Wajdi Mouawad, Bertrand Cantat et les femmes battues

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ahmed II

Sweet & Sour
La tragédie grecque revue pas Wajdi Mouawad, notamment Les femmes de Sophocle, une pièce sur la violence et les femmes. Et qui a-t-il choisi pour y participer, pour la mettre en musique? Un meurtrier, Bertrand Cantat, un artiste qui a battu sa femme à mort, à coups de poing.

Cet incident survient quelque jour après qu’un ami marocain m’ait demandé ce que je pensais de son nouveau film, Incendie, que je n’ai pas vu. J’ais fait la moue. Je ne suis pas porté sur l’art de ce bonhomme. J’avais vu son film, Littoral, et après la séance, j’étais allé voir des proches de lui qui répondaient aux questions. Contrairement aux éloges qui pleuvaient sur la créativité de cet artiste, je trouvais le scénario bête et ringard. C’était l’histoire d’un cercueil, d’un mort, dont on cherchait un lieu approprié pour l’enterrer. Tous les vieux dogmes religieux et ringards du monothéisme y étaient reproduits avec une valeur surajoutée. J’ai donc rencontré une dame et lui ai fait part de mes réserves : « Vous autres Québécois, vous avez foutu à la poubelle toutes ces croyances religieuses, sources de conflits mortels, comme Littoral le rappelle si bien, et vous êtes là à vous extasier sur un film qui fait la promotion de ces anciennes traditions comme une nostalgie qui vous réchauffe le cœur?! Vous n’êtes pas un peu bizarres? » Elle en était restée littéralement bouche-bée.

Mon ami marocain comprendra mieux mon jugement, maintenant que Wajdi Mouawad a du mal à laisser tomber son ami. J’ai toujours déclaré que l’art et les artistes ne sont pas à l’abri du crime. Ce que j’écrivais aussi à propos de Roman Polanski. Les politiciens, comme Berlusconi, ça passent à la rigueur, du moins on peut comprendre que de tels individus puissent filer à travers les mailles de la morale; on peut aussi comprendre qu’en France, grâce à l’exception culturelle, Cantat et Mouawad puissent exposer leurs œuvres d’art sur une des scènes les plus populaires de ce pays, le festival d’Avignon; mais que Mouawad garde le silence malgré les remous qu’il cause, qu’il ne nous disent pas le motif qui l’a guidé pour engager à ses côtés un meurtrier, dusse-t-il être son grand ami, alors qu’il était conscient de la controverse qu’il soulèverait, et bien ce manque de responsabilité, cette hypocrisie, n’est pas pour me le rendre plus sympathique. Mon intuition quant à sa perspicacité artistique essentielle était juste.
 
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