Aucun peuple, plus que le marocain, ne mérite de la compassion et de la compréhension. Voici quelque temps, le colonel Kadiri avait fait état de ses mémoires sur les colonnes d’un quotidien de la place. Tout le monde était alors resté interdit, personne ne s’étant vraiment remis de l’énormité des révélations du colonel. Puis nous avions appris que l’homme était un des dinosaures de l’opposition… mais du temps de Hassan II – que Dieu ait son âme – ce temps-là où personne de ceux qui pérorent aujourd’hui ne pouvait ouvrir la bouche pour parler du Roi défunt ou à lui directement.
Nous ne sommes donc toujours pas remis de ces révélations que voilà qu’un autre homme, un octogénaire ou même nonagénaire (la date de naissance se perd dans les tréfonds de l’histoire) surgit encore… Mahjoubi Aherdane.
Dans un premier temps, j’ai trouvé du plaisir, avant d’en revenir, sur l’intérêt porté par mes confrères pour ces mémoires, lesquelles nous apprennent que Ben Barka était un agent d’ailleurs, que Fqih Basri était un dangereux imposteur et que l’assassin de Messaâdi fleurit toujours parmi nous.
Qui a dit cela ? C’est Mahjoubi., et quand Mahjoubi dit quelque chose, vous n’avez plus qu’à escamoter ce que vous ont dit vos parents, vos proches et mêmes vos moins proches. Il ne vous reste plus qu’à croire en ces mémoires d’un homme que la presse se plaît à appeler« Zaïgh« .
Un mien collègue l’a dit et je ne peux que l’approuver : « Les journalistes marocains présentent au public une Histoire d’un type nouveau, qui commence aujourd’hui ». Et à travers cela, nous découvrons les vertus du « canonisme ».
Le « canonisme » ne signifie pas ici une quelconque salve de canon ou de pierres comme celle reçue par la tête du ministre de l’Habitat et des Cailloux, mais bien l’âge canonique qui te fait prendre l’avantage sur tous ceux qui t’ont connu mais qui aujourd’hui sont atteints de sénilité ou d’Alzheimer et qui, de ce fait, sont bien incapables de démentir tes dires… Alors tu te lâches, tu narres et tu racontes, sûr que tu es que personne ne pourra t’apporter la réplique.
C’est pour cela qu’il faut compatir pour ce peuple marocain. Les nouvelles générations, qui ne se prennent pas du tout la tête avec toutes ces élucubrations, qui considèrent l’histoire comme des choses passées et sans importance, ne savent de l’histoire du pays que ce qu’a bien voulu leur en raconter les Kadiri et les Aherdane.
Les autres témoins de notre temps n’ont semble-t-il pas eu le temps d’écrire, occupés qu’ils étaient à faire l’histoire, cette même histoire que les menteurs s’apprêtaient à narrer, à leur façon.
Nous n’avons pas lu Allal el Fassi qui, suite à la publication de son « autocritique », est mort subitement au point que personne ne peut nous dire sa vérité.
Nous n’avons pas lu Ben Barka car l’homme se dirigeait vers un rendez-vous à propos d’un film, dont il est par la suite devenu le héros.
Nous n’avons pas lu les mémoires d’Omar Benjelloun car il pensait être un jeune dans la fleur de l’âge et n’avait jamais imaginé tomber un jour, bld al Massira à Casablanca, sous les coups d’un couteau porté par quelqu’un dont nous ignorons tout jusqu’à aujourd’hui encore.
Le grand Khattabi ne nous a rien laissé non plus et, pour le connaître, nous devrons nous contenter des approximations écrites à son sujet par des gars douteux.
Bref, les Marocains n’ont pas eu l’occasion de lire ce qu’avaient à dire leurs grands. Ils devront se suffire de la lecture des petits, de ceux qui n’ont jamais été des leaders et qui ne le seront jamais, malgré leurs rodomontades actuelles auxquelles ils ont fini par croire
eux-mêmes. Ces gens-là sont aidés par une certaine presse ignorante qui rendent un bien mauvais service à leur pays en applaudissant à tout rompre à des élucubrations et en jetant l’histoire dans la poubelle d’une mémoire dont tout le monde se moque désormais.
Et donc, en définitive, que restera-t-il aux Marocains ?
Eh bien, il leur restera l’histoire présente, ce qui est écrit et publié sur le net et sur youtube, il leur restera ce que nous avons produit et que nous affichons aux yeux du monde. Il leur restera des Abou Naïm, puis des Sina, puis des Mayssa, ou encore des Moul Dellaha (celui qui tape sur un acteur de caméra cachée), et autres Moul Casquita (celui qui tape sur des gens qui s’embrassent)…
Ceux qui ont traversé l’histoire du Maroc hier, quand il n’y avait ni youtube, ni twitter, ni facebook ni Instagram ni rien, sont donc passés et rien n’en restera. Même leurs écrits sur papier ne valent pas un kopeck aujourd’hui dans notre ère numérique. Voilà pourquoi les Marocains méritent pitié et compassion…
Mais la nature a horreur du vide, et nous, pour notre part, nous avons créé tellement de vide que nous sommes attachés et accrochés à tous ces salmigondis sortis d’esprits nébuleux et auxquels on confère une importance bien plus grande que nécessaire.
