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VIB
François Hollande est-il un président sous influence ? Il faut bien croire que oui. Depuis son investiture, un homme semble le conduire à la baguette notammant sur les grandes questions du monde. Cet homme est Laurent Fabius, son ministre des Affaires étrangères. Au Quai d'Orsay, c'est devenu même un motif de fierté tant la situation s'est renversée depuis l'ère Sarkozy ou des Mazarin comme Claude Guéant veillait à ce que ce soit la cellule diplomatique présidentielle qui donne le ton de la France à l'étranger. Mais avec quelles conséquences avec le Maghreb ?
" Avec Mitterrand, j'étais un jeune homme. Lui, un homme installé. Là, j'ai dix ans de plus que Hollande. On n'est pas du tout dans le même rapport " avait déclaré Fabius comme une sorte d'aveu de puissance, lui qui en effet a été Premier ministre alors que Hollande usait encore ses fonds de culotte sur les bancs de l'ENA.
" Ce n'est pas un ministre des Affaires étrangères ordinaire. Pas un ministre normal. C'est un ancien Premier ministre, il a une expérience d'État " reconnaît avec un rire pincé le Président lui-même. D'aucuns disent que Hollande, connu pour son hésitation et son inexpérience à l'international a besoin des précieux conseils de Fabius, mais que cette dépendance secrète le rend dangereusement indispensable au point de mettre le feu aux poudres avec un allié aussi essentiel que le Maroc.
" Loyal mais pas subordonné. Fabius a noué une alliance politique avec le Président qui lui permet de compter " affirme un diplomate, mais il ajoute que le fait de laisser Fabius en roue libre a aussi des conséquences néfastes.
Cette même source au Quai d'Orsay ajoute un élément clé de l'influence de Fabius dans les plus hautes sphères de l'Etat français : il est d'autant plus précieux que beaucoup de ceux qui comptent aujourd'hui ont travaillé un jour à ses côtés et occupent des postes clés dans l'appareil d'État ou les grandes entreprises.
Mieux encore, il distille aussi ses recommandations à Matignon. Cela a été le cas avec Ayrault qu'aujourd'hui avec Valls. Fabius ne dit-il pas d'ailleurs à qui veut l'entendre qu'il est " omniscient " ? Une fanfaronnade qui fait de lui un maître de l'immixtion pour peser sur telle ou telle décision, ce qui inquiète souvent les tenants d'un bon voisinage avec Rabat.
Renforcé par des amitiés durables, la galaxie Fabius compte nombre de cercles économiques, politiques, technocratiques ou culturels. Une manière d'agir qui rappelle le fonctionnement sournois des cercles cloisonnés, à la Mitterrand.
Depuis un temps, l'homme sait qu'il ne briguera plus la présidence de la République, lui que l'on dit usé par un Parkinson précoce. Il a donc jeté tous ses efforts pour demeurer dans l'Histoire en transformant ses atouts en réseaux de connivences et d'influence. Les réseaux fabiusiens sont très fournis, très efficaces, très divers. Une de ses chevilles ouvrières, Claude Roiron se défend du fait qu'il en abuse, mais ce qu'il présente comme un think tank lové dans la haute administration n'est en réalité qu'une puissante machine de lobbying, constituée d'experts et de technos aux dents longues. Un de ses hommes est Stéphane Israël, sa plume en réalité qui a été directeur de cabinet d'Arnaud Montebourg. Il a animé avec Bernard Pêcheur et Florence Parly les petits déjeuners du Café Musset et des déjeuners organisés au Bistrot de Paris ou chez Fabius lui-même. Des rencontres discrètes qui cherchaient entre autres à remettre coûte que coûte en selle le régime algérien sur la scène régionale.
Ses ouailles disent de lui qu'il est un facilitateur au service de la diplomatie économique, son cheval de bataille au Quai. Aussi, la Fabiusie fonctionne avec comme ordre de bataille l'entrisme et le pragmatisme à outrance. Ce n'est pas par hasard que dans la plupart des cabinets ministériels, on trouve aujourd'hui un fabiusien qui défend la suprématie d'un axe Paris-Alger au Maghreb.
