Voici cet article qui montre des marocains qui risque leurs vie pour les americains...
http://www.bladi.net/21213-irak-gi-s-marocains.html
Près de 1300 Marocains défendent la bannière étoilée en Irak au sein de larmée américaine. Simples soldats ou sous-officiers, ils traduisent, interrogent, torturent parfois.
En 2002, Khalid B., 33 ans, a réalisé le rêve de la moitié de la jeunesse marocaine. Le fameux ordinateur installé dans lEtat de Kentucky aux Etats-Unis la choisi dans le cadre de la DV Green Card lottery : il fait partie des 55.000 heureux élus dans le monde qui décrochent chaque année le sésame, la carte de résidence américaine. Après des mois, Khalid débarque aux Etats-Unis. Ce natif de Aïn Sebaâ à Casablanca a juste le certificat détudes primaires. Sans diplôme, il multiple alors les petits boulots, comme il faisait au Maroc : serveur lété et tenancier de cybercafé lhiver. Mais cela finit par lirriter, lui qui rêve de devenir aussi riche que Crésus, en peu de temps et à moindre effort. Larmée américaine moffrait cette chance, je ny ai pas réfléchi deux fois, raconte-t-il du point le plus chaud de la planète. Au début, Khalid fut recruté en tant que traducteur pour larmée américaine, comme le gros lot des soldats marocains engagés par les Etats-Unis en Irak. Il raconte que grâce aux soldats marocains, plusieurs correspondances secrètes entre lex-Premier ministre irakien Nouri Al Maliki et des commandos de larmée de Moqtada Sadr ont été interceptées. (TelQuel détient une copie de lune de ces correspondances).
Les traducteurs sont recrutés par des boîtes spécialisées, raconte cet ex-conseiller marocain de la télé irakienne. On y trouve un peu de tout, de simples immigrés sans nationalité américaine qui ont débarqué grâce à la Green Card, aux chercheurs attitrés dont les publications sont convoitées par de respectueuses maisons dédition. Au début, larmée sest montrée très exigeante et ne recrutait que les éléments disposant de la nationalité américaine, mais vu la rareté des profils, les recruteurs ont fini par faire fi de ce critère et ont intégré les candidats disposant de la Green Card, analyse lex-conseiller. Les traducteurs perçoivent un salaire oscillant entre 100.000 et 135.000 dollars par an. Un peu moins que les traducteurs jouissant de la nationalité américaine, qui ont accès aux documents confidentiels, classés top secret, avec une rémunération avoisinant les 180.000 dollars par an. Les mieux lotis sont les analystes. Loin du bourbier irakien, ils livrent le suc de leur pensée dans des bureaux feutrés à Washington. Pour ce service rendu à la nation américaine, ces conseilles politiques ou culturels, qui travaillent en étroite collaboration avec le Pentagone, touchent jusquà 280.000 dollars par an.
Le temps des interrogatoires
Sur le champ de bataille, les Marocains nont plus à faire leurs preuves. Les soldats marocains engagés en Irak sont doués pour soutirer des aveux aux détenus irakiens. Ce sont eux qui ont mené les interrogatoires de détenus célèbres comme Tarik Aziz et ses semblables, se targue Mehdi, un agent maroco-américain ayant fait ses armes au sein de la tristement célèbre prison dAbou Ghraïb pendant 6 mois. Contrairement à ses frères darmes marocains, Mehdi a immigré aux Etats-Unis alors quil nétait quun enfant. A 18 ans, il a intégré lacadémie militaire de Caroline du Nord et, une fois diplômé, il a servi en Colombie, au Panama et même en Israël. Quand la guerre éclate en Irak, il ne se fait pas prier pour rejoindre les troupes américaines. Mehdi a donc choisi, de son plein gré, dembarquer pour lIrak. Par conviction, insiste-t-il. Et dajouter : Cest notre devoir demboîter le pas à tous ceux qui veulent sen prendre à nos convictions et surtout à notre mode de vie. Américain dans lâme, Mehdi est une recrue engagée, au propre comme au figuré. Mais cest loin dêtre le cas de ses pairs. Khalid na aucun embarras à affirmer quil a rejoint les boys pour venir en aide à sa famille, même sil ne le clame pas haut et fort. Au début, il a usé de tous les stratagèmes pour faire croire à son entourage quil est bien aux Etats-Unis et non en Irak.