Et ainsi nous resterons, réfractaires à toute rémission, ouverts à toutes les aggravations et rechutes, et inscrit sur un seul registre : Nous ne pouvons ni ne pourrons nous libérer de cet Alzheimer qui nous touche.
http://www.panoramaroc.ma/fr/un-alzheimer-collectif-par-mokhtar-larhzioui/
Nous ne sommes donc toujours pas remis de ces révélations que voilà qu’un autre homme, un octogénaire ou même nonagénaire (la date de naissance se perd dans les tréfonds de l’histoire) surgit encore… Mahjoubi Aherdane.
Dans un premier temps, j’ai trouvé du plaisir, avant d’en revenir, sur l’intérêt porté par mes confrères pour ces mémoires, lesquelles nous apprennent que Ben Barka était un agent d’ailleurs, que Fqih Basri était un dangereux imposteur et que l’assassin de Messaâdi fleurit toujours parmi nous.
Qui a dit cela ? C’est Mahjoubi., et quand Mahjoubi dit quelque chose, vous n’avez plus qu’à escamoter ce que vous ont dit vos parents, vos proches et mêmes vos moins proches. Il ne vous reste plus qu’à croire en ces mémoires d’un homme que la presse se plaît à appeler« Zaïgh« .
Un mien collègue l’a dit et je ne peux que l’approuver : « Les journalistes marocains présentent au public une Histoire d’un type nouveau, qui commence aujourd’hui ». Et à travers cela, nous découvrons les vertus du « canonisme ».
Le « canonisme » ne signifie pas ici une quelconque salve de canon ou de pierres comme celle reçue par la tête du ministre de l’Habitat et des Cailloux, mais bien l’âge canonique qui te fait prendre l’avantage sur tous ceux qui t’ont connu mais qui aujourd’hui sont atteints de sénilité ou d’Alzheimer et qui, de ce fait, sont bien incapables de démentir tes dires… Alors tu te lâches, tu narres et tu racontes, sûr que tu es que personne ne pourra t’apporter la réplique.
C’est pour cela qu’il faut compatir pour ce peuple marocain. Les nouvelles générations, qui ne se prennent pas du tout la tête avec toutes ces élucubrations, qui considèrent l’histoire comme des choses passées et sans importance, ne savent de l’histoire du pays que ce qu’a bien voulu leur en raconter les Kadiri et les Aherdane.
Les autres témoins de notre temps n’ont semble-t-il pas eu le temps d’écrire, occupés qu’ils étaient à faire l’histoire, cette même histoire que les menteurs s’apprêtaient à narrer, à leur façon.
Nous n’avons pas lu Allal el Fassi qui, suite à la publication de son « autocritique », est mort subitement au point que personne ne peut nous dire sa vérité.
Nous n’avons pas lu Ben Barka car l’homme se dirigeait vers un rendez-vous à propos d’un film, dont il est par la suite devenu le héros.
Nous n’avons pas lu les mémoires d’Omar Benjelloun car il pensait être un jeune dans la fleur de l’âge et n’avait jamais imaginé tomber un jour, bld al Massira à Casablanca, sous les coups d’un couteau porté par quelqu’un dont nous ignorons tout jusqu’à aujourd’hui encore.
Le grand Khattabi ne nous a rien laissé non plus et, pour le connaître, nous devrons nous contenter des approximations écrites à son sujet par des gars douteux.
Bref, les Marocains n’ont pas eu l’occasion de lire ce qu’avaient à dire leurs grands. Ils devront se suffire de la lecture des petits, de ceux qui n’ont jamais été des leaders et qui ne le seront jamais, malgré leurs rodomontades actuelles auxquelles ils ont fini par croire
eux-mêmes. Ces gens-là sont aidés par une certaine presse ignorante qui rendent un bien mauvais service à leur pays en applaudissant à tout rompre à des élucubrations et en jetant l’histoire dans la poubelle d’une mémoire dont tout le monde se moque désormais.
Et donc, en définitive, que restera-t-il aux Marocains ?
Eh bien, il leur restera l’histoire présente, ce qui est écrit et publié sur le net et sur youtube, il leur restera ce que nous avons produit et que nous affichons aux yeux du monde. Il leur restera des Abou Naïm, puis des Sina, puis des Mayssa, ou encore des Moul Dellaha (celui qui tape sur un acteur de caméra cachée), et autres Moul Casquita (celui qui tape sur des gens qui s’embrassent)…
Ceux qui ont traversé l’histoire du Maroc hier, quand il n’y avait ni youtube, ni twitter, ni facebook ni Instagram ni rien, sont donc passés et rien n’en restera. Même leurs écrits sur papier ne valent pas un kopeck aujourd’hui dans notre ère numérique. Voilà pourquoi les Marocains méritent pitié et compassion…
Mais la nature a horreur du vide, et nous, pour notre part, nous avons créé tellement de vide que nous sommes attachés et accrochés à tous ces salmigondis sortis d’esprits nébuleux et auxquels on confère une importance bien plus grande que nécessaire.
Et ainsi nous resterons, réfractaires à toute rémission, ouverts à toutes les aggravations et rechutes, et inscrit sur un seul registre : Nous ne pouvons ni ne pourrons nous libérer de cet Alzheimer qui nous touche.
http://www.panoramaroc.ma/fr/un-alzheimer-collectif-par-mokhtar-larhzioui/