Mais pour durer et laisser sa trace, Fabius remet souvent les couverts d'un PS à l'ancienne. Derrière son caractère poli et conciliateur, il cache mal qu'il est en fait un digne héritier d'une gauche poussièreuse, souvent hostile au Maroc, celle de 1981 qui avait vu arriver un François Mitterrand coriace et son épouse Danielle que Hassan II avait qualifiée d'"épouse morganatique".
Et avec le royaume chérifien, il se comporte en dinosaure socialiste, accumulant les impairs jusqu'à causer l'irréparable. N'est-il pas le principal responsable du long hiver glacial que traversent les relations bilatérales entre les deux pays ?
" En politique, quand ça va, c'est ennuyeux " marmonne-t-il souvent. Une raison pour laquelle il cultive des relations distantes avec Rabat et adopte une opinion ambivalente de Normand sur les sujets qui fâchent dont celui nodal pour le Maroc : le dossier du Sahara. De plus, " il a toujours fait en sorte que ses liens soient quasi-inexistants avec l'entourage du roi " confirme une source au Quai d'Orsay. Une manière de montrer à Alger qu'il veut lui marquer sa préférence.
Les raisons sont encore une fois historiques. Côté officiel, il suffit de rappeler ici que feu le roi Hassan II avait demandé l' adhésion du Maroc à l'Union européenne dans les années 1980, à l'occasion d'une visite mémorable à Rabat de Laurent Fabius alors Premier ministre de Mitterand. La proposition royale était de l'ordre du symbolique et devait tracer le long chemin que devait parcourir le royaume jusqu'à son obtention récente du " statut avancé " avec l'UE. Cassant, Fabius avait clairement rejeté cette demande au moment où il caressait dans le sens du poil une Algérie tenue par la junte militaire. On sait que depuis l'Algérie n'a pas été un bon compagnon de l'Europe, mais plutôt un frein à l'unité du Maghreb, seul gage d'une coopération étendue avec l'UE, contrairement au Maroc qui a su consolider un partenariat multi-formes avec ses voisins du Nord.
Une autre anecdote historique démontre le double-jeu permanant de Fabius à l'égard du Maroc. Invité à donner un discours au Palais Bourbon, Hassan II pénètre dans l'hémicycle sous les applaudissements, entouré des princes. Seuls certains députés socialistes, dont Laurent Fabius et Henri Emmanuelli. ne se lèveront pas. Cette marque de défiance avait révélé la duplicité de Fabius à l'égard du Maroc, alors que celui-çi affirmait pourtant que la venue du roi en France alors que les liens avec Paris étaient grippés, était non seulement souhaitable, mais nécessaire aux bonnes relations de voisinage entre les deux pays.
C'est de cette époque lointaine qu'on lui reconnaît un tropisme prononcé pour l'Algérie. Des décennies plus tard, ce penchant pour Alger ne s'est jamais démenti, lui qui avait favorisé la proximité de Hollande avec son conseiller politique Faouzi Lamdaoui, un natif de Constantine, récemment débarqué suite à un scandale de corruption. Un autre hollandais, l'eurodéputé Kader Arif aux racines algériennes avait aussi le soutien discret mais efficace de Fabius. Il sera à son tour limogé suite à de forts soupçons de malversations. Sans oublier bien entendu Arnaud Montebourg dont la hargne anti-marocaine avait provoqué quelques grincements de dents à Rabat: le chantre de la "démondialisation" a une vague attache avec l'Algérie par le biais de sa mère Leïla Ould Cadi, descendante d'un wali de l'Algérie française... Lui aussi est tombé du carrosse présidentiel suite à un récent remaniement ministériel.
Mais qu'à cela ne tienne. Fabius demeure un allié inconditionnel de l'Algérie socialiste avec qui il tente desespérement de nouer des liens économiques improbables et à qui il cache mal l'ambition de lui octroyer un statut de gendarme de la région, alors que le régime des généraux a démontré par le passé son incapacité à régenter les conflits qu'ils soient intérieurs ou régionaux. C'est pourquoi cette religion fabiusienne pour le Maghreb a de graves conséquences sur les relations franco-marocaines et met à mal l'équilibre sécuritaire en Afrique du Nord, mais aussi sur le théâtre européen, comme nous venons de le constater avec le tragique attentat contre Charlie Hebdo. Le vieux routier de la politique sécuritaire Charles Pasqua l'a bien relevé dans Le Figaro quand celui-çi pointait du doigt l'irresponsabilité française dans le gel de la coopération policière entre Rabat et Paris. Une coopération qui jusqu'ici a déjoué bien des attentats sur le sol français.
