Sarkozy se dit "daccord" avec Obama sur la liberté du port du voile islamique
LEMONDE.FR Mis à jour le 07.06.09 | 20h15
Caen, Envoyé spécial
Je suis totalement d'accord avec le discours du président Obama, y compris sur la question du voile"[/B0], a expliqué le président Sarkozy, samedi 6 juin à Caen. Dans un discours sur l'islam prononcé au Caire deux jours plus tôt, M. Obama avait dit qu' "il importe que les pays occidentaux évitent d'empêcher les musulmans de pratiquer leur religion comme ils le souhaitent, par exemple en dictant ce qu'une musulmane devrait porter". La déclaration avait été vue comme une attaque contre la législation de certains pays européens, notamment la loi française de 2004 qui a de facto mis fin au port du foulard dans les écoles publiques françaises.
"En France une jeune fille qui veut porter le voile peut le faire. C'est sa liberté", a assuré le président français, estimant que la France y mettait "deux limites, parce que nous sommes un Etat laïque". "La première, c'est qu'au guichet des administrations, les fonctionnaires ne doivent pas avoir de signe visible de leur appartenance religieuse", a poursuivi le président. La "deuxième réserve" vise à s'assurer que la décision de porter le voile émane du "libre choix" des jeunes filles musulmanes et ne soit pas imposé "par leur famille ou par leur entourage". Car la France est un pays "où l'on respecte la femme". M. Sarkozy a affirmé avoir beaucoup fait lorsqu'il était ministre de l'intérieur "pour que les musulmans puissent vivre leur foi comme n'importe quelle religion". Dans la soirée, l'entourage de Nicolas Sarkozy précise tout de même : "Il est bien évident que le président de la République n'est pas pour le port du voile à l'école. C'est ce qu'impose la loi."
M. Sarkozy a qualifié le discours du Caire de "remarquable". "Il y a bien longtemps que nous attendions que les Etats-Unis, première puissance du monde, prennent toutes leurs responsabilités pour éviter un choc des cultures entre l'Occident et l'Orient", a-t-il poursuivi.
Barack Obama a explicité ses intentions: "Ce que j'ai essayé de faire au Caire, c'est d'ouvrir une conversation dans les pays musulmans mais aussi dans les pays non musulmans
Nous ne devrions pas avoir deux normes sur la liberté d'expression religieuse, l'une pour les musulmans et l'autre pour les non musulmans".
"LAISSEZ NOUS AU MOINS UNE LÉGÈRE DIVERGENCE"
Second point d'accroche, l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne (UE), qui s'est invitée dans le débat à la veille des élections européennes. "Sur l'objectif on est d'accord
C'est que la Turquie puisse jouer tout son rôle de passerelle entre l'orient et l'occident. Quand il y a une différence, c'est sur les modalités", a affirmé le président Français, réitérant sa proposition de créer un "espace économique et de sécurité commun" associant l'UE, la Turquie et la Russie. "Cela ne veut pas dire qu'il faut repousser la Turquie dans les ténèbres", a affirmé M. Sarkozy.
M. Obama a pris la précaution de rappeler que les Etats-Unis n'étaient pas membre de l'UE et qu'ils n'avaient pas à en "dicter les modalités" d'entrée. "L'adhésion de la Turquie à l'UE serait importante", a-t-il toutefois répété. "Laissez nous au moins une légère divergence", a argumenté M. Sarkozy, utilisant l'argument de ceux qui l'accusent de s'être aligné en tout point sur la politique étrangère des Etats-Unis.
Enfin, les deux présidents ont cherché à déminer les polémiques sur la brièveté de leurs entretiens, alors que la famille Obama passe le week-end à Paris. Nicolas Sarkozy a longtemps souhaité organiser une visite plus démonstrative à Paris et à l'Elysée, mais n'a pas obtenu l'accord du président américain. "Vous croyez qu'on n'a pas autre chose à faire que des belles photos en papier glacé, s'est agacé Nicolas Sarkozy. On est là pour travailler, pour obtenir des résultats". Barack Oabama a répondu à un reproche qui lui a aussi été fait en Allemagne, qu'il a traversée en coup de vent." J'adorerais passer une semaine à Paris, sortir avec ma femme dans de bons restaurants, naviguer sur la Seine et pique-niquer au jardin du Luxembourg. Tout cela, c'est fini. Pour l'instant", a expliqué M. Obama. "Les bons amis ne se soucient pas des symboles, des protocoles des conventions
Ce n'est pas nécessaire de passer beaucoup de temps à chaque fois".
Arnaud Leparmentier
source: Le Monde