Guerre en Ukraine: avec 92% d’opinions favorables, un plébiscite pour l’entrée dans l’Union européenne
Une nouvelle décision aux accents géopolitiques sinon émotionnels attend les Vingt-Sept en décembre. Bien conscients, par ailleurs, du bouleversement qu’entraînerait l’arrivée de ce « géant » de 45 millions d’habitants à la table européenne…
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C’est un sondage, réalisé en pleine guerre. Mais son résultat est sans appel : 92 % des Ukrainiens interrogés souhaitent une adhésion de leur pays à l’Union européenne d’ici 2030. Avant le lancement de l’offensive russe du 24 février 2022, ils étaient 67 % à se prononcer en faveur d’une adhésion immédiate. Merci qui ? Merci M. Poutine…
Le sondage, dont les résultats sont rapportés vendredi par le site d’informations européennes Euractiv, a été effectué par l’Institut international de sociologie de Kiev pour le National Democratic Institute (NDI), un groupe de réflexion démocrate basé à Washington. La recherche a été effectuée du 4 au 16 janvier, auprès de 2.508 adultes, et est « représentative de la population adulte équipée de numéros de téléphones mobiles ukrainiens », précise le NDI. L’enquête a exclu les populations vivant dans les territoires de la partie du Donbass, qui échappaient au contrôle de Kiev avant l’assaut de février.
Un sondage effectué à peu près au même moment par le centre de recherche sociologique Rating à Kiev aboutit au même constat : 87 % pour l’adhésion à l’UE contre 65 % en 2022 et 58 % un an plus tôt. La tendance est similaire pour l’adhésion à l’Otan (86 %). « Ce qui était autrefois l’un des sujets les plus controversés en Ukraine bénéficie aujourd’hui d’un soutien égal dans tout le pays, y compris à l’Est et au Sud. En fait, les Ukrainiens sont plus engagés que jamais en faveur de l’adhésion à l’UE et à l’Otan », pointe le NDI.
L’entrée dans l’Otan, certes promise par les Alliés en 2008 mais sans calendrier et sur fond de dissensions profondes entre les pays membres, reste totalement aléatoire. Certainement tant que la guerre se poursuit… à l’issue incertaine. Il en va autrement pour l’UE : les Vingt-Sept ont conféré à Kiev le statut officiel de candidat à l’adhésion lors de leur sommet de juin dernier.
C’était « un choix politique, au sens noble du terme, pas un choix technique, c’est clair », reconnaissait le président du Conseil européen Charles Michel dans l’entretien accordé au Soir le 20 février – le processus d’adhésion à l’UE est normalement encadré par les stricts « critères de Copenhague », qui exigent le rapprochement de l’impétrant avec les canons européens. Un chemin, avouaient plusieurs officiels de l’UE en « off », que Kiev empruntait plutôt… à rebours, avant l’offensive du Kremlin.
Les considérations géopolitiques sinon émotionnelles vont dès lors remettre une forte pression sur les dirigeants européens. Ceux-ci sont bien conscients, par ailleurs, du bouleversement qu’entraînerait l’arrivée de ce « géant » de 45 millions d’habitants à la table européenne, une nouvelle frontière avec la Russie aussi… Volodymyr Zelensky, le président ukrainien, a fait de la décision d’ouvrir les négociations d’adhésion d’ici la fin de l’année un objectif politique majeur. Charles Michel s’est engagé à mettre le point à l’ordre du jour du sommet de décembre. Les Vingt-Sept auront à se prononcer (à l’unanimité) sur base d’un rapport présenté à l’automne par la Commission, consacré à l’état de préparation du pays.
Il y a un an, l’idée d’octroyer le statut de candidat à l’adhésion à l’Ukraine était « irréaliste », admet un haut responsable de l’UE. « Il en va de même aujourd’hui par rapport à l’ouverture des négociations… » Kiev impressionne par la détermination à mettre en œuvre les principales réformes réclamées par la Commission. En pleine guerre ! L’ouverture des négociations, et donc la confirmation définitive d’une perspective d’adhésion, serait un « paramètre sûrement important » en vue d’éventuelles négociations de paix, « après tant de sacrifices », ajoute cette source, en première ligne du dossier. « C’est extrêmement important pour Zelensky. L’Ukraine fera tout ce qu’elle peut pour réaliser les réformes et obtenir un rapport positif de la Commission », estime le responsable.