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" Avec Mitterrand, j'étais un jeune homme. Lui, un homme installé. Là, j'ai dix ans de plus que Hollande. On n'est pas du tout dans le même rapport " avait déclaré Fabius comme une sorte d'aveu de puissance, lui qui en effet a été Premier ministre alors que Hollande usait encore ses fonds de culotte sur les bancs de l'ENA.
" Ce n'est pas un ministre des Affaires étrangères ordinaire. Pas un ministre normal. C'est un ancien Premier ministre, il a une expérience d'État " reconnaît avec un rire pincé le Président lui-même. D'aucuns disent que Hollande, connu pour son hésitation et son inexpérience à l'international a besoin des précieux conseils de Fabius, mais que cette dépendance secrète le rend dangereusement indispensable au point de mettre le feu aux poudres avec un allié aussi essentiel que le Maroc.
" Loyal mais pas subordonné. Fabius a noué une alliance politique avec le Président qui lui permet de compter " affirme un diplomate, mais il ajoute que le fait de laisser Fabius en roue libre a aussi des conséquences néfastes.
Cette même source au Quai d'Orsay ajoute un élément clé de l'influence de Fabius dans les plus hautes sphères de l'Etat français : il est d'autant plus précieux que beaucoup de ceux qui comptent aujourd'hui ont travaillé un jour à ses côtés et occupent des postes clés dans l'appareil d'État ou les grandes entreprises.
Mieux encore, il distille aussi ses recommandations à Matignon. Cela a été le cas avec Ayrault qu'aujourd'hui avec Valls. Fabius ne dit-il pas d'ailleurs à qui veut l'entendre qu'il est " omniscient " ? Une fanfaronnade qui fait de lui un maître de l'immixtion pour peser sur telle ou telle décision, ce qui inquiète souvent les tenants d'un bon voisinage avec Rabat.
Renforcé par des amitiés durables, la galaxie Fabius compte nombre de cercles économiques, politiques, technocratiques ou culturels. Une manière d'agir qui rappelle le fonctionnement sournois des cercles cloisonnés, à la Mitterrand.
Depuis un temps, l'homme sait qu'il ne briguera plus la présidence de la République, lui que l'on dit usé par un Parkinson précoce. Il a donc jeté tous ses efforts pour demeurer dans l'Histoire en transformant ses atouts en réseaux de connivences et d'influence. Les réseaux fabiusiens sont très fournis, très efficaces, très divers. Une de ses chevilles ouvrières, Claude Roiron se défend du fait qu'il en abuse, mais ce qu'il présente comme un think tank lové dans la haute administration n'est en réalité qu'une puissante machine de lobbying, constituée d'experts et de technos aux dents longues. Un de ses hommes est Stéphane Israël, sa plume en réalité qui a été directeur de cabinet d'Arnaud Montebourg. Il a animé avec Bernard Pêcheur et Florence Parly les petits déjeuners du Café Musset et des déjeuners organisés au Bistrot de Paris ou chez Fabius lui-même. Des rencontres discrètes qui cherchaient entre autres à remettre coûte que coûte en selle le régime algérien sur la scène régionale.
Ses ouailles disent de lui qu'il est un facilitateur au service de la diplomatie économique, son cheval de bataille au Quai. Aussi, la Fabiusie fonctionne avec comme ordre de bataille l'entrisme et le pragmatisme à outrance. Ce n'est pas par hasard que dans la plupart des cabinets ministériels, on trouve aujourd'hui un fabiusien qui défend la suprématie d'un axe Paris-Alger au Maghreb.
Mais pour durer et laisser sa trace, Fabius remet souvent les couverts d'un PS à l'ancienne. Derrière son caractère poli et conciliateur, il cache mal qu'il est en fait un digne héritier d'une gauche poussièreuse, souvent hostile au Maroc, celle de 1981 qui avait vu arriver un François Mitterrand coriace et son épouse Danielle que Hassan II avait qualifiée d'"épouse morganatique".