Aujourdhui sa famille lui conseille de dissimuler ce petit détail qui fâche. Aux yeux de tout le monde, Khalid est bien à mille lieues, dans une petite ville américaine où il travaille comme taxi-driver. Quand il rentre au Maroc, comme la dernière fois durant le mois de ramadan, il se montre très discret, renfermé même, avec une pensée pour ses ouled derb pour lesquels il incarne le modèle vivant du rêve américain. En rentant chez lui, il ramène des cadeaux dAllemagne où les soldats dIrak font escale avant de rejoindre leur pays. Aujourdhui, Khalid a évolué dans les rangs de larmée : de simple traducteur, il est devenu conducteur de chars et sort en expédition dans les zones les plus risquées de Bagdad. Et ce quil fait pour le confort matériel, dautres le font pour lamour de laventure, même sil sagit de défendre une cause qui nest pas la leur.
Lost in translation
Salim, 31 ans, ne jurait que par larmée depuis quil était jeune. Au lycée, il répétait à qui voulait lentendre quil serait un grand militaire parce que tout le prédestinait à cette carrière : jeune homme élancé et très choyé par la nature, son allure évoque celle des Marines américains. Son bac scientifique en poche, il tente, sans succès, de rejoindre lacadémie marocaine. Après un bref passage à la faculté, il part aux Etats-Unis chez un parent et sy installe. Enfin le rêve se concrétise. Sergent en Irak, il vient dêtre remercié pour ses bons et loyaux services par loctroi de la nationalité américaine. Lors dune cérémonie au Camp Victory, lancien palais de Saddam Hussein, Salim, tout fier, répète quil est complètement américain. Un grand moment de lhistoire, renchérit-il en arborant fièrement son uniforme de lUS Army avec son nom greffé dessus et le drapeau américain sur son bras droit. A linstar de Khalid, Salim est, aux yeux de sa famille, aux Etats-Unis et travaille pour le compte de larmée sans plus de précision. Il rentrera au Maroc en janvier pour assister au mariage de sa petite sur.
Le soldat Farid El Azzouzi est rentré aussi en 2007, mais dans un cercueil. Ce jeune homme de 26 ans, originaire dOujda, a payé de sa vie le rêve américain. Comme la plupart des recrues marocaines en Irak, il a immigré aux Etats-Unis grâce à la Green Card. Il a rejoint larmée en 2005, comme réserviste, sur la recommandation dun vétéran marocain. Après un entraînement de base à Fort Jackson en Caroline du Sud, il rejoint lIrak. Son unité, la 3ème brigade de la 25ème division fut déployée en juillet 2006 pour une mission dun an. Mais, le 14 juin 2007, une explosion touche son Humvee à Kirkouk, il périt avec deux de ses collègues. Un mois le séparait de la fin de sa mission.
Propagande : Lautre guerre
Devant un arrière-plan de palmiers et de minarets de Bagdad, les fraichement intronisés citoyens américains se livrent à une séance de questions-réponses avec un journaliste américain mandaté par larmée. Ce dernier décroche sans aucune peine des déclarations imprégnées dun air de reconnaissance envers les Etats-Unis, rappelant un peu la propagande communiste du temps de la guerre froide. Sur cette vidéo intitulée Proud to be an american (fier dêtre un Américain), le journaliste que lon ne voit pas, insiste sur la nouvelle situation de la recrue en tant que citoyen américain. Voilà pour lambiance Dans ce bataillon, toutes les nationalités se mêlent : marocaine, thaïlandaise, péruvienne, nicaraguayenne, mexicaine Aussi puissante que lartillerie déployée en Irak, la machine médiatique de larmée frappe tous azimuts. Elle porte au pinacle les survivants et encense ceux qui ont succombé sur le champ de bataille. Les morts ont aussi droit à des hommages. Des sites web entiers sont créés pour chanter les louanges des soldats décédés et vanter leur patriotisme. Dans le communiqué annonçant le décès de Farid El Azzouzi, le Pentagone a écrit : En intégrant larmée, il aspirait à une meilleure opportunité pour réaliser le rêve américain !
