune réelle fédération n’existant pour les autres communautés, cela revient à proposer que l’Etat turc gère directement les affaires des musulmans de Belgique ».

De même, le Vif l’Express du 3 avril 2009 mentionnait que ce modèle « serait le retour en force de l’ « islam des ambassades ». Il n’est pas sûr que le gouvernement raffole de cette formule, pas plus que les musulmans qui cherchent à vivre leur religion dans un cadre belge, sans subir la tutelle de leur pays d’origine ». (M.-C.R.)

Enfin, Nouria Ouali et Souhail Chichah, chercheurs à l'ULB précisaient dans leur Carte blanche parue dans Le Soir du 31 mars 2008 que "Les propositions de nommer un nouvel exécutif sur la base de la reconnaissance des fédérations existantes ou d’organiser des assises ne sont, en aucune manière, destinées à sortir l’organe musulman du chef du culte de ses difficultés actuelles, mais visent au contraire à privilégier des intérêts partisans et à restaurer, voire à relégitimer les interventions extérieures (belges ou étrangères) alors qu’elles sont précisément une des principales pierres d’achoppement sur laquelle bute cet organe."

Est-ce le modèle souhaité par la communauté musulmane de Belgique, la société civile, les autorités belges ? Il désavantagerait en tout cas sans conteste la communauté musulmane de Belgique d'origine marocaine, plus importante en nombre que la communauté d'origine turque et non organisée en fédérations, ainsi que tous les membres issus des « minorités ethniques » (africains, pakistanais, européens de l’Est, belges convertis…), sans oublier la gente féminine. Rien ne prouve non plus que la communauté turque elle-même soutienne ce système de représentation. Les mosquées relevant de la Diyanet ont-elles réellement leur mot à dire quand on sait que leurs dirigeants n’en sont pas propriétaire mais bien…l’État turc ?
 
Qu’en pensent les musulmans de Belgique ?

La communauté musulmane de Belgique est composée de plus de 400.000 personnes, dont la grande majorité a le souci de s’inscrire dans un cadre citoyen et démocratique, et souhaite pratiquer un islam pacifique et « à la belge ».

Plusieurs voix commencent à s’élever en son sein pour réclamer de nouvelles élections devant mener à la constitution d’un nouvel organe chef de culte.

Celles qui ont été organisées en 1998 et 2005 pourraient être peaufinées et améliorées pour éviter les erreurs du passé. Comme le disaient Nouria Ouali et Souhail Chichah, dans leur Carte blanche précitée, "Cette procédure contribue, à chaque élection, à une réelle et potentielle ouverture du chef du culte plutôt qu’à la constitution d’une structure figée et immuable. Ce processus électif, unique pour une religion, permet de refléter les changements sociologiques de la population musulmane, de faire émerger des tendances issues du terroir, de diluer l’influence des pouvoirs étrangers, mais aussi d’associer les femmes à la gestion du temporel du culte, ce dont on ne trouve que très peu d’équivalent dans les structures fédérales des autres religions. Ce système électif doit donc être amélioré plutôt que disqualifié, notamment, par ceux qui veulent figer les rapports de force en jeu au détriment d’une réelle représentativité démocratique".

D’autres pistes peuvent encore être explorées. Mais il faut à tout prix que la communauté musulmane actuellement silencieuse se fasse entendre, si elle ne veut pas se voir imposer un modèle de représentativité qui ne lui convient pas et ne lui correspond pas.

Quel que soit le système qui sera adopté, il devra mettre l’accent sur la compétence de ceux et celles qui le composeront, ainsi que la connaissance d’une des deux langues nationales, et le contexte et les institutions belges. Le futur EMB n’a pas forcément besoin d’être composé d’imams ni de théologiens – à tout le moins pour ce qui est de la gestion du temporel du culte, car leur rôle reste primordial pour le volet religieux ! – mais de gens formés et capables de négocier avec les autorités étatiques belges. Il faut également que les futurs membres soient exempts de tout intérêt personnel ou pécuniaire…

Il y a lieu en tout cas de développer un Islam européen et belge, et ce dernier ne peut se réaliser que si l’on évite à tout prix l’ingérence des États étrangers. Bien entendu, ceci n’empêche nullement d’entretenir une entente cordiale, voire même une coopération harmonieuse avec ces pays.

Espérons que la communauté musulmane se réveille à temps …

Karim GEIRNAERT

Bruxelles, le 23/12/2009.

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"Espérons que la communauté musulmane se réveille à temps …"

La Communauté est plus que réveillée,elle a boycoté en masse l'élection de l'Exécutif!
Elle n'attend rien en retour!
 
Le boycott, c'était il y a bientôt 5 ans. Depuis, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts...

Les musulmans doivent maintenant regarder de l'avant et prendre leur avenir en main, pour éviter surtout de se laisser berner par les opportunistes de tous bords
 
Je pense que les marocains devraient assumer leurs boycott et cessés de mettre des bâtons dans les roues des turques qui ont accepté massivement le jeu de la démocratie.
 
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