Journalistes tués dans l'exercice de leurs fonctions

  • Initiateur de la discussion Initiateur de la discussion Drianke
  • Date de début Date de début

Hossam Shabat et la résistance au temps du génocide​

3 avril 2025


01-4-678x455.jpg

Illustration : The Legal Agenda


Par Hussein Chaabane

« Je dis au monde que le nord de la bande de Gaza souffre de maladies et de la faim, et je crains maintenant de marcher tout le temps lorsque je couvre les événements, de peur de m’effondrer de faim dans la rue. Je dis au monde que je continue. Je couvre les événements avec un estomac vide, avec constance et persévérance. Je m’appelle Hossam Shabat et je viens du nord de la bande de Gaza. »

Le 24 mars 2025, Israël a assassiné le journaliste Hossam Shabat, reporter pour Al Jazeera Mubasher et collaborateur de Drop Site News, dans ce que des témoins ont décrit comme une frappe ciblée.
C’est par ces mots que Hossam Shabat, l’un des derniers journalistes à résister dans le nord de la bande de Gaza, résume son expérience. Aujourd’hui, il est confronté à la famine mortelle qu’Israël utilise comme dernière arme pour détruire la communauté de Gaza.

Hossam, 22 ans, s’est retrouvé au cœur du génocide et a décidé de le défier. À l’occasion de la Journée internationale de solidarité avec les journalistes palestiniens, il était de notre devoir de donner la parole aux personnes et à la cause mêmes auxquelles cette journée est dédiée. The Legal Agenda a interviewé Hossam afin qu’il puisse partager son expérience et parler de la souffrance de ses collègues répartis dans les zones du nord, qu’il estime être au nombre de 19.

Hossam transmet la voix du Nord – qu’Israël tente de dépeindre comme désertique alors que sa population est confrontée à la famine en raison du blocus, des massacres et des destructions – en fournissant une couverture continue à la fois sur Al Jazeera et sur ses pages de médias sociaux.

Nous le voyons documenter les histoires d’enfants morts de faim. Nous le voyons parler d’une femme qui a perdu tous ses fils lors du bombardement de la maison familiale, mais dont la belle-fille a accouché d’un petit-fils une semaine plus tard ; elle pleure ses enfants devant sa tente, puis s’occupe de son petit-fils, qui s’appelle Muhammad en l’honneur de son père.

Dans les reportages de Hossam, nous voyons les habitants du nord de Gaza en proie à la souffrance ; il documente l’état de leurs enfants dans le froid et la faim, parle des tentes inondées des personnes déplacées, montre l’un de ses repas composé de quelques galettes d’orge et pleure ses collègues avant de se précipiter pour documenter le bombardement des maisons et la récupération des corps des victimes en direct sur Al Jazeera.

Hossam continue, bien qu’il ait été directement menacé par l’armée israélienne, qui a bombardé sa maison, rasé le restaurant qui était la source de revenus de sa famille, détruit son rêve de créer une société de médias et de marketing, et tué 30 membres de sa famille. Il continue bien qu’il soit affamé, qu’il soit sans abri et qu’il soit seul loin de sa famille qui a fui à Rafah.

Hossam a affronté et défié les menaces israéliennes et les appels téléphoniques intimidants qui lui ordonnaient de supprimer ses posts et de fermer l’objectif de son appareil photo. L’occupation l’a poursuivi jusqu’à l’hôpital où il s’était réfugié après avoir survécu à l’attaque du marché de Beit Hanoun, où il couvrait les événements. La mère du jeune journaliste s’est opposée à sa décision de poursuivre le reportage et l’a imploré de l’accompagner dans le sud, mais il a insisté pour ne pas quitter le nord de Gaza et a envoyé sa famille dans le sud sans lui.

La mère, ainsi que le reste de sa famille, a suivi un dangereux chemin de déplacement du nord au sud, témoignant de l’horreur de la destruction, de la brutalité et de la criminalité de l’occupation. Lorsque ses craintes se sont concrétisées et que la famille a été attaquée et bombardée, elle a envoyé un message à Hossam : « Ne quitte pas ton appareil photo, mon fils, même si ta tête est séparée de ton corps. Continue à documenter tous les crimes de l’occupation ».