Source : TelQuel - Amal Baba Ali
http://www.bladi.net/21213-irak-gi-s-marocains.html
Près de 1300 Marocains défendent la bannière étoilée en Irak au sein de larmée américaine. Simples soldats ou sous-officiers, ils traduisent, interrogent, torturent parfois.
En 2002, Khalid B., 33 ans, a réalisé le rêve de la moitié de la jeunesse marocaine. Le fameux ordinateur installé dans lEtat de Kentucky aux Etats-Unis la choisi dans le cadre de la DV Green Card lottery : il fait partie des 55.000 heureux élus dans le monde qui décrochent chaque année le sésame, la carte de résidence américaine. Après des mois, Khalid débarque aux Etats-Unis. Ce natif de Aïn Sebaâ à Casablanca a juste le certificat détudes primaires. Sans diplôme, il multiple alors les petits boulots, comme il faisait au Maroc : serveur lété et tenancier de cybercafé lhiver. Mais cela finit par lirriter, lui qui rêve de devenir aussi riche que Crésus, en peu de temps et à moindre effort. Larmée américaine moffrait cette chance, je ny ai pas réfléchi deux fois, raconte-t-il du point le plus chaud de la planète. Au début, Khalid fut recruté en tant que traducteur pour larmée américaine, comme le gros lot des soldats marocains engagés par les Etats-Unis en Irak. Il raconte que grâce aux soldats marocains, plusieurs correspondances secrètes entre lex-Premier ministre irakien Nouri Al Maliki et des commandos de larmée de Moqtada Sadr ont été interceptées. (TelQuel détient une copie de lune de ces correspondances).
Les traducteurs sont recrutés par des boîtes spécialisées, raconte cet ex-conseiller marocain de la télé irakienne. On y trouve un peu de tout, de simples immigrés sans nationalité américaine qui ont débarqué grâce à la Green Card, aux chercheurs attitrés dont les publications sont convoitées par de respectueuses maisons dédition. Au début, larmée sest montrée très exigeante et ne recrutait que les éléments disposant de la nationalité américaine, mais vu la rareté des profils, les recruteurs ont fini par faire fi de ce critère et ont intégré les candidats disposant de la Green Card, analyse lex-conseiller. Les traducteurs perçoivent un salaire oscillant entre 100.000 et 135.000 dollars par an. Un peu moins que les traducteurs jouissant de la nationalité américaine, qui ont accès aux documents confidentiels, classés top secret, avec une rémunération avoisinant les 180.000 dollars par an. Les mieux lotis sont les analystes. Loin du bourbier irakien, ils livrent le suc de leur pensée dans des bureaux feutrés à Washington. Pour ce service rendu à la nation américaine, ces conseilles politiques ou culturels, qui travaillent en étroite collaboration avec le Pentagone, touchent jusquà 280.000 dollars par an.
Le temps des interrogatoires
Sur le champ de bataille, les Marocains nont plus à faire leurs preuves. Les soldats marocains engagés en Irak sont doués pour soutirer des aveux aux détenus irakiens. Ce sont eux qui ont mené les interrogatoires de détenus célèbres comme Tarik Aziz et ses semblables, se targue Mehdi, un agent maroco-américain ayant fait ses armes au sein de la tristement célèbre prison dAbou Ghraïb pendant 6 mois. Contrairement à ses frères darmes marocains, Mehdi a immigré aux Etats-Unis alors quil nétait quun enfant. A 18 ans, il a intégré lacadémie militaire de Caroline du Nord et, une fois diplômé, il a servi en Colombie, au Panama et même en Israël. Quand la guerre éclate en Irak, il ne se fait pas prier pour rejoindre les troupes américaines. Mehdi a donc choisi, de son plein gré, dembarquer pour lIrak. Par conviction, insiste-t-il. Et dajouter : Cest notre devoir demboîter le pas à tous ceux qui veulent sen prendre à nos convictions et surtout à notre mode de vie. Américain dans lâme, Mehdi est une recrue engagée, au propre comme au figuré. Mais cest loin dêtre le cas de ses pairs. Khalid na aucun embarras à affirmer quil a rejoint les boys pour venir en aide à sa famille, même sil ne le clame pas haut et fort. Au début, il a usé de tous les stratagèmes pour faire croire à son entourage quil est bien aux Etats-Unis et non en Irak.
