RIFKI
Rifki
L.J : (
)La discussion sur la famille est souvent caricaturale. Pour les uns , conservateurs en général, nous vivons sous le régime de la démission des parents, de léclatement de la cellule de base de la société »,de lirresponsabilité masculine qui conduit au divorce minute, à la solitude des femmes abandonnées et au traumatisme des enfants ballottés dun parent à lautre. Pour les autres, nous avons renversé la dictature de lancien modèle autoritaire, pour entrer dans lère des familles libres, choisies, fondées sur laffection et non sur la tradition, où la personnalité de chacun sépanouit hors de toute contrainte sociale, où la séparation possible est même un gage dautonomie et de liberté. Dans le premier cas, on sinquiète pour une société fondée sur des bases aussi fragiles, dans le second , on fait léloge de la démocratie familiale, qui fonde et prépare la démocratie tout court.
Or ces deux raisonnements me paraissent pécher sur un point important. Certes, la famille est le premier lieu de la socialisation. Il y a évidemment un rapport entre sa structure et celle de la société. Selon que la famille est plus ou moins patriarcale, la société est sans doute plus ou moins démocratique. Emmanuel Todd, par exemple, à la suite de plusieurs grands anthropologues, fait deriver la nature de la vie politique de lorganisation originelle de la famille, selon quelle est plus ou moins autoritaire ou égalitaire, quitte à remonter très loin dans le temps. Mais son argumentation présente beaucoup de défauts, le principal étant quil met en rapport deux éléments la forme de la famille et les murs politiques- en oubliant les autres : la société obéit à bien dautres facteurs que la structure de la parenté.
Philippe Tesson : ( ) La famille, sans quil soit besoin de préciser de quelle famille on parle, est la première cellule de la socialisation, cest une cellule dans laquelle des relations dinégalité et de dépendance sont dépassées par lassignation des rôles respectifs, une cellule dans laquelle séprouvent les premières relations dautorité. Dans la mesure où cest là que lindividu fait la première expérience de la vie sociale, la famille est la cellule de base de la société, elle est en somme immédiatement politique et, en même temps, elle relève du domaine de la vie privée. Je ne fais que souligner une ambiguïté bien connue. La frontière entre la vie privée et le monde commun passe à lintérieur de la famille. Pour sen persuader, il suffit de considérer un exemple dactualité, celui de la mise en cause de la défaillance de lautorité parentale dans la traitement de la délinquance juvénile. Cest une question dordre privé : il sagit de la même manière dont des parents élèvent leurs enfants et exercent ou non sur eux une quelconque autorité. Mais cest aussi une question publique dans la mesure où le comportement des délinquants en société apparaît en partie comme le reflet dune démission de lautorité familiale, dans la mesure aussi où cest à la société, ou plus exactement à létat par lintermédiaire de la justice dexercer lautorité sur des enfants. Voilà pourquoi, ou voilà comment, la question de lautorité au sein de la famille devient une question politique ./.
Or ces deux raisonnements me paraissent pécher sur un point important. Certes, la famille est le premier lieu de la socialisation. Il y a évidemment un rapport entre sa structure et celle de la société. Selon que la famille est plus ou moins patriarcale, la société est sans doute plus ou moins démocratique. Emmanuel Todd, par exemple, à la suite de plusieurs grands anthropologues, fait deriver la nature de la vie politique de lorganisation originelle de la famille, selon quelle est plus ou moins autoritaire ou égalitaire, quitte à remonter très loin dans le temps. Mais son argumentation présente beaucoup de défauts, le principal étant quil met en rapport deux éléments la forme de la famille et les murs politiques- en oubliant les autres : la société obéit à bien dautres facteurs que la structure de la parenté.
Philippe Tesson : ( ) La famille, sans quil soit besoin de préciser de quelle famille on parle, est la première cellule de la socialisation, cest une cellule dans laquelle des relations dinégalité et de dépendance sont dépassées par lassignation des rôles respectifs, une cellule dans laquelle séprouvent les premières relations dautorité. Dans la mesure où cest là que lindividu fait la première expérience de la vie sociale, la famille est la cellule de base de la société, elle est en somme immédiatement politique et, en même temps, elle relève du domaine de la vie privée. Je ne fais que souligner une ambiguïté bien connue. La frontière entre la vie privée et le monde commun passe à lintérieur de la famille. Pour sen persuader, il suffit de considérer un exemple dactualité, celui de la mise en cause de la défaillance de lautorité parentale dans la traitement de la délinquance juvénile. Cest une question dordre privé : il sagit de la même manière dont des parents élèvent leurs enfants et exercent ou non sur eux une quelconque autorité. Mais cest aussi une question publique dans la mesure où le comportement des délinquants en société apparaît en partie comme le reflet dune démission de lautorité familiale, dans la mesure aussi où cest à la société, ou plus exactement à létat par lintermédiaire de la justice dexercer lautorité sur des enfants. Voilà pourquoi, ou voilà comment, la question de lautorité au sein de la famille devient une question politique ./.