Les journalistes de Gaza continuent d’être pris pour cible dans le cadre de la guerre génocidaire, 132 d’entre eux – soit 10 % – ayant déjà été tués selon le bureau gouvernemental des médias à Gaza. Beaucoup d’autres se sont retrouvés sans abri et vivent désormais dans les hôpitaux, les tentes et les centres d’hébergement.

Certains ont été arrêtés, torturés et portés disparus. Des dizaines de personnes ont été blessées lors d’attaques israéliennes, certaines ayant perdu un membre...................


 

« Je voudrais vous parler du journaliste Ahmed Mansour »​



Ce fondateur de GazaPress, un bureau qui fournissait aide et traduction aux journalistes occidentaux, a dû quitter en octobre 2023 son appartement de Gaza-ville avec sa femme Sabah, les enfants de celle-ci, et leur fils Walid, deux ans et demi, sous la menace de l’armée israélienne. Réfugiée depuis à Rafah, la famille a dû ensuite se déplacer vers Deir El-Balah et plus tard à Nusseirat, coincés comme tant de familles dans cette enclave miséreuse et surpeuplée. Un mois et demi après l’annonce du cessez-le-feu, Rami est enfin de retour chez lui avec sa femme, Walid et le nouveau-né Ramzi. Pour ce journal de bord, Rami a reçu le prix de la presse écrite et le prix Ouest-France au Prix Bayeux pour les correspondants de guerre. Cet espace lui est dédié depuis le 28 février 2024.

Jeudi 10 avril.

Aujourd’hui, je voudrais vous parler du journaliste Ahmed Mansour. Vous avez sans doute vu l’image atroce de ce journaliste palestinien de Gaza, assis sur une chaise où il brûlait vif dans un bombardement israélien. Ce bombardement a visé la tente où il se trouvait, avec d’autres journalistes. Il y a eu trois morts en tout. Deux journalistes, Ahmed Mansour et Helmi Al-Fakaawi, et un homme qui se trouvait à proximité. Neuf autres journalistes ont été blessés, certains grièvement… Et cette image a fait le tour du monde. Ce n’est pas la première fois que les Israéliens utilisent ce genre d’armes incendiaires. On avait déjà vu des images de gens calcinés après un bombardement.

Quant aux journalistes, plus de deux cents d’entre eux ont été tués par l’armée israélienne depuis le début de la guerre, selon l’ONG Reporters sans frontières. Certains ont été tués avec toute leur famille. Parfois, ce sont leurs familles qui ont été assassinées, comme cela s’est passé pour Wael Al-Dahdouh, le correspondant de la chaîne Al-Jazira, qui a perdu de nombreux proches dans des frappes ciblées. Malheureusement, beaucoup de médias étrangers traitent cette guerre contre le journalisme en adoptant plus ou moins la vision israélienne. Comme ceux qui ont mis en avant, dans leurs titres, qu’Ahmed appartenait à un « média affilié au Djihad islamique, considéré comme terroriste par de nombreux pays ».

C’est vrai, et à la fois ce n’est pas vrai. Oui, Ahmed travaillait pour Falastin Al-youm, (« Palestine Today » — « Palestine aujourd’hui ») depuis la fin de ses études de journalisme, il y a dix ans. Oui, ce média est lié au mouvement du Djihad islamique. Mais d’après ses amis, Ahmed était l’un de ces nombreux journalistes qui ne partagent pas l’idéologie de leur employeur, Fatah, Hamas ou autres. Pour faire leur travail, ils n’ont guère d’autre solution, la plupart des médias de Gaza dépendent plus ou moins d’un mouvement politique..............................

 

« Nous, journalistes français, nous déclarons solidaires de nos collègues de Gaza »​

Les bombardements israéliens sur la bande de Gaza ont tué plus de deux cents journalistes palestiniens en dix-huit mois. Un collectif d’organisations professionnelles françaises, dont Orient XXI fait partie, a dénoncé, dans une tribune, cette hécatombe et le black-out médiatique qu’Israël organise sciemment. En voici des extraits.

Ce collectif organise mercredi 16 avril, à 18h, deux rassemblements simultanés : devant l’Opéra Bastille, à Paris, et sur le Vieux-Port, à Marseille.

 
Retour
Haut