Gustave Le Bon (1884)
La civilisation des Arabes
page 607
Les Arabes réussirent en quelques siècles à transformer matériellement et intellectuellement l'Espagne, et à la placer à la tête de toutes les nations de l'Europe. Mais la transformation ne fut pas seulement matérielle et intellectuelle, elle fut également morale. Ils apprirent, ou au moins essayèrent d'apprendre aux peuples chrétiens, la plus précieuse des qualités humaines : la tolérance. Leur douceur à l'égard de la population conquise était telle qu'ils avaient permis à ses évêques de tenir des conciles : ceux de Séville en 782 et de Cordoue en 852 peuvent être cités comme exemples. Les nombreuses églises chrétiennes construites sous la domination arabe sont également des preuves du respect avec lequel ils traitaient les cultes placés sous leur loi.
Beaucoup de chrétiens s'étaient convertis à l'islamisme, mais ils n'avaient que bien peu d'intérêts à le faire, car les chrétiens vivant sous la domination arabe et nommés pour cette raison Mozarabes étaient traités, de même du reste que les juifs, sur le même pied que les musulmans, et pouvaient comme eux aspirer à toutes les charges de l'État. L'Espagne arabe étant le seul pays de l'Europe où les juifs étaient protégés, ces derniers avaient fini par y devenir très nombreux.
À leur grande tolérance, les Arabes d'Espagne joignaient des murs très cheva* leresques. Ces lois de la chevalerie : respecter les faibles, être généreux envers les vaincus,
tenir religieusement sa parole, etc., que les nations chrétiennes adoptèrent plus tard, et qui finirent par exercer sur les âmes une action plus puissante que celles de la religion même, furent introduites par eux en Europe.
La civilisation des Arabes
page 607
Les Arabes réussirent en quelques siècles à transformer matériellement et intellectuellement l'Espagne, et à la placer à la tête de toutes les nations de l'Europe. Mais la transformation ne fut pas seulement matérielle et intellectuelle, elle fut également morale. Ils apprirent, ou au moins essayèrent d'apprendre aux peuples chrétiens, la plus précieuse des qualités humaines : la tolérance. Leur douceur à l'égard de la population conquise était telle qu'ils avaient permis à ses évêques de tenir des conciles : ceux de Séville en 782 et de Cordoue en 852 peuvent être cités comme exemples. Les nombreuses églises chrétiennes construites sous la domination arabe sont également des preuves du respect avec lequel ils traitaient les cultes placés sous leur loi.
Beaucoup de chrétiens s'étaient convertis à l'islamisme, mais ils n'avaient que bien peu d'intérêts à le faire, car les chrétiens vivant sous la domination arabe et nommés pour cette raison Mozarabes étaient traités, de même du reste que les juifs, sur le même pied que les musulmans, et pouvaient comme eux aspirer à toutes les charges de l'État. L'Espagne arabe étant le seul pays de l'Europe où les juifs étaient protégés, ces derniers avaient fini par y devenir très nombreux.
À leur grande tolérance, les Arabes d'Espagne joignaient des murs très cheva* leresques. Ces lois de la chevalerie : respecter les faibles, être généreux envers les vaincus,
tenir religieusement sa parole, etc., que les nations chrétiennes adoptèrent plus tard, et qui finirent par exercer sur les âmes une action plus puissante que celles de la religion même, furent introduites par eux en Europe.