Une “guerre secrète” depuis près de 10 ans entre le gouvernement israélien et la CPI pour décourager les poursuites
La demande par le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) de mandats d’arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ministre de la Défense Yoav Gallant a fait l’effet d’une bombe. Un tel développement judiciaire est une désagréable première, pour Israël.Alors que l’État hébreu semblait prêt à tout pour décourager les poursuites.
Selon une enquête menée conjointement par le quotidien britannique The Guardian et les médias israéliens +972 et Local Call, les hautes sphères de l’État hébreu et ses services secrets craignaient depuis longtemps des poursuites de la CPI. Jusqu’à tout faire pour décourager la Cour: intimidations, écoutes, menaces,... Des accusations qui viennent s’ajouter à un dossier déjà chargé.
Une véritable guerre pour Tel-Aviv
Selon ces médias, cela ferait au moins neuf ans que Benjamin Netanyahu mettrait tout en œuvre pour saboter les enquêtes de la CPI à son égard. Principalement en suivant de près ce que faisait l’institution juridique internationale via les différents bureaux de renseignements israéliens: l’agence d’espionnage intérieur Shin Bet, la direction du renseignement militaire Aman, et la division de cyber-renseignement, l’Unité 8200. Le Premier ministre israélien a été décrit comme “obsédé” par les interceptions de renseignements sur la CPI et son personnel, selon une source au sein des renseignements.Cette “guerre” entre Israël et la CPI a commencé en 2015, avec la reconnaissance de la Palestine comme un État par l’Assemblée générale de l’ONU, ce qui lui permettait donc de rejoindre aussi la CPI, basée à La Haye.
Selon les sources militaires des médias qui ont participé à l’enquête, à partir de ce moment, Tel-Aviv s’est lancée dans une guerre secrète qui dure depuis neuf ans pour saboter l’institution judiciaire.
“L’ensemble de l’establishment militaire et politique [la considérait] comme une guerre qui devait être menée, et une qu'Israël devait défendre”, évoque un ancien responsable du renseignement. “Elle était décrite en termes militaires.”
Écoutes et intimidations
Le principal but des renseignements israéliens était de connaître à l’avance les preuves de crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité dont la CPI pouvait disposer.Ce qui passait par des écoutes clandestines à l’égard du procureur actuel de la CPI, Karim Khan, ainsi que sa prédécesseure Fatou Bensouda. Mais aussi des pressions sur des membres haut placés de la Cour, voire des menaces ou des tentatives de diffamation, parfois par l’entremise des États-Unis, relève The Guardian.
Le quotidien britannique note au passage qu’en émettant un mandat d’arrêt contre Netanyahu et Gallant, ainsi que des dirigeants du Hamas, le procureur de la CPI a rappelé que toute entrave au travail de celle-ci serait considéré comme “une offense criminelle”.
Plus tard, Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a appelé Israël à ne pas “intimider” et “menacer” les juges de la CPI.
Du côté d’Israël, on nie farouchement, tandis que la CPI a admis au Guardian être au courant des “activités proactives de collecte de renseignements menées par un certain nombre d’agences nationales hostiles à la cour.”
Mais celles-ci n’auraient jamais pu obtenir connaissance des preuves collectées et maintenues en sécurité par la CPI.
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