Et avec le royaume chérifien, il se comporte en dinosaure socialiste, accumulant les impairs jusqu'à causer l'irréparable. N'est-il pas le principal responsable du long hiver glacial que traversent les relations bilatérales entre les deux pays ?
" En politique, quand ça va, c'est ennuyeux " marmonne-t-il souvent. Une raison pour laquelle il cultive des relations distantes avec Rabat et adopte une opinion ambivalente de Normand sur les sujets qui fâchent dont celui nodal pour le Maroc : le dossier du Sahara. De plus, " il a toujours fait en sorte que ses liens soient quasi-inexistants avec l'entourage du roi " confirme une source au Quai d'Orsay. Une manière de montrer à Alger qu'il veut lui marquer sa préférence.
Les raisons sont encore une fois historiques. Côté officiel, il suffit de rappeler ici que feu le roi Hassan II avait demandé l' adhésion du Maroc à l'Union européenne dans les années 1980, à l'occasion d'une visite mémorable à Rabat de Laurent Fabius alors Premier ministre de Mitterand. La proposition royale était de l'ordre du symbolique et devait tracer le long chemin que devait parcourir le royaume jusqu'à son obtention récente du " statut avancé " avec l'UE. Cassant, Fabius avait clairement rejeté cette demande au moment où il caressait dans le sens du poil une Algérie tenue par la junte militaire. On sait que depuis l'Algérie n'a pas été un bon compagnon de l'Europe, mais plutôt un frein à l'unité du Maghreb, seul gage d'une coopération étendue avec l'UE, contrairement au Maroc qui a su consolider un partenariat multi-formes avec ses voisins du Nord.
Une autre anecdote historique démontre le double-jeu permanant de Fabius à l'égard du Maroc. Invité à donner un discours au Palais Bourbon, Hassan II pénètre dans l'hémicycle sous les applaudissements, entouré des princes. Seuls certains députés socialistes, dont Laurent Fabius et Henri Emmanuelli. ne se lèveront pas. Cette marque de défiance avait révélé la duplicité de Fabius à l'égard du Maroc, alors que celui-çi affirmait pourtant que la venue du roi en France alors que les liens avec Paris étaient grippés, était non seulement souhaitable, mais nécessaire aux bonnes relations de voisinage entre les deux pays.
C'est de cette époque lointaine qu'on lui reconnaît un tropisme prononcé pour l'Algérie. Des décennies plus tard, ce penchant pour Alger ne s'est jamais démenti, lui qui avait favorisé la proximité de Hollande avec son conseiller politique Faouzi Lamdaoui, un natif de Constantine, récemment débarqué suite à un scandale de corruption. Un autre hollandais, l'eurodéputé Kader Arif aux racines algériennes avait aussi le soutien discret mais efficace de Fabius. Il sera à son tour limogé suite à de forts soupçons de malversations. Sans oublier bien entendu Arnaud Montebourg dont la hargne anti-marocaine avait provoqué quelques grincements de dents à Rabat: le chantre de la "démondialisation" a une vague attache avec l'Algérie par le biais de sa mère Leïla Ould Cadi, descendante d'un wali de l'Algérie française... Lui aussi est tombé du carrosse présidentiel suite à un récent remaniement ministériel.
Mais qu'à cela ne tienne. Fabius demeure un allié inconditionnel de l'Algérie socialiste avec qui il tente desespérement de nouer des liens économiques improbables et à qui il cache mal l'ambition de lui octroyer un statut de gendarme de la région, alors que le régime des généraux a démontré par le passé son incapacité à régenter les conflits qu'ils soient intérieurs ou régionaux. C'est pourquoi cette religion fabiusienne pour le Maghreb a de graves conséquences sur les relations franco-marocaines et met à mal l'équilibre sécuritaire en Afrique du Nord, mais aussi sur le théâtre européen, comme nous venons de le constater avec le tragique attentat contre Charlie Hebdo. Le vieux routier de la politique sécuritaire Charles Pasqua l'a bien relevé dans Le Figaro quand celui-çi pointait du doigt l'irresponsabilité française dans le gel de la coopération policière entre Rabat et Paris. Une coopération qui jusqu'ici a déjoué bien des attentats sur le sol français.
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