Aujourdhui sa famille lui conseille de dissimuler ce petit détail qui fâche. Aux yeux de tout le monde, Khalid est bien à mille lieues, dans une petite ville américaine où il travaille comme taxi-driver. Quand il rentre au Maroc, comme la dernière fois durant le mois de ramadan, il se montre très discret, renfermé même, avec une pensée pour ses ouled derb pour lesquels il incarne le modèle vivant du rêve américain. En rentant chez lui, il ramène des cadeaux dAllemagne où les soldats dIrak font escale avant de rejoindre leur pays. Aujourdhui, Khalid a évolué dans les rangs de larmée : de simple traducteur, il est devenu conducteur de chars et sort en expédition dans les zones les plus risquées de Bagdad. Et ce quil fait pour le confort matériel, dautres le font pour lamour de laventure, même sil sagit de défendre une cause qui nest pas la leur.
Lost in translation
Salim, 31 ans, ne jurait que par larmée depuis quil était jeune. Au lycée, il répétait à qui voulait lentendre quil serait un grand militaire parce que tout le prédestinait à cette carrière : jeune homme élancé et très choyé par la nature, son allure évoque celle des Marines américains. Son bac scientifique en poche, il tente, sans succès, de rejoindre lacadémie marocaine. Après un bref passage à la faculté, il part aux Etats-Unis chez un parent et sy installe. Enfin le rêve se concrétise. Sergent en Irak, il vient dêtre remercié pour ses bons et loyaux services par loctroi de la nationalité américaine. Lors dune cérémonie au Camp Victory, lancien palais de Saddam Hussein, Salim, tout fier, répète quil est complètement américain. Un grand moment de lhistoire, renchérit-il en arborant fièrement son uniforme de lUS Army avec son nom greffé dessus et le drapeau américain sur son bras droit. A linstar de Khalid, Salim est, aux yeux de sa famille, aux Etats-Unis et travaille pour le compte de larmée sans plus de précision. Il rentrera au Maroc en janvier pour assister au mariage de sa petite sur.
Le soldat Farid El Azzouzi est rentré aussi en 2007, mais dans un cercueil. Ce jeune homme de 26 ans, originaire dOujda, a payé de sa vie le rêve américain. Comme la plupart des recrues marocaines en Irak, il a immigré aux Etats-Unis grâce à la Green Card. Il a rejoint larmée en 2005, comme réserviste, sur la recommandation dun vétéran marocain. Après un entraînement de base à Fort Jackson en Caroline du Sud, il rejoint lIrak. Son unité, la 3ème brigade de la 25ème division fut déployée en juillet 2006 pour une mission dun an. Mais, le 14 juin 2007, une explosion touche son Humvee à Kirkouk, il périt avec deux de ses collègues. Un mois le séparait de la fin de sa mission.
Propagande : Lautre guerre
Devant un arrière-plan de palmiers et de minarets de Bagdad, les fraichement intronisés citoyens américains se livrent à une séance de questions-réponses avec un journaliste américain mandaté par larmée. Ce dernier décroche sans aucune peine des déclarations imprégnées dun air de reconnaissance envers les Etats-Unis, rappelant un peu la propagande communiste du temps de la guerre froide. Sur cette vidéo intitulée Proud to be an american (fier dêtre un Américain), le journaliste que lon ne voit pas, insiste sur la nouvelle situation de la recrue en tant que citoyen américain. Voilà pour lambiance Dans ce bataillon, toutes les nationalités se mêlent : marocaine, thaïlandaise, péruvienne, nicaraguayenne, mexicaine Aussi puissante que lartillerie déployée en Irak, la machine médiatique de larmée frappe tous azimuts. Elle porte au pinacle les survivants et encense ceux qui ont succombé sur le champ de bataille. Les morts ont aussi droit à des hommages. Des sites web entiers sont créés pour chanter les louanges des soldats décédés et vanter leur patriotisme. Dans le communiqué annonçant le décès de Farid El Azzouzi, le Pentagone a écrit : En intégrant larmée, il aspirait à une meilleure opportunité pour réaliser le rêve américain !
Source : TelQuel - Amal Baba Ali